Tistou 17/12/2004 @ 19:50:56
Et ce bus qui n’arrivait pas ! Lucette trépignait intérieurement.
La ville était alanguie sous le souffle du sirocco. De passants ? Point. Quelques autos. Leur arrivée se signalait longtemps avant le virage là bas. Rétrogradation de troisième en deuxième ; montée sonore dans la gamme des aigus, puis accélération juste avant de déboucher du virage, et l’apparition du véhicule qui coïncidait juste avec à nouveau le passage en troisième … Dans l’hébétude du moment Lucette se surprenait à guetter les conducteurs, à vérifier que leur allure était en phase avec ce que l’écho de leur conduite pouvait suggérer. Elle se surprit à sourire en voyant passer un petit pépère au volant d’une Citroen alors qu’en toute logique, le couinement de la vitesse mal passée lui avait suggéré une jeune conductrice. Pas fâchée la Lucette de voir passer le pépère !
Lucette était songeuse. Ce quartier allait devenir son quartier. Une partie de son histoire allait se conjuguer avec celles de ces immeubles, de ces maisons, de ces commerces, de ces trottoirs, … Un peu intimidant tout ça. Comme quand vous vous apprètez à entamer une relation suivie avec quelqu’un. Que vous allez confier à de nouvelles mains une partie de votre futur, une partie de votre moi.
Lucette venait de quitter le 9 de la rue Sous l’Eau, un immeuble cossu de cinq étages, qui allait devenir partie intégrante de sa nouvelle vie. Un appartement là, au quatrième étage, clair et propre, loin des solutions provisoires cadres de sa vie récente.
L’agent immobilier qui venait d’effectuer cette dernière visite avec elle l’avait rassurée dans son choix. Assis tous les deux sur un canapé chocolat étrangement laissé là par le locataire précédent (trop lourd à déménager ?), il ne s’était pas contenté de passer en revue les avantages de cet immeuble (forcément les avantages), il lui avait aussi brossé le tableau des occupants de l’immeuble. Elle ne devrait pas être embêtée, songea-t-elle avec délices, se remémorant ses démêlés récents avec ses voisins.
Un léger sourire étira ses lévres. Il semblait en pincer pour l’occupante du cinquième. La nostalgie qui avait envahi son visage à l’évocation de la rousse du cinquième, et sa voix, fugacement altérée à cet instant, n’avaient pas trompé Lucette.
Un franc sourire l’éclaira davantage lorsqu’elle se remémora la personne de l’agent immobilier. Paul Personne qu’il s’appelait ! Le nom, déja … Atypique, ça c’était sûr. Il faisait avec elle la dernière visite de sa carrière d’agent immobilier. Il lui avait confié, tout sourire, qu’après cette visite il raccrochait et se jetait à corps perdu dans la passion qui occupait toutes ces nuits ; la guitare et le blues. La guitare et le blues ! Avec Paul Personne pour patronyme ! Lucette en rigolait intérieurement. Il y en a qui ne doutent de rien !
Toujours pas de bus ! Le temps qu’elle avait perdu bloquée dans cet ascenseur la pertubait. Tout son emploi du temps en semblait chamboulé !
Son visage se referma soudain à l’évocation de l’étrange rencontre qu’elle avait faite au sortir de l’immeuble. Délivrée enfin de cet ascenseur après, … combien ? vingt minutes ?, par Paul Personne qui, sorti plus tard de l’appartement, s’était rendu compte du problème, elle était quasiment rentrée dans un individu qui marchait le nez en l’air. Encore sous le coup de l’énervement de sa réclusion ascenseurienne, et sonnée par la lumière et la chaleur qui lui était tombée dessus sortant du hall de l’immeuble, elle n’avait pas trop fait attention au personnage.
Oui, songea-t-elle, il était bizarre. Bizarre, se répèta-t-elle.
Bizarre mais elle aurait été incapable présentement de le décrire. Par contre ce qui avait suivi, elle s’en souvenait bien et c’était indéniablement étrange.
Ils avaient donc failli se rentrer dedans. Elle se souvenait avoir fait un écart pour l’éviter et avoir fait tomber en le heurtant du coude, une sacoche qu’il portait sous son bras. Tiens, il devait porter un chapeau puisqu’elle se souvenait qu’il avait porté la main à sa tête et avait soulevé quelque chose. Elle s’était baissée rapidement pour ramasser la sacoche tombée. Et ils s’étaient retrouvés les yeux dans les yeux lorsqu’elle s’était relevée. Un regard bizarre. Oui, il avait un regard bizarre derrière ses lunettes à petites montures. Un regard évanescent, elle aurait presque pu dire halluciné. Mais halluciné dans le genre doux dingue. Pas le genre qui fait peur.
Elle se souvenait qu’il était très pâle, presque exsangue, et qu’un parfum curieux émanait de sa personne. Un parfum comme …. , comme …. de la naphtaline ! Oui, c’est ça. On aurait dit qu’il sortait ses vêtements de la naphtaline. D’ailleurs, elle aurait été bien en peine de décrire ses habits. Tonalité noire, ça oui, mais sinon ?
La situation qui avait suivi par contre était gravée dans sa mémoire.
« Excusez moi » s’étaient-ils écriés quasiment à l’unisson. Elle lui avait souri. Il était resté dans sa douce dinguerie et ses yeux, à lui, avaient glissé vers sa poitrine, à elle.
Elle s’était senti rapidement mal à l’aise au fur et à mesure que ses yeux , à lui, ne remontaient pas là où ils auraient dû revenir. Vers ses yeux, à elle. Elle s’apprètait à l’interpeller lorsqu’il avait dit, d’une voix douce, comme désincarnée.
« Vous étes restée bloquée dans l’ascenseur ? »
« Pardon … »
« Combien de temps étes vous restée bloquée dans l’ascenseur ? » avait-il répèté. Et ses yeux étaient enfin remonté au niveau attendu.
Mais la gêne était là. Et l’incongruité de la question l’avait laissée sans voix.
Il avait repris, doucement, regard perdu à travers ses lunettes rondes.
« Vous sortez de cet immeuble ? » Et du menton il désignait le hall, juste derrière elle.
Il n’avait pas attendu sa réponse et avait continué.
« Je pense que vous avez pris l’ascenseur, pour descendre, et que vous étes restée bloquée dedans. Je voudrais savoir combien de temps. »
Le ton était celui d’un maître qui explique une évidence à un élève borné. Lucette, estomaquée, n’avait pas réagi de suite.
« Mais, mais … je ne sais pas ? Vingt … vingt minutes peut être ? Mais comment … ? »
« Vingt minutes » avait-il murmuré.
« Excusez moi mais comment savez vous … ? »
« Pardon ? » Il la regardait à nouveau sans la voir, regard évanoui. « Hein ? Ah oui. La rose. La rose que vous portez à la boutonnière de votre chemisier. »
« Oui, c’est de l’églantine. » Le ton devenait excédé.
« He bien ? Votre églantine ? Elle était en bouton ? »
Effarée, Lucette n’y comprenait rien. Elle l’avait quitté des yeux pour regarder l’églantine. Le temps d’intégrer l’information que le petite fleur rose pâle n’y était plus, il partait. Elle l’entendit simplement marmonner :
« Vingt minutes, vingt minutes, il faut aller voir Prauvice. Je dois en discuter avec Prauvice … »
Et elle l’avait laissé partir, mi-soulagée, mi-curieuse. Puis elle avait regardé son églantine de plus près. Non, la fleur n’était pas tombée. En tous cas c’était un bouton, un bouton non ouvert qui culminait la tige.

