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Forums  :  Musique & Cinéma  :  3:10 to Yuma

Pendragon
avatar 25/03/2009 @ 14:14:18
Et bien voilà un western classique, certes, mais d’un nietzschéisme assez impressionnant ! On y retrouve bien entendu la notion de dépassement de soi, de recherche du grand midi et du surhomme, mais aussi et surtout une philosophie de « par delà le Bien et le Mal » !

Le pitch : Dan Evans (Christian Bale) est un fermier en butte à des « vilains » qui veulent l’expulser de ses terres s’il ne paie pas son dû. Ben Wade (Russell Crowe) est un bandit de grand chemin qui allie charisme, calme de glace, une forme d’honneur indéniable (j’ai bien dit une « forme »), intelligence et… une série impressionnante de vols avec meurtres associés. Le hasard (mais il n’y a pas de hasard, tout le monde sait ça) les fait se rencontrer, deux fois, et lors de l’arrestation de Ben Wade, Dan se propose de l’escorter avec les autres jusqu’au train qui doit le conduire en prison, le train de 3h10 pour Yuma, d’où le titre. Comme de juste, entre le « bon » et le « mauvais » se tisse un étrange lien fait de haine, de respect, de conflit, de justice, …

Bon, disons-le d’emblée, le « mauvais » est « mauvais » car il ne fait pas grand cas d’une vie humaine, oui mais, il en est ainsi de certains « bons » aussi. Le « bon » est « bon » car il garde sa ligne directrice jusqu’au bout… oui mais… On ne peut s’empêcher de vraiment apprécier Ben Wade, probablement, et c’est bien filmé par James Mangold (à qui on doit l’exceptionnel Walk the Line, si vous ne l’avez pas vu, courez vers la dvd-thèque la plus proche), parce que l’on ne voit aucune scène de violence réelle où Ben aurait pris part, on en parle, on le voit tirer une balle ou deux, on le voit faire un usage peu approprié d’une fourchette, mais finalement, ce que l’on montre est acceptable, excusable (presque) et les 22 attaques dont on l’accuse, finalement, on ne les voit pas, les meurtres, on ne les voit pas… ce qui fait que l’on n’a aucun problème moral à apprécier ce « vilain » Ben Wade, il est… sympathique ! Même s’il avoue lui-même, à un moment donné du film, qu’il n’est vraiment que mauvais (« as rotten as hell »), il y a un petit quelque chose qui le rend au-delà de tout jugement moral !

Dan Evans, lui, est « plus simple » à analyser, il a besoin d’argent pour ses terres et l’escorte est un moyen d’y arriver… oui, mais l’argent n’est pas tout car quand l’opportunité se présente de gagner plus, plus facilement, il ne la prend pas… Y aurait-il une forme de fierté ? Une forme de droiture intrinsèque ? Une forme de « rachat » ? Je ne peux évidemment pas spoiler le film et ne vous en dirai pas plus… mais sachez que le Ben Wade, lui, a très bien compris comment fonctionnait le Dan Evans…

Il va sans dire que le jeu de ces deux acteurs est exceptionnel et qu’ils incarnent leur personnage jusque dans les moindres détails… mais ça, c’est une évidence, on connaît leurs capacités.

A noter aussi la présence du second de Wade, Charlie Prince (Ben Foster) qui joue son rôle avec perfection, avec juste cette touche d’ambiguïté suffisante qui permet l’ouverture vers de nouvelles interprétations du film et, à tout le moins, de son geste final…

Les paysages ne sont pas, à mon goût, assez mis en valeur, mais sans doute est-ce parce que je suis trop amoureux des grands espaces américains, que j’en suis abominablement friand et que je n’en ai jamais assez, mais cela dit, il n’y en a pas beaucoup quand même…

Quant à la psychologie, ah, vaste débat que cette fin de film… dont je ne peux évidemment pas vous parler, mais qui, selon la façon dont on l’interprète est dans la continuité du film ou en rupture avec celui-ci, rupture complète de la psychologie de Ben ou évolution de celle-ci vers un « au-delà », vers un niveau supérieur de conscientisation ou vers une forme de rédemption sacrificielle ? A moins que ce ne soit qu’une forme respectable d’équité entre deux hommes d’honneur, malgré tout ? Ou, tout simplement, le vieux mythe du cow-boy qui n’est jamais autant lui-même que quand il est solitaire, fermé, noir… et torturé !

