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Salut à tous
Je viens de terminer un nouveau recueil de mini-nouvelles qui s'intitule "12 Petits Cadavres", et dont vous pouvez télécharger la première histoire "Le Clown" à l'adresse suivante :
http://tdesmond.free.fr/nouvelles/leclown.pdf
LE CLOWN
Serge gara sa coccinelle rose devant la maison de retraite et sortit son attirail du coffre. Nez rouge en forme de patate, fausse moustache à la portugaise, perruque poil-de-carotte style Yvette Horner, oreilles d'âne en caoutchouc, et le plus important : sa panoplie de clown bariolée de mille couleurs criardes. Il remonta ses bretelles, prit son petit accordéon en plastique et se dirigea d'une démarche chaloupée vers l'accueil.
Dans la loge, la secrétaire lui tendit une liste.
– Merci bien, ma p'tite dame ! Et c'est parti pour la rigolade ! s'écria-t-il en s'élançant dans le couloir recouvert de lino vert pâle, tout en lâchant une ribambelle de pets sonores.
Il pénétra dans la salle de séjour, où une quinzaine de résidents étaient éparpillés. Il y en avait cinq ou six de légumisés devant la télé, la langue pendante devant une démonstration de téléachat, où une sosie de Lova Moor exhibait son corps bronzé et parsemé de petites électrodes.
Un troupeau de harpies – improbables fans de Billy Idol teintes en violet – était stationné contre la baie-vitrée, tel un rassemblement de tuners diurnes, juchés avec arrogance sur leurs fauteuils roulants customisés et flambant neufs, les jantes lustrées et les chromes luisants, prêts à taper un burn sur le carrelage serpilléré de frais.
Il y avait aussi quatre joueurs de belote, pris dans une partie éternelle dont le total de points à atteindre pour remporter la partie était de 100000 ! Inutile de préciser que les quatre protagonistes avaient perdu le compte depuis longtemps...
Serge passa devant tout ce petit monde en effectuant deux cabrioles, qui ne suscitèrent point les acclamations escomptées. Vexé, il se dirigea vers les téléspectateurs et se posta entre eux et leur poste. Les protestations éclatèrent.
– Dégage donc de là, petit vaurien ! cria un des vieillards en brandissant farouchement sa canne. C'est un boche ! C'est un boche j'vous dis, donnez-moi une grenade ! C'est un salaud d'boche !
Ses voisins s'étaient levés (tant bien que mal) pour le calmer.
– C'est juste un clown, Isidore ! C'est pas un boche ! le rassura-t-on. Calme-toi, sinon ils vont te faire la piqûre !...
Dans le tumulte, Serge s'éclipsa et partit en direction des chambres. Il jeta un coup d'œil à sa liste et mémorisa le numéro des chambres qu'il devait visiter. Dans le couloir sans fenêtres, il croisa Mme Claude, une petite vieille qui passait son temps à astiquer les murs à coups de langue. En apercevant le clown, elle poussa un cri strident et se réfugia dans sa chambre, dont elle verrouilla l'accès.
Serge observa la scène d'un œil distrait. Il avait l'habitude avec les anciens clients. Certains se rappelaient de ce qui s'était passé et ne lui faisaient plus confiance. Il fallait parfois envoyer un collègue ou bien avoir recours à de la drogue.
Il s'arrêta devant la chambre 32. La première de sa liste. Il frappa deux petits coups secs.
– Entrez... répondit une petite voix chevrotante.
Il donna un violent coup de pied dans le battant qui alla frapper le mur avec fracas. Parfois, cela suffisait à les faire se retourner dans leur slip.
– Bonjour, Mme Simonet ! tonna-t-il en faisant de grands gestes. Il est l'heure de se réveiller !
– Oh ! un clown ! balbutia la vieille femme allongée dans son lit. Comme c'est amusant !
Serge se posta face à elle et commença son numéro : jonglage de balles en formes de crottes de chien, qu'il réceptionnait sur son nez rouge, grimaces simiesques, cabrioles, sketchs désopilants, chansons paillardes accompagnées de son petit accordéon portatif, claquettes endiablées, concert de pets tonitruants mais inodores, imitations de personnalités du XXème siècle...
Au bout de quinze minutes d'efforts qui lui avaient valu une sacrée suée, il parvint à ses fins.
