Les nus et les morts de Norman Mailer

Les nus et les morts de Norman Mailer
(The Naked and the Dead)

Catégorie(s) : Littérature => Romans historiques

Critiqué par Bolcho, le 1 novembre 2001 (Bruxelles, Inscrit le 20 octobre 2001, 75 ans)
La note : 10 étoiles
Moyenne des notes : 10 étoiles (basée sur 4 avis)
Cote pondérée : 7 étoiles (1 120ème position).
Visites : 8 217  (depuis Novembre 2007)

Mailer lui-même a été écrasé par son monument...

Je vous fais l'insulte de résumer le propos ? Le récit tourne autour d'une escouade de Marines lors de la prise d'une île du Pacifique. Et la question est: pourquoi ce bouquin est-il un tel monument finalement ?
Je viens de le relire et comme les premières fois j'ai été totalement fasciné; un peu comme si je ne l'avais jamais lu avant. C'est que Mailer s'y entend pour construire son truc, à la manière américaine: un personnage à gauche, un à droite, un de ce côté et un autre de l'autre et le récit finira par les mêler aux mêmes événements. Sauf qu'en plus, il joue aussi sur la dimension temporelle. La plupart des personnages de l'escouade, qui souffrent, qui transpirent, qui se tuent comme des bêtes et qu'on tue comme des bêtes, la plupart d'entre eux sont décrits quand ils étaient jeunes, aux Etats-Unis, dans leur petit village perdu, avec leurs espoirs de gamins, leurs perspectives de vies pépères ou leurs rêves de gloire. Et forcément, l'écart avec leur situation présente crée le choc.
En même temps qu'un des plus grand récits de guerre sur 39-45, "Les nus et les morts" est une réflexion sur le destin individuel des petits humains que nous sommes. Mailer fait jouer les mêmes ressorts que Russel Banks plus tard: la durée, l'écart entre les rêves d'enfance et la vie adulte.
Il y a presque toujours un moment de notre jeunesse où nous tutoyons et défions le monde avant qu'il se charge de nous réduire en purée, d'une manière ou d'une autre. Et ce qui fait l'originalité d'un être, c'est souvent sa manière bien à lui d'accepter la défaite. Parce que la défaite elle aussi, elle peut grandir quelqu'un. Cela me rappelle un passage de Cees Nooteboom ("Le chant de l'être et du paraître") que j'avais noté au passage. Deux personnages sont en train de jouer aux échecs. le plus vieux parle: "La victoire n'est rien mon garçon, la victoire ne laisse pas de traces, c'est un assouvissement passager. La vie, c'est la défaite. Tu verras plus tard: à la table de jeu, aux échecs, avec les femmes et à la guerre - perdre, c'est la vie, gagner, c'est la mort, parce qu'après il n'y a plus rien (...)". Et sur ce il annonce: "Echec et mat".

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Des gars dans la guerre..

10 étoiles

Critique de Fabert (, Inscrit le 10 octobre 2015, 70 ans) - 23 juillet 2016

Je sors à l'instant de ce livre de 750 pages au contenu âpre et poignant. De l'attaque de cette île de l'océan Pacifique par l'armée US, à l'extermination des forces d'occupation japonaise, le récit de Norman Mailer nous décrit le déroulement de l'opération militaire orchestré par le général Cummings. Sa description de la vie quotidienne d'une armée américaine en campagne nous montre la qualité de leur logistique. Mais, évidemment , c'est la présentation des combattants qui est réellement époustouflante. Des officiers de carrière, et leur esprit de caste, aux sous officiers, fiers d'être sortis de la plèbe, aux troufions de base qui se sentent toujours civils.
Nous sommes, tour à tour, dans la tête du général Cummings, du lieutenant qui lui sert d'ordonnance, et des nombreux protagonistes de la section d'infanterie Reconnaissance.
La description des paysages et de la mission de reconnaissance derrière les lignes japonaises est haletante et vraiment réaliste. Pas de héros dans ce livre mais des hommes qui tiennent à leur peau.
Vraiment très bien.

Une guerre féroce et absurde

10 étoiles

Critique de Saule (Bruxelles, Inscrit le 13 avril 2001, 58 ans) - 19 novembre 2012

Ce roman est chargé d'un souffle et d'une tension dramatique qui nous clouent dans le fauteuil. C'est un roman sur la guerre, ou plutôt contre la guerre comme le dit Benoit car rarement la guerre parait aussi absurde et vaine de sens. Ce qui fait la force du roman, c'est qu'on connait chacun des soldats, l'auteur nous les présente un par un, avec des "flash-back" dans la vie avant la guerre. C'est une mosaïque de pauvres gars, des ouvriers à la petite semaine, des agriculteurs durs à la tache, un vagabond qui tombe les femmes et dépense son argent dans de la gnôle. Une mosaïque de communautés aussi, avec deux juifs de New York, un immigré Italien, un irlandais, un Mexicain,etc. Et chez les gradés, il y a des ambitieux, issus de familles riches mais aussi un idéaliste syndicaliste.

On peut reprocher certaines longueurs, par exemple lors de la patrouille dans la jungle des longues description des tourments physiques des soldats à bout de force. Le langage des soldats est souvent cru et ordurier, les discussions tournent souvent autour des femmes, que ce soit les souvenirs sensuels ou la crainte d'être trompé. Mais on est tellement pris par le destin de ces hommes, pris dans un combat absurde et écrasé par le destin, qu'on pardonne facilement chaque petite longueur.

J'avais décidé de lire ce roman il y onze ans, en lisant la critique de Bolcho. je ne sais pas pourquoi j'ai attendu si longtemps, mais je suis content de l'avoir lu, et je suis sorti abasourdi de ce récit.

Roman anti-guerre

9 étoiles

Critique de Benoit (Rouen, Inscrit le 10 mai 2004, 43 ans) - 20 mai 2004

Récit de guerre mais surtout récit de vies humaines, malheureuses chez elles au pays, et écrabouillées par cette guerre du Pacifique... Pas très optimiste comme vision de la vie mais le récit est passionnant (très bon roman de guerre de ce point de vue la) et les personnages sont extrêmement attachants car dans la vie de ces hommes, il y a beaucoup de fêlures...
La construction du roman (récit de la bataille sur l'ile entrecoupé de biographies des personnages) est originale et nous permet de mieux apprécier les changements survenus dans ces hommes et le pourquoi de leur comportement dans la bataille.
Mais le must, c'est la fin qui se termine par un incroyable pied de nez, très drôle mais extrêmement pathétique, qui résume à lui tout seul la noirceur de ce roman.

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