Gens sans terre de Julia O'Faolain

Gens sans terre de Julia O'Faolain
( No country for young men)

Catégorie(s) : Littérature => Anglophone

Critiqué par Débézed, le 7 novembre 2008 (Besançon, Inscrit le 10 février 2008, 77 ans)
La note : 7 étoiles
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Sous le regard de Brendan Behan

« Je ne suis pas folle ! fit-elle. » mais « en rêve elle voyait un homme tenant ses intestins à la main." Sœur Judith qui vient de passer plus d’un demi-siècle au couvent, quitte la règle pour le siècle car ce couvent va fermer ses portes pour envoyer les sœurs auprès des plus nécessiteux. Son petit-neveu Michael, prend en charge cette vieille femme hantée par un secret qu’elle n’arrive pas à exhumer du fond de son subconscient, malgré le départ de sa femme, Grainne, qui est partie avec leur fils pour ne plus subir son alcoolisme chronique. L’arrivée de Sœur Judith à la maison est l’occasion pour Grainne de renouer avec Michael une vie commune un peu illusoire qui s’effiloche vite après l’arrivée d’un Américano-irlandais qui veut tourner un film sur l’Irlande. Mais ce projet ravive bien des souvenirs douloureux liés aux événements de 1921 quand « Même le Dail éclatait, partagé entre ceux qui acceptaient le nouvel Etat Libre, les Etatistes, et les républicains intransigeants, incapables de renoncer au rêve pour lequel ils avaient combattu : une république d’Irlande-Unie, indépendante de l’éternel oppresseur exploiteur et hautain. » Et, dans ce contexte les souvenirs de la vieille sœur deviennent vite très dangereux pour ceux qui ont encore des ambitions, « Le passé peut tuer », car ils pourraient faire surgir de nouveaux éléments sur la mort violente d’un autre Américano-irlandais assassiné à cette époque.
Ce livre, c’est le roman de l’Irlande qui n’arrive pas à réconcilier ceux qui acceptent de vivre libre dans les vingt-six comtés et ceux qui veulent la grande Irlande qui rassemblerait les trente-deux comtés dans une même république indépendante. C’est l’histoire sans cesse recommencée, même si « l’histoire ne ressert jamais les mêmes plats, » de l’Irlande aux prises avec ses mythes et ses fantômes, son honneur et ses malversations, sa fierté et sa cupidité.

C’est aussi le roman de ces Irlandais fiers et excessifs en tout qui se divisent entre ceux qui veulent la guerre, ceux qui veulent la paix, ceux qui veulent juste vivre tranquilles et ceux qui sont punis sans savoir pourquoi. C’est l’histoire de ce peuple qui refuse de se laisser écraser par un adversaire ancestral et trop puissant mais qui se divise sur les méthodes à employer.

C’est aussi l’histoire de cette famille, métaphore de cette la nation irlandaise, qui explose emportée par l’histoire de ce île où les êtres comptent moins que le peuple et que les générations à venir.

Mais, c’est surtout l’histoire de ces femmes et notamment celle de Grainne qui, avec Kathleen, représente tout le drame de la femme irlandaise condamnée à être l’épouse d’un héros, la veuve d’un combattant, la mère éplorée d’un fils décédé au combat, Pénélope attendant désespérément le mari emprisonné, femme génitrice de fiers combattants ne connaissant que l’angoisse, le travail et la frustration car il faut garder toujours la fidélité aux combattants abattus ou internés.

« Un modèle de roman » aurait dit William Trevor, certes « les Irlandais sont des experts en mots » et en … maux, mais il y a dans ce roman, fort comme un vieux whiskey, au style âpre qu’il faut apprivoiser comme un novice amadoue la Guinness, des matières en suspension qui perturbent la clarté du récit. Julia, la stout n’est pas claire, à trop embrasser on finit par mal embrasser et à trop vouloir en dire on pollue le récit. Digressions, réflexions, considérations diverses encombrent quel que peu le texte et n’en facilitent pas la lecture, c’est dommage car c’est tout de même un grand livre et le vieux Brendan (Behan bien sûr), là haut, accoudé au coin de son bar, doit être fier de toi en sirotant son éternelle Guinness. Car, comme on dit dans les travées de Landsdowne Road « Old soldiers never die ».

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Les éditions

  • Gens sans terre [Texte imprimé], roman Julia O'Faolain trad. de l'anglais par Jacques Georgel
    de O'Faolain, Julia Georgel, Jacques (Traducteur)
    Phébus / D'aujourd'hui. Étranger (Paris).
    ISBN : 9782859403652 ; 11,82 € ; 29/03/1995 ; 430 p. ; Broché
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