Les têtes à Papineau de Jacques Godbout

Les têtes à Papineau de Jacques Godbout

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Saumar, le 30 septembre 2009 (Montréal, Inscrite le 15 août 2009, 90 ans)
La note : 10 étoiles
Visites : 7 132 

Prodigieux et divertissant

Ce qui attire mon attention, c’est le message idéologique que Jacques Godbout transmet en intégrant l’histoire du Québec dans un récit originale, drôle et triste en même temps. L’auteur donne la parole à Charles et François Papineau (monstre à deux têtes) qui racontent leurs propres aventures, jusqu’à leurs sentiments les plus intimes. Les deux têtes sont autonomes : tête gauche (Charles) pense et écrit anglais et tête droite (François) pense et écrit français (96). Ils atteignent 19 ans de scolarité qu’exigent les doctorats. La télévision les rendit célèbres. « Nous étions un monstre éduqué parmi les hommes ». (Le nom Papineau nous rappelle sa fuite aux États-Unis, alors devenu collaborateur du gouvernement anglais et les patriotes de 1937). Politiquement engagé dès 1968 au mouvement Souveraineté-association, Godbout a écrit ce livre juste après l’échec référendaire de 1981.

Un chirurgien bien connu cherche des cas exceptionnels et rares pour lui servir de cobayes et pour surfaire sa renommée. Le docteur Gregory B. (pour Beaupré) Northridge, les invite donc pour expliquer la possibilité de mettre l’être bicéphal en liberté, dans un monde unicéphal, ce qui rendrait l’enfant plus heureux. (24)

Le père travaille au journal La Presse. À la naissance de l’enfant, il publie en première page, Fait divers ou fait divin? Il continue à taper des articles ou obtenir des entrevues. La direction flattée d’avoir dans ses rangs le père des« têtes » le consacre « Intellectuel de service », on lui confie les grands dossiers» (110). Il ira jusqu’à céder les droits sur des statuettes du monstre à deux têtes. Il en profite pour augmenter ses revenus. La mère est la seule à ne pas vouloir l’opération pour l’enfant bicéphal. « Je vous ai donné la vie comme vous êtes, vous resterez ainsi. Il n’est pas question de vous couper en deux comme un citron ».

On avait rasé Charles et François et tous les deux étaient profondément anesthésiés en attendant la décision de la famille. Enfin, tous d’accord, l’opération eut lieu. L’homme unicéphal survit, mais anglophone unilingue. On aura employé la moitié de chaque tête pour n’en faire qu’une. La technologie triomphait (144). Ils appartenaient à la science (147).

De ce livre, je retiens la subtilité de l’auteur à présenter une intrigue parfois touchante, parfois amusante tout en intégrant une partie de notre histoire du Québec. Dans le dernier chapitre, intitulé « enfin », Charles F. Papineau écrit une lettre d’affaires en anglais pour expliquer à l’éditeur qu’il ne peut pas terminer le travail commencé par les deux têtes parce qu’il ne comprend plus le français. Impossible de respecter le contrat. Le livre étant le journal de leur évolution, définitivement, c’était leur biographie. J’ai trouvé l’idée géniale pour conclure. Quelle ironie surprenante, cette lettre en anglais!

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