On était en Juin 1955. L’époque de la vie à Rome. Il avait encore la mélodie de « Norma » en tête, et Pelagia, à son bras. Elle était belle, Pelagia. Les notes de Casta Diva lui volaient encore autour comme autant de papillons vers la lumière. C’était son cadeau d’amour : il l’avait emmenée au Teatro dell’Opera * où, du fond de son siège dans la loge qu’ils occupaient seuls, il l’avait observée à s’en sécher les yeux. Il l’avait vue frissonnante, émue et vivante. Elle avait aimé Norma, tout de suite, à jamais. Il l’avait senti. Comme elle avait aimé…
Elle avait voulu marcher, après. Peut-être pour relire les dernières lignes de cette soirée, y ajouter un épilogue. Et là, à l’instant, il ne sentait que la chaleur de son bras autour du sien. En silence, ils avançaient. Ce n’était pas la bonne direction, mais il la suivait, s’accordait à son pas, sans réfléchir, au gré de ses marées.
Rue silencieuse, pas silencieux. Baiser silencieux de Pelagia : un merci comme on en voudrait tous les jours. Toutes les heures, toutes les minutes.
- Andrea, regarde…
Il sortit de ses boucles brunes pour suivre des yeux la direction qu’elle lui montrait. De l’autre côté de la rue, un homme petit et trapu les observait, l’œil rieur. Il tenait sous le bras un tableau dont Andrea ne parvenait pas à voir le sujet. L’homme portait des petites lunettes rondes et était vêtu étrangement. Un béret élimé, un costume désassorti et couvrant une sorte de pull marin. Autour du cou, il portait une chaînette au bout de laquelle pendait une vieille montre en argent.
L’homme les quitta du regard comme à regret et prit l’heure en main. Mine embarrassée. Sourire de guingois. Hochement de tête dans leur direction. Et il partit.
En retard, peut-être ?
Pelagia semblait déroutée par cette apparition mais lui s’en fichait un peu. Beaucoup, même. Tout ce qu’il voulait, lui, c’était retourner parmi les boucles, contre la peau lisse sous l’oreille gauche, où subsistait son philtre d’amour. Il se disait qu’il aurait aimé en boire toute la nuit. Comme toutes les nuits depuis des mois.
***
Une table en marbre, sous laquelle pieds en fer forgé et pieds nus se chauffaient au soleil. C’était le moment où ils redécouvraient le jour, assis sur leur terrasse bordée de lierre. Andrea aimait ce moment. Celui où l’on n’a pas encore vraiment quitté la nuit, même s’il fait lumineux, déjà. Celui des mains qui se frôlent, complices.
Il quitta leur appartement pour ramener du pain et quelques fruits. Il faisait doux et coloré. Entre les allées du marché, il avait toujours les idées pleines de Pelagia. Les odeurs ne couvraient pas encore la sienne.
C’est sans doute pour cette raison que son attention ne fut pas tout de suite attirée par le béret élimé et le vieux pull marin... Ces derniers ne l’avaient pas encore vu non plus, d’ailleurs. Trop occupés à tenter de maintenir sous le bras un tableau dont on ne parvenait toujours pas à distinguer le sujet. Quand Andrea les aperçut, il avait une orange sous le nez et elle y demeura un peu trop longtemps au goût du vendeur (inquiet que son client ne décidât de la remettre dans l’étal). Il changea un peu de position pour être hors de vue de ce personnage qui, depuis, n’avait plus du tout occupé ses pensées. L’homme marchait vite, bousculant à qui mieux mieux. Et Andrea le laissa sortir de son champ de vision. De son esprit, aussi.
Il repartit avec deux kilos d’oranges, un pain encore chaud et puis quelques calas blancs, les fleurs préférées de Pelagia. Ca lui rappellerait Norma et la Callas, aussi. Et il aurait peut-être droit à quelques mercis de plus…
Il pressa le pas.
Elle avait voulu marcher, après. Peut-être pour relire les dernières lignes de cette soirée, y ajouter un épilogue. Et là, à l’instant, il ne sentait que la chaleur de son bras autour du sien. En silence, ils avançaient. Ce n’était pas la bonne direction, mais il la suivait, s’accordait à son pas, sans réfléchir, au gré de ses marées.
Rue silencieuse, pas silencieux. Baiser silencieux de Pelagia : un merci comme on en voudrait tous les jours. Toutes les heures, toutes les minutes.
- Andrea, regarde…
Il sortit de ses boucles brunes pour suivre des yeux la direction qu’elle lui montrait. De l’autre côté de la rue, un homme petit et trapu les observait, l’œil rieur. Il tenait sous le bras un tableau dont Andrea ne parvenait pas à voir le sujet. L’homme portait des petites lunettes rondes et était vêtu étrangement. Un béret élimé, un costume désassorti et couvrant une sorte de pull marin. Autour du cou, il portait une chaînette au bout de laquelle pendait une vieille montre en argent.
