Les mots pour le dire

Dans cet ouvrage, Serge Doubrovsky renoue avec l'autofiction, ce genre littéraire à mi chemin entre le roman et l'autobiographie, qu'il avait lui-même inventé en 1977 avec «Fils» et qui fera, comme on sait, de nombreux émules, par la suite.
«Le livre brisé» obtint le prix Médicis en 1989 ; l'auteur, suivant ici les traces de Sartre, son maître à penser dans «la Nausée» ou «les Mots» s'y met totalement à nu en n'épargnant aucun détail au lecteur ; encore moins à sa femme Ilse qui, invitée à participer activement à cette confession ouverte, ne pourra supporter davantage l'étalage de sa propre déchéance d'alcoolique sur la place publique.
D'aucuns trouveront cette démarche, à la limite du voyeurisme, totalement indécente et délétère. D'autres seront émus par la sincérité de ce témoignage au travers de la souffrance exprimée par le narrateur face à LA «mort en direct».
Le destin de ce juif, professeur de littérature partageant son temps entre New-York et Paris, remarié à une jeune étudiante autrichienne, de 23 ans sa cadette, est, certes, très attachant.
Nul, en tout cas, ne pourra rester indifférent à l'originalité du style qui vaut à elle seule le détour.
Serge Doubrovsky fait en effet jouer les mots au gré de ses souvenirs selon un rythme obsessionnel et envoûtant qui emporte le lecteur dans un tourbillon symphonique aussi sublime qu'éprouvant.
Peut-être, comme le déclare lui-même Serge Doubrovsky dans son ouvrage, «vouloir débiter sa vie pendant qu'on la vit, pas au passé, à chaud, à vif est un pari impossible. L'autobiographie, comme la vengeance se mange froide»
Bien d'autres auteurs ont emprunté après lui ce chemin périlleux avec plus ou moins de bonheur.
Quoi qu'il en soit, même brisé, ce livre emblématique de souvenirs s'oubliera difficilement.

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  Le Livre brisé [Texte imprimé], roman Serge Doubrovsky

  de Doubrovsky, Serge
  B. Grasset
  ISBN : 9782246386315 ; 28,40 € ; 23/08/1989 ; 416 p. ; Broché

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