Bref, vous l’aurez compris, c’est un très bon film, qui ne s’éloigne pas trop des classiques du genre, qui n’a pas de « waow effect » immédiat (comme Jesse James par exemple) mais qui est malgré tout une excellente réflexion sur un système de valeur et son interprétation.

P.

Antinea
avatar 25/03/2009 @ 14:21:47
Très bonne analyse de ce fim, Pendragon.
En effet, c'est un classique dans son genre mais cette histoire de rapport psychologique entre 2 hommes que tout sépare est vraiment intéressante. Bon choix.

Débézed

avatar 25/03/2009 @ 16:00:07
Un très vieux souvenir quand je ne ratais jamais un western qui sortait. Un excellent face à face, comme dans un huis clos en plein air, entre deux personnages à la forte personnalité et comme dans tous les westerns un rapport à la morale. Et Pendragon a tout dit sur cet excellent western.

Saint-Germain-des-Prés

avatar 25/03/2009 @ 21:12:44
Je n'ai pas vu le film, mais après l'excellente critique de Pendragon (toute partialité due à une certaine proximité mise à part ;-)))), j'en ai bien envie!

Débézed

avatar 25/03/2009 @ 21:35:10
Je viens de me rendre compte que je ne suis pas sûr de parler de la même version que Pendragon !

Virgile

avatar 25/03/2009 @ 22:48:46
En effet et en toute subjectivité je pense que la première version dont parle dbz était meilleure ;o)

C'est souvent le cas d'ailleurs d'après ma subjectivité. La première adapation d'Oliver Twist par rapport a la dernière, même chose pour The wicker man, mais bon ces remake ont au moins le mérite de faire découvrir ces histoires à ceux qui ont loupé les originaux malgré qu'ils soient fréquemment décevant... :op

Donatien
avatar 27/03/2009 @ 10:07:54
Merci Pendragon, tes critiques de films sont vraiment du travail ou de "pro" et/ou de passionné.
Je vais louer ce Dvd, parce que les westerns (surtout les bons) deviennent rares alors qu'il fut un temps où ils foisonnaient.
Je crois que c'est le western"spaghetti" qui a tarit la source, même si certains de ces films étaient formidables.
J'attends ta prochaine critique.
A+

Débézed

avatar 27/03/2009 @ 12:06:16
Les westerns aux nouilles italiennes m'ont définitivement détourné de ce genre filmographique.

Pendragon
avatar 27/03/2009 @ 15:00:53
Merci Donatien ! (et les autres)

Concernant les westerns spaguetti, personnellement, je les considère comme un genre à part, non pas comme un "sous genre" des westerns, mais bien comme un genre "à part"... et je dois avouer que j'adore, mais vraiment au sens premier du terme, la trilogie de Sergio Leone (Pour une Poignée de $, Pour quelques $ de plus et Le Bon, la Brute et le Truand), par contre, je n’aime pas trop les Django et je déteste (comme de juste) les Bud Spencer et Terence Hill… Il est par ailleurs intéressant de noter que Mon nom est personne est la tentative, à mon sens réussie, de rassembler les deux genres, puisqu’on y retrouve Terence Hill mais aussi Henry Fonda (ah oui, notons que même s’il est non crédité, Sergio Leone y a mis sa patte !!).

Cela étant dit, je pense aussi que les « anciens » westerns avec John Wayne sont également un autre genre… vous voyez, le style où le cow-boy est toujours rasé de près, avec une chemise impeccablement repassée… et où l’indien est toujours le mauvais… personnellement, je n’y accroche guère…

Et donc, finalement, un western est un genre qu’il faut prendre au sens très large car il faut avouer qu’il y a un monde de différence entre The Assassination of Jesse James et Dances with Wolves ou entre Little Big Man et Butch Cassidy and the Sundance Kid… sans parler de Brokeback Moutain, catalogué comme western…

Bref, personnellement, je préfère cataloguer les films en genres « majeurs » (Drame, Comédie, …) plutôt qu’en genres « mineurs » (Western, Sci-Fi, Policier, …), c’est plus « juste », si je puis me permettre. Cela permet de supprimer plus facilement l’un ou l’autre à priori. Mais cela reste une approche personnelle...

