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Forums  :  Vos écrits  :  INVITATION : Episode 18

Kicilou 22/10/2004 @ 16:23:10
« … mal… »
«… poisseux… »
« … ouvrir yeux… »
« … mal… »
« … rouge… sang… »
« sortir d’ici… »
« … blanc… froid… »
« …mal, tellement mal… »
Noir

Repartis, ils étaient repartis dans les bois enneigés. Jim devant, marchant précautionneusement pour éviter de malmener sa rustine, enfin, c’est comme ça qu’il pensait à sa blessure depuis la demande de Lolita : « Dis tonton Jim, papy il a dit il t’as réparationné avec une rustine, tu montres c’est quoi ? » et puis derrière lui, Moineau, qui à la sortie de la cabane, avait d’autorité pris la petite sur son dos. Il lutait le pauvre oisillon pour avancer dans la neige avec la gamine endormie sur l’échine. Mais le spectacle de cette petite bouille adorable, abandonnée sur son épaule, le pouce dans la bouche, l’autre bras se balançant au rythme de la marche et ses boucles blondes faisant comme un rayon de soleil sur son vieux blouson terni, aurait attendries même les gargouilles de Notre-Dame. Jim, bon prince, s’était chargé de Tistou, l’avait enroulé dans son écharpe et installé dans sa capuche.
Le vieux cow-boy n’avait pas posé plus de questions, il avait juste donné quelques indications pour rejoindre la ville la plus proche et emmitouflé Lolita dans un bon gros pull (« qui grattait même pas » d’après la principale intéressée), ce qui lui avait valu un bisou plein de reconnaissance. Ils avaient vécu comme une parenthèse de douceur, de calme, presque de bonheur dans cette cabane. Le genre de chose qui vous réconcilie avec l’humanité et qui vous laisse un sentiment de sérénité qui laisse des traces : un vague sourire qui s’incruste au coin des lèvres et qui refuse de débarrasser le plancher, même avec tous les voyants au rouge du genre « qu’est-ce qu’on va devenir ? », « où on va aller ? »… Mais pour l’instant, on était dimanche, le soleil faisait miroiter des arbres de verre, desquels pendaient des stalactites de cristal. Et Jim se promenait dans les bois avec sa petite sœur retrouvée et le frère qu’il n’avait jamais eu.


« … froid… »
« … même plus mal… »
« Tient, Steve… »
« … ombre noire… »
« …reflet… une faux ?...la… mo… … ».

-- NON !!!!!!!!! Merde !!! Allez !! Tiens le coup… Marc !! Tu peux pas abandonner maintenant ! Putain, bats toi !! Tu t’es sorti d’cette carcasse c’est pas pour m’crever dans les bras !!

Steve secouait sans ménagement le corps à jamais inerte de son collègue. Trop, ça commençait vraiment à faire trop pour lui ! Et pourtant il avait vu son compte de macchabée en vingt ans de carrière mais là, c’était l’hécatombe ! D’abord Jane, et puis, en arrivant près de la fameuse clinique du véto, la voiture empalée sur l’arbre, le gyrophare pendouillant au bout de son fil… Et sur le siège passager (la place du mort comme ils disent), piquetée de branches, une masse informe où se mêlaient éclats de verre, sang et lambeaux de vêtements… C’était un de ses gars mais… lequel… Il n’avait même pas pu le reconnaître. Et maintenant Marc, qui avait survécu, qui s’était tiré seul de l’amas de tôle, et qui n’trouvait rien de mieux que d’attendre l’arrivée de son chef pour lui claquer entre les doigts.
Steve se releva brusquement. Cent mètres à peine le séparaient de la clinique. Il prit sa course, s’arrachant à la neige rougie avec un grognement de sanglier. Il pénétra comme une rafale dans la clinique, le pistolet au poing, négligeant toutes ses chères techniques de sécurité. Le fils de P. qu’était responsable de cette boucherie allait le payer cher !
Il faisait sombre dans le petit couloire où il se trouvait maintenant. Mais à gauche, une porte ouverte imprimait sur le sol carrelé un rectangle de lumière. Comme un projecteur. Une scène de mauvais polar. Les gouttes bien rouges sur le carrelage immaculé. La jambe, seule chose dépassant de l’embrasure de la porte. Et l’affreux pressentiment, le cœur qui s’affole, le pistolet qui tombe, les pieds qui avancent seuls vers le sinistre tableau. La jambe qui devient buste. L’imper nouvellement pourvu d’un trou ourlé de rouge, juste entre les omoplates. Et puis le visage. La bouche entrouverte. Les yeux écarquillés. Avec cet air de gentillesse, comme toujours. Et puis un peu d’étonnement, d’incrédulité… Tom.
Et un hurlement, venu des profondeurs de son être, une plainte comme un rugissement de douleur et de rage mêlées. La souffrance qu’on étouffe avec la haine. La fureur, qui lui remettait le pistolet dans les mains. Il ne s’agirait plus de justice maintenant mais de vengeance, il s’en faisait le serment sur le cadavre de son camarade.