L’homme les quitta du regard comme à regret et prit l’heure en main. Mine embarrassée. Sourire de guingois. Hochement de tête dans leur direction. Et il partit.
En retard, peut-être ?
Pelagia semblait déroutée par cette apparition mais lui s’en fichait un peu. Beaucoup, même. Tout ce qu’il voulait, lui, c’était retourner parmi les boucles, contre la peau lisse sous l’oreille gauche, où subsistait son philtre d’amour. Il se disait qu’il aurait aimé en boire toute la nuit. Comme toutes les nuits depuis des mois.
***
Une table en marbre, sous laquelle pieds en fer forgé et pieds nus se chauffaient au soleil. C’était le moment où ils redécouvraient le jour, assis sur leur terrasse bordée de lierre. Andrea aimait ce moment. Celui où l’on n’a pas encore vraiment quitté la nuit, même s’il fait lumineux, déjà. Celui des mains qui se frôlent, complices.
Il quitta leur appartement pour ramener du pain et quelques fruits. Il faisait doux et coloré. Entre les allées du marché, il avait toujours les idées pleines de Pelagia. Les odeurs ne couvraient pas encore la sienne.
C’est sans doute pour cette raison que son attention ne fut pas tout de suite attirée par le béret élimé et le vieux pull marin... Ces derniers ne l’avaient pas encore vu non plus, d’ailleurs. Trop occupés à tenter de maintenir sous le bras un tableau dont on ne parvenait toujours pas à distinguer le sujet. Quand Andrea les aperçut, il avait une orange sous le nez et elle y demeura un peu trop longtemps au goût du vendeur (inquiet que son client ne décidât de la remettre dans l’étal). Il changea un peu de position pour être hors de vue de ce personnage qui, depuis, n’avait plus du tout occupé ses pensées. L’homme marchait vite, bousculant à qui mieux mieux. Et Andrea le laissa sortir de son champ de vision. De son esprit, aussi.
Il repartit avec deux kilos d’oranges, un pain encore chaud et puis quelques calas blancs, les fleurs préférées de Pelagia. Ca lui rappellerait Norma et la Callas, aussi. Et il aurait peut-être droit à quelques mercis de plus…
Il pressa le pas.
(*) J’ai pris quelques libertés : « Norma » ne s’est pas jouée au Teatro dell‘Opera en Juin 1955 mais à l’Auditorium di Roma della Radiotelevisione Italiana. Parcontre, ce fut le cas en 1958, mais Maria Callas interrompit la représentation à la fin du premier acte.
Que c'est beau, Bluewitch ! Et quelle imagination !
Un récit, concis, pur, alerte, nuancé, vraiment tu commences fort !
Avec déjà son lot de mystère, ce petit bonhomme énigmatique avec son tableau sous le bras .. ..
Et puis des beaux personnages qui évoluent à Rome et qui écoutent la Callas !
Tu as placé la barre très haute ! Ha, ha, les suivants n'ont qu'à bien se tenir ! .. ;-) !
Un récit, concis, pur, alerte, nuancé, vraiment tu commences fort !
Avec déjà son lot de mystère, ce petit bonhomme énigmatique avec son tableau sous le bras .. ..
Et puis des beaux personnages qui évoluent à Rome et qui écoutent la Callas !
Tu as placé la barre très haute ! Ha, ha, les suivants n'ont qu'à bien se tenir ! .. ;-) !
Belle écriture vraiment! Beau début de roman. L'ambiance et le décor sont déjà très bien plantés. Je regrette juste que les 2 amoureux ne soient pas plus décrits physiquement. Mais la suite le dira. De forts jolies expressions : "Les notes de Casta Diva lui volaient encore autour comme autant de papillons vers la lumière", ou encore "il l’avait observée à s’en sécher les yeux". Sobre mais fort. Bravo.
C’est très difficile de livrer ses impressions au premier épisode. Les personnages sont esquissés, à peine , c’est le jeu. Le ton est donné, mais tient à un fil. L’ambiance en suspend, attend Charles. Impatiente, elle trépigne et se demande : « Que vais-je devenir ? »
Vraiment c’est difficile de dire.
Sauf : quelle douce mélancolie Blue, vraiment, c’est sur un bien joli rythme que débute l’ouvrage, et à Rome avec ça…
Vraiment c’est difficile de dire.
Sauf : quelle douce mélancolie Blue, vraiment, c’est sur un bien joli rythme que débute l’ouvrage, et à Rome avec ça…
Ah la la, déjà le cadre me plait, l'Italie...
Ca donne déjà le ton, c'est très bien écrit Blue.