Mme Simonet, toujours allongée dans son lit, avait succombé. Pour tout dire, elle était morte de rire.
Serge se passa un coup de gant au lavabo de la défunte et sortit de la chambre. Il raya le nom de la feuille et se dirigea vers la chambre suivante.
Trois heures plus tard, exténué, courbaturé et ruisselant de transpiration, il repassa devant la loge de la secrétaire et lui rendit la liste, qu'elle déchiffra avec intérêt.
– Six sur huit ! C'est pas mal du tout ! C'est mieux que la dernière fois, si je me rappelle bien ! dit-elle.
– C'est vrai... (il déglutit)... La dernière fois... Je m'en étais fait que quatre sur neuf si ma mémoire est bonne !... Y en a des coriaces, vous savez !
Elle sourit et ouvrit un tiroir.
– Enfin bon ! Six chambres de libre, on ne pouvait vous demander mieux ! Voici votre chèque. À très bientôt, j'espère ?
Je viens de terminer un nouveau recueil de mini-nouvelles qui s'intitule "12 Petits Cadavres", et dont vous pouvez télécharger la première histoire "Le Clown" à l'adresse suivante :
http://tdesmond.free.fr/nouvelles/leclown.pdf
LE CLOWN
Serge gara sa coccinelle rose devant la maison de retraite et sortit son attirail du coffre. Nez rouge en forme de patate, fausse moustache à la portugaise, perruque poil-de-carotte style Yvette Horner, oreilles d'âne en caoutchouc, et le plus important : sa panoplie de clown bariolée de mille couleurs criardes. Il remonta ses bretelles, prit son petit accordéon en plastique et se dirigea d'une démarche chaloupée vers l'accueil.
Dans la loge, la secrétaire lui tendit une liste.
– Merci bien, ma p'tite dame ! Et c'est parti pour la rigolade ! s'écria-t-il en s'élançant dans le couloir recouvert de lino vert pâle, tout en lâchant une ribambelle de pets sonores.
Il pénétra dans la salle de séjour, où une quinzaine de résidents étaient éparpillés. Il y en avait cinq ou six de légumisés devant la télé, la langue pendante devant une démonstration de téléachat, où une sosie de Lova Moor exhibait son corps bronzé et parsemé de petites électrodes.
Un troupeau de harpies – improbables fans de Billy Idol teintes en violet – était stationné contre la baie-vitrée, tel un rassemblement de tuners diurnes, juchés avec arrogance sur leurs fauteuils roulants customisés et flambant neufs, les jantes lustrées et les chromes luisants, prêts à taper un burn sur le carrelage serpilléré de frais.
Il y avait aussi quatre joueurs de belote, pris dans une partie éternelle dont le total de points à atteindre pour remporter la partie était de 100000 ! Inutile de préciser que les quatre protagonistes avaient perdu le compte depuis longtemps...
Serge passa devant tout ce petit monde en effectuant deux cabrioles, qui ne suscitèrent point les acclamations escomptées. Vexé, il se dirigea vers les téléspectateurs et se posta entre eux et leur poste. Les protestations éclatèrent.
– Dégage donc de là, petit vaurien ! cria un des vieillards en brandissant farouchement sa canne. C'est un boche ! C'est un boche j'vous dis, donnez-moi une grenade ! C'est un salaud d'boche !
Ses voisins s'étaient levés (tant bien que mal) pour le calmer.
– C'est juste un clown, Isidore ! C'est pas un boche ! le rassura-t-on. Calme-toi, sinon ils vont te faire la piqûre !...
Dans le tumulte, Serge s'éclipsa et partit en direction des chambres. Il jeta un coup d'œil à sa liste et mémorisa le numéro des chambres qu'il devait visiter. Dans le couloir sans fenêtres, il croisa Mme Claude, une petite vieille qui passait son temps à astiquer les murs à coups de langue. En apercevant le clown, elle poussa un cri strident et se réfugia dans sa chambre, dont elle verrouilla l'accès.
Serge observa la scène d'un œil distrait. Il avait l'habitude avec les anciens clients. Certains se rappelaient de ce qui s'était passé et ne lui faisaient plus confiance. Il fallait parfois envoyer un collègue ou bien avoir recours à de la drogue.