Et là maintenant, toujours en attente du bus, elle se disait que, décidément, quelque chose clochait. Elle reporta son attention sur la petite fleur, louchant pour fixer le petit bouton encore fermé. Elle le saisit délicatement et l’ôta du chemisier.
C’est quand même bizarre, il y a bien un bouton, et aucune trace de la fleur.
Elle faisait tourner la tige entre ses doigts, réfléchissant. Un coup de klaxon la fit reculer précipitamment. Le bus arrivait et incurvait sa course dans sa direction. Elle jeta la tige d’églantine, le souvenir de l’évènement. Le déménageur, il lui fallait maintenant discuter avec le déménageur et elle y allait de ce pas.

Sibylline 17/12/2004 @ 20:12:48
Je t’avoue Tistou que je ne comprends pas trop bien comment ce texte entre dans le cadre de l’exercice. Je me suis demandé si tu ne t’étais pas trompé de copier-coller. Non, je ne vois pas. Quel objet compromettant ? La rose ? Pourquoi compromettant ? Pourtant, il n’y a pas d’erreur puisqu’on retrouve ici les mots obligés de l’exercice.
Bon. C’est bien écrit, comme d’habitude, mais, sur le fond, je trouve que c’est une mauvaise idée d’avoir repris les personnages du MM2, cela va entraîner des confusions. Faudra-t-il considérer que ce passage en fait partie ? Hum, hum… Qu’en pensent les autres ?

