Un long Moyen Age de Jacques Le Goff

Un long Moyen Age de Jacques Le Goff

Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Histoire

Critiqué par Bolcho, le 1 novembre 2009 (Bruxelles, Inscrit le 20 octobre 2001, 75 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (25 344ème position).
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Moyen Age jusqu'au XVIIIe siècle ?

Pour Le Goff, le Moyen Age, c’est un peu le christianisme dominant, ce qui le fait effectivement durer jusqu'à la fin du XVIIIe, d’où le titre général : le long Moyen Age.

On trouvera dans ce livre – qui est constitué d’une succession d’articles parus dans l’excellente revue « L’Histoire » - une série de sujets :

- le « Beau Moyen Age » (entre 1150 et 1260 environ) où les famines reculent et la population augmente ;

- les Croisades – qui sont une catastrophe dont les effets se font encore sentir aujourd’hui – et qui ont des causes multiples : la croissance démographique, la volonté de l’Eglise d’empêcher les guerres entre chrétiens, la volonté de la papauté de se positionner comme chef de la chrétienté, la position des cadets de familles nobles qui, à défaut d’hériter du fief, veulent coloniser, etc. Un détail m’était inconnu et vaut son pesant d’horreur : Richard Cœur de Lion aurait participé à la croisade de 1191-92 en portant un collier de têtes coupées autour de son cou.

- les femmes et l’Eglise : en quoi leur statut s’est-il amélioré (institution du mariage monogame indissoluble par exemple) et en quoi restent-elles des impures aux yeux de l’Eglise.

- le refus du plaisir et les bizarreries qui en découlent. Je ne résiste pas à l’envie de vous citer cet extrait d’un manuel des confesseurs (veuillez coucher les enfants) : "As-tu bu le sperme de ton mari ? Si oui : 7 ans de pénitence au pain et à l'eau"
"As-tu agi comme font les femmes : elles prennent un poisson vivant, l'introduisent dans leur sexe, l'y maintiennent jusqu'à ce qu'il soit mort et, après l'avoir cuit ou grillé, elles le donnent à manger à leur mari pour qu'il s'enflamme davantage pour elles ? Si oui : 2 ans de jeûne".

- le sacre de Saint Louis. A ce propos, cette note : "La Sainte Ampoule contenait le Saint Chrême, huile miraculeuse que le Saint-Esprit aurait, selon la légende, apportée à l'évêque de Reims, Remi, pour le baptême de Clovis, à la fin du Ve siècle. Il se forma entre le IXe et le XIe siècle une tradition qui transforma le baptême de Clovis en sacre où intervenait la Sainte Ampoule".
Je me pose des questions forcément, sérieuses et moins sérieuses :
- à quelle époque est née cette légende ?
- imaginons qu'elle soit contemporaine du sacre de Clovis... Le filou de Remi a-t-il voulu se mettre en valeur ? Ou faire une blague ? Non, je sais bien, on ne faisait pas de blagues de ce genre. Mais alors, que s'est-il passé et - de manière plus générale au sujet des reliques, etc - il y a bien au départ quelqu'un qui fait courir un bruit en sachant qu'il est faux, non ?
- La Sainte Ampoule devait contenir une sacrée (c'est le cas de le dire) quantité de Chrême pour tenir des siècles et des siècles... Qui la remplissait de temps à autres et dans quel état d'esprit ? Ni plus ni moins que les hosties que l'on fabrique en série et dont on se dit tranquillement que c'est le corps du Christ sous prétexte qu'un prêtre a fait un tour de passe-passe magique sur le tas de petites crêpes ?
- qu'est devenue cette Sainte Ampoule aujourd'hui ?

Dans le même genre, ceci : c'est en 1263 qu'un grand miracle se produisit à Bolsena, au nord de Rome : un prêtre vit saigner l'hostie pendant la messe. Le pape Urbain IV constata officiellement le miracle et en tira argument pour promulguer le dogme de la présence réelle du corps du Christ dans l'eucharistie.
Là encore, deux attitudes possibles. On y croit dur comme fer ou non. Et si c'est non, on est bien obligé de se poser la question de l'entourloupe au départ : le prêtre a menti, le pape a menti, et, comme par hasard, cela s'est passé tout près de chez le pape qui a ainsi pu facilement "vérifier", d'où le lourd soupçon de collusion entre le prêtre et le pape.


Bon, j’arrête là. Je ne vais tout de même pas recopier le bouquin quand même.

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Un beau moyen-âge

8 étoiles

Critique de Guigomas (Valenciennes, Inscrit le 1 juillet 2005, 54 ans) - 30 mai 2013

Jacques Le Goff, médiéviste réputé qui fit beaucoup pour dissiper l‘image ténébreuse du Moyen-Age, compile dans ce petit ouvrage une série d’articles et d'interviouves qu’il donna à la revue l’Histoire, et c’est très intéressant malgré quelques redites.

La thèse principale développée par Le Goff donne son titre à l’ouvrage, Bolcho l’a rappelée. Elle est très discutable mais argumentée. Puis viennent les « mystères joyeux » si j’ose dire, les côtés lumineux du moyen-âge : la place des femmes dans la société (chapitre qui se conclut par le constat qu’il y avait plus de femmes gouvernant des états en Europe au XIIIè siècle que de nos jours), la recherche de la justice même dans la guerre, le développement de la ville et de la cellule familiale, bref ce que l’auteur lui-même appelle le « beau moyen-âge »…

Suivent les « mystères douloureux », du moins Le Goff les considère-t-il comme tels, les croisades, le refus du plaisir et le péché partout… Détail amusant, alors que des textes primordiaux sont mentionnés à tire larigot dans ce livre, le seul dont de larges extraits soient cités est un obscur manuel pour confesseurs qui nous semble risible ou choquant par le détail des pénitences infligées aux fornicateurs, fellatrices et autres luxurieux.

Ce livre n’est pas vraiment une introduction au Moyen-Age car il traite de sujets très particuliers mais il permet de dissiper quelques idées reçues largement véhiculées. C'est aussi sans doute une bonne porte d'entrée à l'oeuvre de Jacques Le Goff.

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