Steve venait juste de se taire, à bout de souffle, qu’un grognement sourd, comme le reflet de sa propre colère se fit entendre…

Benoit
avatar 22/10/2004 @ 16:29:52
Superbe comme épisode! La première partie, tranquille, genre promenade dans les bois : parfaite! Puis c'est l'horreur et on retrouve nos flics, enfin, leurs cadavres... Ca va dynamiser l'action, ça!
Par contre, je pensais que Tom avait été tué de face et pas dans le dos. Et dans le visage, non? Ca, c'est peut-être moi qui imagine...

Bluewitch
avatar 22/10/2004 @ 17:33:01
J'aime beaucoup ces transitions de mots hachés. La réapparition de Steeve qui voit tout s'écrouler autour de lui. Difficile d'imaginer que nos "héros" sont un peu à l'origine de tout ça...
J'en connais un qui va être content de se voir emmitoufflé bien au chaud. ;o)

Polochon 22/10/2004 @ 18:24:09
Ben voilà, à nouveau on compte nos morts, finie la pleinitude du chalet.

Que dire? Je le trouve très bien moi cet épisode, bonne idée que cette cassure!

Voilà...

Monique 22/10/2004 @ 18:38:40
Kicilou dans ses oeuvres ! Nous voilà à nouveau avec un texte en deux parties distinctes quant à la narration, bien fait tout ça.
Je me suis prise à espérer que le "cow-boy" n'aurait pas d'ennuis à avoir aidé de tels criminels... N'est-ce pas qu'ils nous sont sympathiques ? Eh ben c'est pas bien !!...
J'ai relevé 2 phrases qui touchent ma sensibilité de poétesse de 3ème zone :

" le soleil faisait miroiter des arbres de verre, desquels pendaient des stalactites de cristal "

" une porte ouverte imprimait sur le sol carrelé un rectangle de lumière "

Et une autre phrase très forte :

" La souffrance qu’on étouffe avec la haine "

Encore un bon épisode bien enlevé, malgré, oui, le petit dérapage de scénario sur la façon dont est mort Tom. Pas grave.
Merci Kicilou

Kicilou 22/10/2004 @ 20:08:22
Pour la façon dont est mort Tom je voyais aussi la balle rentrer par devant mais je l'ai faite ressortir par le dos... C'est vrai que je ne sais pas si c'est physiquement possible...
Et Merci pour les compliments!! Je stressais un peu de vos réctions à cet épisode qui tranchait pas mal avec ce que j'avais fait la dernière fois!

Bluewitch
avatar 22/10/2004 @ 22:29:13
Je pense que c'est physiquement possible mais alors avec un trou bien plus gros qu'à l'entrée... Enfin, bon, ça c'était pour le détail scabreux. ;o)
Sinon, je trouve ça bien, moi, le fait que tu aies "tranché" par rapport au précédent. Ca donne du rythme, de l'évolution.
Et comme l'a dit Mo, que de jolies phrases parsemées dans ton texte.

Tistou 23/10/2004 @ 09:29:38
"Comme une scène d'un mauvais polar".
Je cite!
Parce que non, tu ne nous fais pas un mauvais polar, tu nous fais la douche froide. La douceur et de l'intime tendre avec les "méchants" et du violent et de l'intime violent avec le "bon?". Comment va-t-on gérer ça? Nos héros ont tout faux, et on les aime bien non? N'empêche ...
Kilis va bien nous apporter une piste.
Merci pour cette belle suite Kicilou.

Olivier Michael Kim
23/10/2004 @ 14:35:24
OK, c'est épisode très calme... Pourquoi pas? C'est pas le genre que j'aime.

Sinon, j'ai une remarque à formuler :

Le passage entre les deux parties est confus à mes yeux, trop rapide. Une phrase de transition aurait été judicieuse à mon goût. Sinon il aurait peut-être fallu mettre des *** entre les deux parties par marquer la séparation.

Voilà, voilà !

Kicilou 25/10/2004 @ 10:53:15
C'est vrai que j'aurais pu mettre *** , en fait j'y ai pensé mais bon... Pas fait. Tout ça pour dire que de mon point de vue, toutes les remarques sont bonnes à prendre, utiles pour faire mieux la fois prochaine...

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