Ecrits fantômes de David Mitchell

Ecrits fantômes de David Mitchell
( Ghostwritten)

Catégorie(s) : Littérature => Anglophone

Critiqué par Sahkti, le 28 novembre 2005 (Genève, Inscrite le 17 avril 2004, 50 ans)
La note : 7 étoiles
Moyenne des notes : 7 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (41 406ème position).
Visites : 4 066  (depuis Novembre 2007)

Nouvelles en écho

Des nouvelles, un fil conducteur qui se promène tout au long du recueil et puis, surtout, un étrange écho qui se répercute d'une nouvelle à l'autre et qui est un fait davantage qu'un écho. Plutôt une réponse, ou alors une interrogation, des personnages qui évoluent au fil des textes, se croisant et se décroisant, ignorant qu'ils donnent de la voix dans d'autres parties du récit. Impression étrange, oui, de retrouver au fil des pages des noms connus, des situations donnés, des lieux, des phrases, sans pour autant qu'il y ait un récit continu sur ces 500 pages dont je dois tout de même signaler l'inégalité. Certaines nouvelles m'ont ennuyée, en particulier celles qui se déroulent en Asie. D'autres m'ont au contraire enchantée pour l'ambiance qu'elles restituent, pour ces états d'âme qu'elles dissèquent sans compromis (Islington et Clear island, deux lieux évocateurs et si humains).
Des destinées se mêlent et se démêlent sous l'oeil attentif du lecteur qui se fait promener aux quatre coins du globe par David Mitchell. Au début, je suis restée sur ma faim, la première nouvelle ne m'a guère attirée, j'ai failli refermer et puis non, poursuite de la lecture. Promenade dans ces chapitres liés les uns aux autres parfois par de petits détails. Personnages et événements bien distincts mais David Mitchell les réunit et c'est un des tours de force de cet ouvrage, démontrer comme tout tient à peu de choses et comme ces choses peuvent être proches les unes des autres. Impossible de résumer l'histoire dans déflorer une bonne partie de cet habile tour de passe-passe d'écriture. David Mitchell parle des hommes, de l'Homme, de l'humanité, de la terre, de l'amour, de la folie aussi, la nôtre. En refermant l'ouvrage, c'est comme un tourbillon, tout se rejoint, tout s'imbrique, on trouverait presque ça logique alors qu'en fait il n'en est rien. Mais c'est un beau moyen de nous apprendre à ouvrir les yeux et regarder d'un peu plus près ces infinis détails que nous ne voyons plus.

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Les éditions

  • Écrits fantômes [Texte imprimé], roman David Mitchell trad. de l'anglais par Manuel Berri
    de Mitchell, David Berri, Manuel (Traducteur)
    Seuil / Points (Paris)
    ISBN : 9782020798419 ; 2,98 € ; 11/03/2005 ; 513 p. ; Poche
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D'une voix à l'autre, l'écho.

7 étoiles

Critique de SpaceCadet (Ici ou Là, Inscrit(e) le 16 novembre 2008, - ans) - 18 septembre 2015

Okinawa, Tokyo, Hong Kong, Mont Emei (Chine), Mongolie, Saint-Pétersbourg, Londres, Clear Island (Irlande) et New York; autant de lieux traversés au long des neuf récits composant ce 'roman', dont la publication originale date de 1999.

Tout commence par le Japon et par un récit évoquant un fait réel (Tokyo, 1995), une attaque au gaz toxique exécutée ici par un jeune homme appelé Quasar, membre d'une secte religieuse. En fuite après avoir accompli sa mission, Quasar passe un appel et suivant les instructions données par les maîtres de la secte, passe un message codé ayant pour but de demander de l'aide. Cet appel est reçu (dans le second récit) par Satoru, un jeune musicien gagnant sa vie comme commis dans un magasin de disques à Tokyo. Satoru, qui se complait dans une existence monotone, est sur le point de tomber amoureux d'une hongkongaise qu'il ira retrouver sur son île. Puis, le hasard voudra que ce jeune couple croise Neal, narrateur du troisième récit, un avocat impliqué dans une histoire de blanchiment d'argent dont les retombées se manifesteront quelque part parmi les récits qui suivront. Et ainsi de suite.

Liées par un fil plus ou moins direct, ces neuf histoires évoluent à la fois en parallèle et en continuité les unes des autres et, traversant plusieurs contextes puis confrontant le lecteur à diverses réalités, elles explorent au passage quelques grandes questions existentielles.

Dans quelle mesure les gestes que nous posons ont-ils un impact sur la destinée d'autrui voire sur le sort du monde? Notre univers n'est-il pas constitué d'une multitude de fils composant une même pièce d'étoffe? Tout n'est-il pas lié? Sommes-nous aussi libres que nous l'imaginons? Et si entre le hasard et le libre arbitre, nos destinées se dessinent tout en croisant de près ou de loin, celles d'autres êtres partageant un même espace temporel, une même réalité, à quelles lois cet univers dans lequel nous évoluons obéit-il? Qu'est-ce que la réalité?

Vaste menu s'il en est.

Trentenaire à l'aube du millénaire, on peut imaginer que Mitchell s'est lui-même vu confronté à ces questions au moment de concevoir ce qui constituera sa toute première publication. Un roman? Un recueil de nouvelles? Un outil de réflexion? Parlons plutôt d'un objet littéraire hybride, mais aussi d'un ouvrage au contenu et à la conception bien en phase avec son époque. Car ces récits sentent bon les années 1990.

Au cours de cette grande balade, outre un pan d'histoire de Chine, on découvrira quelques aspects de la vie en version Mongole, puis en version Russe sous le régime de monsieur Eltsine, la guerre du Golfe sera évoquée, la menace du nucléaire itou. Au gré d'intrigues plus ou moins originales, il sera question d'amour, de corruption, de banditisme, de morale, de sexe, de recherche scientifique, de transmigration et de bien d'autres sujets. A la fin, la boucle est bouclée mais ce petit tour du monde, bien qu'habilement constitué, ne parvient pas souvent à dépasser la surface des choses quand il ne verse pas dans le cliché et autres lieux communs. Même constat chez les personnages peuplant ces récits; tous sont suffisamment crédibles certes, mais peu approfondis.

Neuf narrateurs donnent vie à ces histoires, neufs voix suffisamment distinctes, neufs perspectives plutôt bien tracées; en soi, cela constitue déjà un mini-exploit. Sans être particulièrement stylisée, la prose est soignée, taillée en sorte de bien s'accorder au cadre et à l'époque des récits. L'écriture, vive dans l'action, parsemée de quelques tournures originales, devient elliptique et chargée d'aphorismes lorsque Mitchell se prend à vouloir développer ses thèmes, une pratique qui tend à ralentir le rythme des récits.

Malgré quelques faiblesses, l'ensemble témoigne d'un travail soigné et il va sans dire que ce premier roman, notamment en raison d'une conception innovante, constitue un début fort prometteur.

N.B. Lu en version originale.

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