Il s'arrêta devant la chambre 32. La première de sa liste. Il frappa deux petits coups secs.
– Entrez... répondit une petite voix chevrotante.
Il donna un violent coup de pied dans le battant qui alla frapper le mur avec fracas. Parfois, cela suffisait à les faire se retourner dans leur slip.
– Bonjour, Mme Simonet ! tonna-t-il en faisant de grands gestes. Il est l'heure de se réveiller !
– Oh ! un clown ! balbutia la vieille femme allongée dans son lit. Comme c'est amusant !
Serge se posta face à elle et commença son numéro : jonglage de balles en formes de crottes de chien, qu'il réceptionnait sur son nez rouge, grimaces simiesques, cabrioles, sketchs désopilants, chansons paillardes accompagnées de son petit accordéon portatif, claquettes endiablées, concert de pets tonitruants mais inodores, imitations de personnalités du XXème siècle...
Au bout de quinze minutes d'efforts qui lui avaient valu une sacrée suée, il parvint à ses fins.
Mme Simonet, toujours allongée dans son lit, avait succombé. Pour tout dire, elle était morte de rire.
Serge se passa un coup de gant au lavabo de la défunte et sortit de la chambre. Il raya le nom de la feuille et se dirigea vers la chambre suivante.
Trois heures plus tard, exténué, courbaturé et ruisselant de transpiration, il repassa devant la loge de la secrétaire et lui rendit la liste, qu'elle déchiffra avec intérêt.
– Six sur huit ! C'est pas mal du tout ! C'est mieux que la dernière fois, si je me rappelle bien ! dit-elle.
– C'est vrai... (il déglutit)... La dernière fois... Je m'en étais fait que quatre sur neuf si ma mémoire est bonne !... Y en a des coriaces, vous savez !
Elle sourit et ouvrit un tiroir.
– Enfin bon ! Six chambres de libre, on ne pouvait vous demander mieux ! Voici votre chèque. À très bientôt, j'espère ?
bonne bouffée de fraîcheur. J'aime.
Style léger, adapté, anglicismes discrets, néo-logisme bien trouvé. J'aime.
Après la canicule, Le Clown.
J'en veux encore.
Style léger, adapté, anglicismes discrets, néo-logisme bien trouvé. J'aime.
Après la canicule, Le Clown.
J'en veux encore.
Et un Thomasdesmond, un. Dans la veine de.
Toujours de l'originalité, du corps. Ca se tient bien.
Tiens au fait :
http://critiqueslibres.com/i.php/forum/…
Toujours de l'originalité, du corps. Ca se tient bien.
Tiens au fait :
http://critiqueslibres.com/i.php/forum/…
Pourquoi ce lien ??
C'est pour me culpabiliser, c'est ça ?!
Tu as raison, je vais me bouger le cul !!
C'est pour me culpabiliser, c'est ça ?!
Tu as raison, je vais me bouger le cul !!
Ha dis donc! C'est moche et cruel... mais j'aime bien ça :)
Je m'attendais un peu à une idée de ce genre pour la fin mais sans trop la préciser. Tu amènes tout cela en douceur avec beaucoup d'efficacité, j'ai souri plus d'une fois devant tes descriptions (les vieilles aux cheveux mauves ou l'hystérique qui hurle au boche).
Un tout bon texte!
Je m'attendais un peu à une idée de ce genre pour la fin mais sans trop la préciser. Tu amènes tout cela en douceur avec beaucoup d'efficacité, j'ai souri plus d'une fois devant tes descriptions (les vieilles aux cheveux mauves ou l'hystérique qui hurle au boche).
Un tout bon texte!
Pourquoi ce lien ??
C'est pour me culpabiliser, c'est ça ?!
Tu as raison, je vais me bouger le cul !!
Non, ça n'était pas pour te culpabiliser. C'était pour te bouger le cul.
mdr ! tu as raison, mais tu sais, sur le forum de mon site, on est une tripotée à publier nos textes, et je me dois de tous les lire, c'est la moindre des choses... Donc ici je prends moins le temps, c'est vrai, et puis quand je vois un long texte, ça me refroidit : j'ai les yeux claqués à lire tout ça... Et il y a aussi que quand un texte ne me plaît pas, je préfère ne rien répondre plutôt que de trouver des formules alambiquées pour ne pas blesser l'auteur...