Sahkti
avatar 17/12/2004 @ 20:22:38
Je suis du même avis que toi Syb. Je ne trouve aucun lien entre ce texte et l'exercice.
Je partage un peu ce sentiment de confusion vu qu'on reprend les personnages du MM, ça brouille les pistes.
Sinon, c'est bien écrit, ça aurait été une bonne intro à l'exercice du MM2.

Bluewitch
avatar 17/12/2004 @ 20:24:36
Tistou, tu triches! ;o)

Je suppos equ'on ne doit pas en tenir compte pour la suite de MM2?

Kilis 17/12/2004 @ 20:55:47
C'est quand même pas de la faute de Tistou si les personnages ont décidé de faire leur vie, hein? d'autant qu'ils doivent être pas mal perturbés par la multitude de leurs géniteurs!

Moi, j'aime ça, Tistou, quand on sort des entiers battus.

Ceci dit, pour moi ton texte manque un peu de clarté... ou alors c'est moi... bien possible aussi.

Tistou 18/12/2004 @ 09:53:07
Coupable. Je plaide coupable.
C'est vrai que ça ne rentre dans le cadre de l'exercice qu'en ... étirant le cadre. J'ai pris le sens compromettant plutôt dans le sens "indice de quelque chose". Quant à l'enquête, c'est vrai, elle n'est carrément pas menée? Bon, j'arrête d'essayer de me justifier, je m'enfonce davantage!
Sérieusement, je n'avais pas d'idées dans le cadre que je trouvais trop strict, sinon de la banalité. Alors voilà, j'ai trouvé un fil et j'ai tiré dessus.
Quant à l'utilisation de personnages de MM2. Bien sûr qu'il ne faut pas le prendre comme un épisode! Ca n'en est pas un. Et je ne pense pas que ça perturbe les esprits tant que ça puisque :
1) l'action est antérieure.
2) ça colle au maximum (j'espère!) à ce qui figure dans MM2.
Je demande donc indulgence et compréhension et me déclare prêt, en réparation de ma faute, à réciter quelques épisodes de MM2!

Tistou 18/12/2004 @ 10:04:50
Pour ce qui est de la culpabilité, et d'un exercice, je vous invite à aller voir là, le 18/12, à 10H03 :
http://critiqueslibres.com/i.php/forum/…

Sibylline 18/12/2004 @ 10:18:55
Pour ce qui est de la culpabilité, et d'un exercice, je vous invite à aller voir là, le 18/12, à 10H03 :
http://critiqueslibres.com/i.php/forum/…

Oui, bon, faut pas dramatiser tout de même... Cool. C'est Noël.

Lyra will 18/12/2004 @ 11:59:14
Bah oui coupable, mais c'est pas grave :0)
Moi, j'ai passé un bon moment à te lire, Tistou, tu écris bien et je ne pense pas que reprendre les même personnages et le même cadre influence les prochains épisodes.
Je ne sais pas si toutes les contraintes sont présentes mais comme on dit, les contraintes sont là pour ne pas être respectées ;0)

Provis

avatar 19/12/2004 @ 17:59:50
Très beau texte, Tistou, qui coule, qui plaît, qui se lit tout seul.. Mais on avait l'habitude déjà.. Par contre on dirait que les contraintes ne sont pas respectées ??!! Pas bien ça !!! Y aura-t-il des sanctions ?? Quant à cette idée récurrente de consulter Prauvice .. ne le répétez pas, mais on dit qu'il n'aurait plus toute sa tête, alors ..

Olivier Michael Kim
20/12/2004 @ 23:49:31
C'est sympa de faire un texte dans les coulisses du MM2... C'est bien original.

Tistou 21/12/2004 @ 11:21:59
Provis, si tu vas voir l'épisode 17 de MM2, écrit par Sahkti, tu constateras que M. Prauvice a tout du génial bricoleur. Bon sang, qu'est-ce qu'on ne ferait pas avec un vélo à moteur et ... et quoi déja? un panier à salade? non, mais un truc bizarre quand même.

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