P.

Stavroguine 27/03/2009 @ 16:41:42
Merci Donatien ! (et les autres)

Concernant les westerns spaguetti, personnellement, je les considère comme un genre à part, non pas comme un "sous genre" des westerns, mais bien comme un genre "à part"... et je dois avouer que j'adore, mais vraiment au sens premier du terme, la trilogie de Sergio Leone (Pour une Poignée de $, Pour quelques $ de plus et Le Bon, la Brute et le Truand), par contre, je n’aime pas trop les Django et je déteste (comme de juste) les Bud Spencer et Terence Hill… Il est par ailleurs intéressant de noter que Mon nom est personne est la tentative, à mon sens réussie, de rassembler les deux genres, puisqu’on y retrouve Terence Hill mais aussi Henry Fonda (ah oui, notons que même s’il est non crédité, Sergio Leone y a mis sa patte !!).

Cela étant dit, je pense aussi que les « anciens » westerns avec John Wayne sont également un autre genre… vous voyez, le style où le cow-boy est toujours rasé de près, avec une chemise impeccablement repassée… et où l’indien est toujours le mauvais… personnellement, je n’y accroche guère…

Et donc, finalement, un western est un genre qu’il faut prendre au sens très large car il faut avouer qu’il y a un monde de différence entre The Assassination of Jesse James et Dances with Wolves ou entre Little Big Man et Butch Cassidy and the Sundance Kid… sans parler de Brokeback Moutain, catalogué comme western…

Bref, personnellement, je préfère cataloguer les films en genres « majeurs » (Drame, Comédie, …) plutôt qu’en genres « mineurs » (Western, Sci-Fi, Policier, …), c’est plus « juste », si je puis me permettre. Cela permet de supprimer plus facilement l’un ou l’autre à priori. Mais cela reste une approche personnelle...

P.


Tout à fait d'accord avec ça. Les Sergio Leone sont des westerns spaghetti mais sont infiniment meilleurs que 95% des westerns non-italiens. Et personnellement, Le Bon, la Brute et le Truand est clairement dans le top 3 de mes films préférés.
Et pareil en ce qui concerne John Wayne, je trouve ça juste imblairable et je trouve d'ailleurs que le genre spaghetti (avant qu'il tourne à la comédie) a fait beaucoup de bien aux westerns en général qui ont abandonné les cowboys bien proprets texans républicains pour laisser la place à de sales types anti-héros suants, violents et crasseux qui correspondent beaucoup mieux au genre.
Un peu comme les films de Samouraïs: avant guerre, ce sont des films de propagande avec des samouraïs martiaux appliquant le Bushido à la lettre, propres et ultra-nationalistes et puis après, on a la révolution Kurosawa (avec ses 7 Samouraïs - mon film préféré) où les héros sont des ronins, pauvres, buveurs même s'ils restent encore héroïques chez Kurosawa alors que Gosha (Goyokin - avec Tatsuya Nakadai) et Okamoto (Le Sabre du Mal - avec Nakadai et toshiro Mifune) achèveront d'en faire des nihilistes violents et paumés face une société qui change (avec l'ouverture à l'Occident du Japon et l'interdiction du port du katana qui signifie la fin des castes).
Pour les films plus récents, dans la même atmosphère, en ce qui concerne les samouraïs, il FAUT regarder le diptyque "La Servante et le Samouraï" et "Le Samouraï du Crépuscule". Et niveau western, il FAUT aussi voir la série Deadwood qui est tout simplement excellente !

Vda
avatar 27/03/2009 @ 22:08:24
Mince, j'ai cru d'après le titre du sujet que vous parliez de la nouvelle d'Elmore Leonard à l'origine du film, voire du recueil éponyme paru chez Rivages.

Un excellent recueil au demeurant.

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