Mais tu as raison, je m'y mets !!!
Mais tu as raison, je m'y mets !!!
Plein d'originalité!! Très bonne nouvelle! J'ai bien ri, du début jusqu'à la fin! Et je n'ai rien à ajouter de négatif, j'ai beaucoup aimé!
Pas mal effectivement. On sent un peu venir la fin, mais il vaut peut-être mieux après tout, pour que ça paraisse moins cruel...
A propos de cruauté. J'ai entendu récemment une vieille dame se plaindre du fait que les vieux sont la dernière catégorie de personnes dont on peut se moquer sans risquer de passer pour un monstre. Avant, on se foutait de la tronche de la race d'à côté, ou des Suisses, des Belges, des Ecossais, des Français, que sais-je, on se foutait même de la gueule des homos, des cocos, des jeunots, des clodos... Maintenant, on se fout de la gueule des vieux.
Enfin, c'est ce qu'elle disait.
Mais elle était vieille.
A propos de cruauté. J'ai entendu récemment une vieille dame se plaindre du fait que les vieux sont la dernière catégorie de personnes dont on peut se moquer sans risquer de passer pour un monstre. Avant, on se foutait de la tronche de la race d'à côté, ou des Suisses, des Belges, des Ecossais, des Français, que sais-je, on se foutait même de la gueule des homos, des cocos, des jeunots, des clodos... Maintenant, on se fout de la gueule des vieux.
Enfin, c'est ce qu'elle disait.
Mais elle était vieille.
On se fout encore du Pape aussi. Puis des cathos. Et c'est pas taxé par la loi je crois. Contrairement à d'autres.
On se fout encore du Pape aussi. Puis des cathos. Et c'est pas taxé par la loi je crois. Contrairement à d'autres.
D'accord, mais le pape et les cathos, ce n'est pas vraiment la jeunesse non plus...
Allez, je suis méchant. Oubliez ça.
Ah ! Voilà enfin la réponse à la question que je me posais depuis longtemps ! Pourquoi dépnser de l'argent pour envoyer des clowns dans les hospices !... Bah je ne m'attendais pas trop à cette chute qui est aussi inattendue (pour moi) que drôle tout en restant horrible... Dégager des places de cette façon, c'est hyper-social et en plus c'est une belle mort ça ! Une remarque négative, une seule : dans un court paragraphe il ya 3 fois le mot chambre. Sinon c'est très bon Thomas. Je vais aller voir ton site.
Pas mal effectivement. On sent un peu venir la fin, mais il vaut peut-être mieux après tout, pour que ça paraisse moins cruel...
A propos de cruauté. J'ai entendu récemment une vieille dame se plaindre du fait que les vieux sont la dernière catégorie de personnes dont on peut se moquer sans risquer de passer pour un monstre. Avant, on se foutait de la tronche de la race d'à côté, ou des Suisses, des Belges, des Ecossais, des Français, que sais-je, on se foutait même de la gueule des homos, des cocos, des jeunots, des clodos... Maintenant, on se fout de la gueule des vieux.
Enfin, c'est ce qu'elle disait.
Mais elle était vieille.
j'espère que dans mon texte, il n'y a rien de moqueur à l'endroit des personnes âgées...
Qu'est-ce que c'est savoureux ! Qu'est-ce que j'ai ri !
Et quelle histoire ! Délirante ! Quelle imagination, Thomas Desmond !
Et quelle histoire ! Délirante ! Quelle imagination, Thomas Desmond !
Merci KVQ ! Ta critique me va droit au cœur, franchement...
De rien, sieur Thomas Desmond ! Tu les mérites...
Vraiment pas mal ! J'ai pas pu lacher ton texte tellement ça m'intriguait de connaître la fin ! Plutôt surprenante cette fin, mais tout à fait comme je les aime : elle arrive tout doucement mais on ne la comprend intégralement que dans les dernières lignes ; elle donne un nouveau sens au texte entier ; enfin elle laisse une trace dudit texte dans les esprits ! ...
Et puis le style est pas mal, léger, agréable à lire.
Franchement ça m'a plu.
Et puis le style est pas mal, léger, agréable à lire.
Franchement ça m'a plu.
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