Bon alors, deux amoureux, un type bizarre, qu'est-ce qu'il trimballe, Mona Lisa ?
Ca m'étonnerait bien ;0)
C'est un bon début, je n'aimerais pas me retrouver en seconde position, ça c'est sûr !
Bravo Blue, pas facile d'inventer un début, j'aurais pas su.
Ca donne déjà le ton, c'est très bien écrit Blue.
Bon alors, deux amoureux, un type bizarre, qu'est-ce qu'il trimballe, Mona Lisa ?
Ca m'étonnerait bien ;0)
C'est un bon début, je n'aimerais pas me retrouver en seconde position, ça c'est sûr !
Bravo Blue, pas facile d'inventer un début, j'aurais pas su.
J'ai beaucoup apprécié ce coup d'envoi qui nous offre un joli décor, une jolie époque et des personnages plein de possibilités.
Quant au style, j'ai dégusté "il l’avait observée à s’en sécher les yeux." puis "son bras autour du sien."
Par contre il y a un passage où j'ai eu l'impression que tu ramais un peu, au marché, quand il retrouve le mystérieux (d'ailleurs pourquoi au juste?) bonhomme et que tu te retrouves avec : "Ces derniers ne l’avaient pas encore vu non plus," et que "ces derniers", ce sont des vêtements. :-)) C'est plutôt rigolo.
Mais le mystère n'interdit pas le rire, n'est-ce pas?
Je trouve ce MM3 fort bien parti. Merci Blue
Quant au style, j'ai dégusté "il l’avait observée à s’en sécher les yeux." puis "son bras autour du sien."
Par contre il y a un passage où j'ai eu l'impression que tu ramais un peu, au marché, quand il retrouve le mystérieux (d'ailleurs pourquoi au juste?) bonhomme et que tu te retrouves avec : "Ces derniers ne l’avaient pas encore vu non plus," et que "ces derniers", ce sont des vêtements. :-)) C'est plutôt rigolo.
Mais le mystère n'interdit pas le rire, n'est-ce pas?
Je trouve ce MM3 fort bien parti. Merci Blue
Et voilà ce qui s’appelle planter le décor, Blue !
Une écriture très soignée pour ce premier épisode. Une ambiance poétique, « Rome antique » où souffle un vent de mystère. Des images tu nous en mets plein les yeux (presque trop ... parce que j’ai l’impression qu’à cette cadence les images s’annulent).
Merci Blue, je le sens bien, moi, ce nouveau départ ! et toi, Charles ?
Une écriture très soignée pour ce premier épisode. Une ambiance poétique, « Rome antique » où souffle un vent de mystère. Des images tu nous en mets plein les yeux (presque trop ... parce que j’ai l’impression qu’à cette cadence les images s’annulent).
Merci Blue, je le sens bien, moi, ce nouveau départ ! et toi, Charles ?
Un tendre merci sur la joue Blue.
Alea jacta est.
Je ne sais pas comment Charles va gérer tout ça mais je suis au bord de la crise de panique... Un lieu, une époque dont je ne sais rien... L'opéra...
Heureusement qu'il me reste les beautés italiennes aux boucles brunes...
Beau début, Bluewitch, je souhaite courage et inspiration aux autres.
Alea jacta est.
Je ne sais pas comment Charles va gérer tout ça mais je suis au bord de la crise de panique... Un lieu, une époque dont je ne sais rien... L'opéra...
Heureusement qu'il me reste les beautés italiennes aux boucles brunes...
Beau début, Bluewitch, je souhaite courage et inspiration aux autres.
Très bien écrit tout ça !!
J'ai découvert après avoir lu le texte, qu'on m'avait inscrit pour le premier tour.
Bon, on sait que ce genre de texte n'est pas forcément mon point fort. Le challenge n'en est que plus excitant au final !
Bon, on sait que ce genre de texte n'est pas forcément mon point fort. Le challenge n'en est que plus excitant au final !
Merci à tous pour ces avis nuancés. J'ai voulu prendre une autre direction que les précédents MM et puis c'est une première, pardonnez donc mes maladresses.
Sib, je n'ai pas bien compris pourquoi il te semblait que j'avais ramé (l'exemple des vêtements: c'était délibéré) mais c'est bon à savoir.
Pour l'opéra, c'était juste le contexte de départ, rien d'autre. Maintenant que j'ai planté quelques piquets, c'est à vous de monter la tente! ;o)
Sib, je n'ai pas bien compris pourquoi il te semblait que j'avais ramé (l'exemple des vêtements: c'était délibéré) mais c'est bon à savoir.
