Nous ne sommes pas des fonctions!

Un étudiant, Alexandre, mène une grève de la faim devant la Sorbonne en mars 2006. Répression, protestation, manifestation anti-CPE Nous avons tous en tête les sempiternelles images de défilé, de slogan, et j’en passe.
Avec ce texte, rien de tout cela, c’est un témoignage, un cri, mais sans agression, avec toute la douceur et la lucidité d’un jeune homme qui par un acte individuel redonne tout son sens à l’ amitié .

Alexandre d’une écriture simple, descriptive et sans volonté de polémique fait un état des lieux de notre société, de la vie en société. Son geste, d’abord politique prend vite l’aspect d’un voyage à travers l’amitié, la rencontre, l’échange spontané et fraternel.

Comment aujourd’hui la peur, le jugement, les sectarismes mettent à mal le tissu social déshumanisé, fragmenté, tous contre tous. Toutes ces divisions Alexandre nous les fait toucher à vif, sans protection, dans le feu de l’action, au plus près de l’autre dans la rue, avec comme seul vêtement, l’amitié.
Émouvante évocation d’une fraternisation entre les racailles et les étudiants que l’on se plait toujours à séparer et opposer.
Comme si des individus en souffrance ne pouvaient partager la même soif de reconnaissance, de soif de contact autre que la violence et l’invective. « On ne verra jamais dans les médias ces images d’un jeune sorbonnard fraternisant avec des cailleras. Elles ne font pas partie des gammes d’images prévues et vendables. »


Douceur d’une amitié si nécessaire en ces temps ou la bienveillance et la civilité ne sont plus de mise.

Voilà un texte qui donne goût au contact, qui donne la température d’une jeunesse qui a soif de dialogue, un Socrate des temps modernes interrogeant ses concitoyens, pour désamorcer la bombe que nous portons tous, ce mal à se dire, à échanger qui nous empoisonne comme un venin.

La peur du contact, la peur de la rencontre pourtant si vitale.
Sortir des fonctions, des catégories qui nous sont imposées à tous, pour mieux nous diviser, nous couper les uns des autres.
En réinvestissant la rue, Alexandre pose un acte : celui de ramener le dialogue là où il n’y a plus que barrière et empêchement, peur et défiance. Entamer ce dialogue, c’est une façon de reconquérir cette humanité dont nous avons perdu la saveur. C’est reconquérir notre dimension humaine, une notion de la gratuité, de la parole et de l’écoute offerte sans autre motif que le plaisir et l’échange. La découverte, et la redécouverte d’un quotidien toujours neuf pour celui qui sait voir et écouter. Écoutons nous, avant qu’il ne soit trop tard !

Ayons le courage d’affronter la multitude et de parler à chacun, sans se dérober, alerte au mouvement du monde. Aller au monde les bras ouverts, sans pouvoir s’échapper, pour la simple raison que nous ne pouvons fuir indéfiniment notre cri, « j’ai vu et senti les prémices de guerres civiles qui scandent le mouvement de révolte qui agite ce pays depuis quelques semaines. L’effort pour se maintenir ensemble par la parole ou par les cris doit être fait par tous, et en tant qu’infime partie du tout, je suis prêt à le faire .»
« La méfiance et le cynisme n’ont aucune légitimité naturelle. Ils m’apparaissent comme des stratégies de défense, une façon de se protéger d’une culpabilité collective »

En définitive, Alexandre, à sa façon, nous encourage à nous rappeler que nous sommes tous dans une interdépendance. Son cri et sa parole ne sont que l’expression d’un besoin collectif, un besoin d’échange qui, s’il n’est pas pris en considération peut se convertir en violence. Il y a urgence, il est temps de se révolter autrement.

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  L'amitié au pied du mur [Texte imprimé] Alexandre

  de Alexandre,
  le Grand souffle éd. / Cri urgent
  ISBN : 9782916492056 ; 5,00 € ; 30/05/2006 ; 37 p. ; Broché

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