Paul Morand un évadé permanent de Gabriel Jardin

Paul Morand un évadé permanent de Gabriel Jardin

Catégorie(s) : Littérature => Biographies, chroniques et correspondances

Critiqué par Jlc, le 11 juillet 2006 (Inscrit le 6 décembre 2004, 80 ans)
La note : 4 étoiles
Visites : 3 377  (depuis Novembre 2007)

L'inaptitude au bonheur

Gabriel Jardin est le fils de Jean Jardin, brillant haut fonctionnaire de Vichy, ami de Paul Morand depuis 1935, le frère de Pascal Jardin, auteur de quelques très jolis livres –« La guerre à neuf ans » ou « Le nain jaune »-, l’oncle d’Alexandre et le filleul de Morand.

L’auteur a vécu environ un an près de Paul Morand qui était alors âgé de 87 ans et venait de perdre sa femme qui eut une influence considérable sur l’homme, si ce n’est sur l’écrivain. On pouvait espérer un témoignage de première main sur ce personnage contestable et immense écrivain. Il n’en est malheureusement pas tout à fait ainsi. Le récit de Jardin n’explique pas Morand, personnage certes complexe s’il en est. Les anecdotes qu’il relate sont sympathiques mais n’apportent pas grand chose à ce qu’on savait déjà : Morand mondain et antisémite, sportif et impatient, brillant et anti-gaulliste, hôte à sa table des allemands pendant l’occupation et serviteur de Vichy.

Sur ce dernier point, Jardin écrit que Morand aurait pu choisir de Gaulle en juin 40 ce qui parait habile pour la réhabilitation de son parrain mais surprenant voire improbable quand on connaît la suite de l’histoire. Paul Morand, qui parle dans son journal de de Gaulle « arrivant à Londres entouré de juifs et de communistes », c’est à dire tout ce que lui déteste, a fait sciemment le choix de Laval auquel il restera toujours fidèle, que ce soit par l’amitié indéfectible pour sa fille ou par son ingratitude envers Jean Jardin qui aurait tout fait pour que Paul Morand soit nommé ambassadeur en Suisse en 1944 quand le bénéficiaire en attribuait la décision à Laval et à lui seul.

En revanche, Gabriel Jardin réussit un beau portrait d’Hélène Morand, femme d’une intelligence et d’une culture exceptionnelles mais souvent d’une dureté incroyable. Et c’est elle qui, dans une lettre, donne peut-être les meilleures clés pour comprendre ce qu’était Paul Morand, « son inaptitude au bonheur, trahie par son perpétuel désir d’être ailleurs, son impatience, sa froideur, sa distance, enfin « Paul n’est pas si facile à connaître. Il y a beaucoup en lui de l’enfant ». Enfance dont Morand dit dans son journal qu’elle fut « si douce et si abritée ».

Je ne sais pas pourquoi mais ce livre me parait être une commande d’éditeur. Il ne révèle pas grand chose sur l’homme, encore moins sur l’écrivain, il raconte plus qu’il n’explique. Plus qu’un portrait c’est une esquisse.

Morand insaisissable que Jardin ne parvient à « rendre » que quand il raconte un voyage sur les bords de Loire où « Paul sortit et demeura un long moment silencieux, assis sur le muret qui surplombait le fleuve… « Il est inutile d’aller plus loin,…nous ne verrons rien de plus beau… « L’homme pressé » me donnait une leçon de contemplation. »

Cet inapte au bonheur, qui se disait globe trotter de la littérature, retrouvez le plutôt dans ses nouvelles, superbes moments de sensations, de pensées et d’écriture ou dans le petit livre de Marcel Schneider, « Mille roses trémières : l’amitié de Paul Morand » dont Sahkti a fait récemment une excellente relation.

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