Pour l'opéra, c'était juste le contexte de départ, rien d'autre. Maintenant que j'ai planté quelques piquets, c'est à vous de monter la tente! ;o)
Désolée Blue. J'avais mal compris. Cela m'avait semblé trop bizarre, mais c'est vrai que cela peut être un choix.
Très bon départ, en tout cas. Je maintiens. :-)
Très bon départ, en tout cas. Je maintiens. :-)
Merci Bluewitch. Pas facile j'imagine de lancer un premier épisode. Tu l'as fait de manière originale par rapport aux deux précédents. La suite va beaucoup déterminer l'ambiance globale de la chose. Beaucoup de possibilités, c'est donc à Charles. J'espère qu'il le sait Charles.
Charles are you there?
Alors tu es attirée par Rome et l'Italie Bluewitch? Bon choix sans nul doute. Que les suivants n'oublient pas qu'on a le droit de voyager s'ils ne sont pas totalement inspirés par Rome!
Charles are you there?
Alors tu es attirée par Rome et l'Italie Bluewitch? Bon choix sans nul doute. Que les suivants n'oublient pas qu'on a le droit de voyager s'ils ne sont pas totalement inspirés par Rome!
1 2 3…tzz…tap, tap, tap… crrrtzzzzzzz… 1 2 3…
— Ok Marcel, on peu aller boire l'apéro !… tzzz…clic.
— Ok !
— Ok Marcel, on peu aller boire l'apéro !… tzzz…clic.
— Ok !
— Marcel ?
— Mhmmm ?
— Le son c'est ok mais on s'est mélangé les pinceaux dans les écrans !
— Mhmmm ?
— Le son c'est ok mais on s'est mélangé les pinceaux dans les écrans !
Charles? Chaaaaarrrles? Chhhaaaaaaarrrrrrrrrllllllllllleeeeeeees!
Ouah! Quel écho!
Sans nouvelles de ta part d'ici demain lundi soir (allez disons 22h), on demandera au suivant sur la liste (Killgrieg) de prendre ton tour. Fais nous un signe stp. On veut la suite. On a besoin de notre dose!
Ouah! Quel écho!
Sans nouvelles de ta part d'ici demain lundi soir (allez disons 22h), on demandera au suivant sur la liste (Killgrieg) de prendre ton tour. Fais nous un signe stp. On veut la suite. On a besoin de notre dose!
J'suis là !
Ne vous inquiétez pas ! je prends la suite. J'ai juste eu un petit week end prolongé : vendredi/samedi/dimanche sans internet.
D'ailleurs le week end, quasiment jamais connecté.
Je prends donc la suite et vais faire au plus vite. j'essaie pour demain dans la journée ou mercredi matin au plus tard.
ça va ?
pas encore lu le texte de BlueWitch
au fait, on est toujours dans le principe du récit à rebours ?
Ne vous inquiétez pas ! je prends la suite. J'ai juste eu un petit week end prolongé : vendredi/samedi/dimanche sans internet.
D'ailleurs le week end, quasiment jamais connecté.
Je prends donc la suite et vais faire au plus vite. j'essaie pour demain dans la journée ou mercredi matin au plus tard.
ça va ?
pas encore lu le texte de BlueWitch
au fait, on est toujours dans le principe du récit à rebours ?
au fait, on est toujours dans le principe du récit à rebours ?
Non! Il va te falloir relire l'énoncé de Tout sur MM3! On n'est pas forcément dans la linéarité mais on n'est plus dans le rebours comme ça avait été proposé.
Non! Il va te falloir relire l'énoncé de Tout sur MM3! On n'est pas forcément dans la linéarité mais on n'est plus dans le rebours comme ça avait été proposé.
Tard certes mais bon... j'ai lu.
Rome, évidemment, je ne pouvais qu'être conquise :)
Tu plantes là un joli décor Blue et une belle ambiance feutrée et mystérieuse.
Ce petit bonhomme au pull marin m'intrigue déjà beaucoup, j'aime bien le contraste qu'il crée par rapport à ce couple dont on sait très peu de choses pour le moment.
A part quelques petites maladresses de vocabulaire, le style est fluide mais me paraît par moments un peu trop dense, comme si ça se bousculait sans vraiment se structurer. Ce qui semble assez logique en fait, vu que c'est une introduction à quelque chose.
Rome, évidemment, je ne pouvais qu'être conquise :)
Tu plantes là un joli décor Blue et une belle ambiance feutrée et mystérieuse.
Ce petit bonhomme au pull marin m'intrigue déjà beaucoup, j'aime bien le contraste qu'il crée par rapport à ce couple dont on sait très peu de choses pour le moment.
A part quelques petites maladresses de vocabulaire, le style est fluide mais me paraît par moments un peu trop dense, comme si ça se bousculait sans vraiment se structurer. Ce qui semble assez logique en fait, vu que c'est une introduction à quelque chose.
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