Marge brute de Laurent Quintreau

Marge brute de Laurent Quintreau

Catégorie(s) : Littérature => Romans historiques

Critiqué par Attentif, le 23 novembre 2006 (Inscrit le 15 novembre 2006, 91 ans)
La note : 9 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (13 113ème position).
Visites : 3 397  (depuis Novembre 2007)

L'Apocalypse….en vrai

Une réunion du "comité stratégique" dans une entreprise de comm qui réunit :

Dominique Meyer très "génisse bien nourrie. Pas tellement agressive, convoitée par celui-ci ou celui-là, mais sans frénésie. Assez insipide
Anne-Laure Brémont la…."ça y est, j'ai des fourmis dans les jambes, marre d'être assise, j'ai faim, j'ai les jambes lourdes, impression d'être une grosse vache…. J'aimerais bien me trouver un homme, mais que faire, où aller pour le trouver…. J'ai beau avoir fait Sciences Po et un DESS en psycho appliquée, je me sens aussi décérébrée qu'un papillon"
Tissier En cours de divorce", obsédé par l'idée d'emmerder son ex- et en plus, ses hémorroïdes le font souffrir et sa tension l'inquiète.
Craint d'être lourdé mais il lourdera au préalable ses subordonnés pour obtenir un délai
"harcelé par ce divorce, cette plainte pour non-assistance à personne en danger parce qu'un connard de SDF est venu crever sur mon palier, et Julia qui me menace de harcèlement sexuel, ça m'apprendra à coucher avec une de mes subordonnées"
Stoeffer, l'ancien propriétaire de l'entreprise, furieux de n'occuper qu'une position subalterne, rouge et colérique, veut tuer TOUS les autres, la fureur faite homme.
" Stoeffer demande ce qu'est la GED. Françoise répond que GED signifie Gestion Electronique de Documents…"
…. Gueules anéanties à la Bacon, faces explosées à la Di Rosa, chairs hurlantes à la Munch…Stoeffer ne pense qu'à cela, les détruire !!!".
Pujol, " Le Don Juan des clubs de gym, le Casanova des vestiaires"le bellâtre fier de lui "cheveux bruns ondulés, yeux bleu lavasse, traits réguliers plutôt grossiers, fausse irrésistibilité du séducteur cheap"? Fait du chiffre avec les affaires que lui amène son beau-frère. Tiens à jour le nombre de ses coucheries : 201
De Vals. Le copain de Barco, le président du groupe. Homo sadique et terrorisé par la maladie "j'espère que ces grosses putes (des travelos) ne m'ont pas contaminé, à moins que ce ne sois le gros mec piercé du Deeper, le week-end d"dernier, Ça y est, mon cœur s'emballe, j'ai des frissons d'angoisse, ces saloperies de maladies me fichent une de ces trouilles"
""je te foutrais ça en retraire, hop-hop-hop, ils doivent confondre hospice et entreprise…. Je suis appelé à d'immenses responsabilités et je vais tous vous croquer
Castaglione. Une mante religieuse : "patience mon ange, un jour je serai à toi comme tu seras à moi, en moi, et ce jour-là tu réaliseras avec un effroi glacial qu'il est tard, bien trop tard pour faire marche arrière…. j'espère que Jean-Christophe n'a pas vomi aujourd'hui, hier il avait renvoyé toutes ses croquettes au poisson".
Ambitieuse et dénuée d'affectif elle ne pense qu'en termes de conflit et souhaite castrer tous les hommes "je lis les âmes à cœur ouvert et je ne connais pas la compassion; la souffrance des autres m'amuse ou, au mieux, m'indiffère
Rorty. Le manager fier de l'être, ravi de terroriser ses subalternes et de supputer le plaisir qu'il aura en baisant Castaglione mais lui-même terrorisé par Fischer le représentant du siège qui demande toujours plus de dégraissage, toujours plus de résultats
"je déjeune avec Fischer, je connais déjà la chanson, chantages, menaces et Cie : si tu ne gagnes pas deux gros budgets d'ici la fin de l'année, nous devrons revoir les termes de notre collaboration…. il va me cuisiner sur le prévisionnel de l'année, j'en ai déjà mal au ventre, saloperie d'intestins toujours à me lâcher au mauvais moment…"
Françoise Clément-Dourville juriste DRH et directrice financière. Son mari est en train de mourir et elle est abandonnée par sa fille, mon père n'a plus sa tête et je vais bientôt me faire jeter comme une vieille serpillière : "face à la mort d'Hubert et à la déchéance de papa…Hubert va bientôt partir
Le désespoir absolu et clinique
Roussel : assez peu concerné par le struggle for life…" c'est ça, je devrais passer l'ENA, devenir haut-fonctionnaire…. en fait, je ne veux pas faire l'ENA mais l'Ecole du Cirque, pourquoi pas, je ne serais pas le premier à tout reprendre à zéro…. Un DVD pas ci, un concert par là…. cette idée de clown me met en joie"
Alighieri : comme Dante. Il observe les cercles de l'enfer, il en est détaché car cette nuit il a cru mourir… il plane, heureux au-delà de toute expression d'être encore vivant.

Une vision infiniment réaliste de ce qu'est une réunion de chefs de service dans n'importe quelle entreprise de moyenne ou grande importance.
Terrorisant parce que réaliste : Big Money is watching you et flux tendu
Une écriture sèche et âpre, bien adaptée à la nature de ce croquis sur le vif.
A l'évidence, Quintreau sait de quoi il parle

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Les éditions

  • Marge brute [Texte imprimé], roman Laurent Quintreau
    de Quintreau, Laurent
    Denoël / ROMANS FRANCAIS
    ISBN : 9782207258224 ; 2,98 € ; 21/08/2006 ; 122 p. ; Broché
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Marge brute épaisse

9 étoiles

Critique de Ciceron (Toulouse, Inscrit le 21 août 2007, 75 ans) - 25 août 2007

Emprunté derechef à la Médiathèque, orienté par Attentif dans sa critique d’American Psycho. De l’intérêt et attrait de notre communauté.

Marge brute brute : surnom donné dans les années 80 à Marcel Bleuschtein-Blanchet fondateur de Publicis. C’est effectivement dans la publicité et nul autre secteur que cette formule cristallise et crispe toutes les attentions.

Temps réel. C’est le récit d'une réunion de comité stratégique dans une multinationale de com corporate qui dure 2 heures, plus de temps qu’il ne faut pour lire le livre. Le récit, très fluide et agréable à lire est continu, aucun alinéa, une facture qui me rappelle un autre écrivain, Martin Suter, peut-être.

Obsession ravageuse du profit, actionnaires montrés du doigt, est-ce un missile anti-libéral ? L’oppression, la violence et le stress qui se dégagent de cette réunion sont plus violents que dans n’importe quel thriller (but “Les Oiseaux“).

Dévorant pour ne pas être dévoré, Rorty, le boss, charcute, terrorise, insulte, humilie et menace, odieux à souhait. Mais, comme chacun sait, la carrure du méchant crée souvent toute la puissance d'un roman, surtout dessiné (Olric dans Blake & Mortimer) ou d'un film (Skar dans Le Roi Lion).

Ce livre, plutôt un coup de sabre, ressemble à une substance illicite. Injection et trip rapide.

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