Tophiv
12/10/2004 @ 16:12:57
ça me plait assez comme débat ! Alors, j'en lance encore un autre. Dès que je vous gonfle, vous me le dites ;-)

A : "Ceci est ta vie. Ceci est à toi. Tu peux faire l'exact inventaire de ta maigre fortune, le bilan précis de ton premier quart de siècle. Tu as vingt-cinq ans et vingt-neuf dents, trois chemises et huit chaussettes, quelques livres que tu ne lis plus, quelques disques que tu n'écoutes plus. Tu n'as pas envie de te souvenir d'autre chose, ni de ta famille, ni de tes études, ni de tes amours, ni de tes amis, ni de tes vacances, ni de tes projets. Tu as voyagé et tu n'as rien rapporté de tes voyages."

B : "Tout est provisoire : l'amour, l'art, la planète Terre, vous, moi. La mort est tellement inéluctable qu'elle prend tout le monde par surprise. Comment savoir si cette journée n'est pas la dernière ? On croit qu'on a le temps. Et puis, tout d'un coup, ça y est, on se noie, fin du temps réglementaire. La mort est le seul rendez-vous qui ne soit pas noté dans votre organizer. Tout s'achète : l'amour, l'art, la planète Terre, vous, moi. "

C : "Elle se dérègle. Ça ne va pas en s'arrangeant, ni même en stagnant. Elle était convaincue, d'expérience, qu'à chaque fois qu'elle s'approcherait trop près du bord, elle saurait faire pirouette arrière. Seulement, cette fois, elle ne contrôle plus rien, " sans les mains ". Tous les warnings clignotent en vain et elle sent les gens s'inquiéter, s'éloigner au fur et à mesure."

D : "Il n'est que de vomir l'âme et de la rendre une fois pour toutes ; le reste suit, sans l'ombre d'un doute, serait-ce au coeur du chaos. Dès le commencement, je n'ai jamais connu que le chaos : un fluide dont j'étais enveloppé, que j'inhalais par les branchies. Dans le tréfonds, où la lune brillait, impassible et opaque, tout n'était que douceur lisse et fécondation ; plus haut, c'était la pagaille, la discorde. En toute chose, j'avais tôt fait de voir l'extrême opposé, la contradiction, et entre le réel et l'irréel, l'ironie, le paradoxe. J'étais mon pire ennemi. "

Voilà, quels sont ceux dont le style vous parait le plus "littéraire" ? le plus à même de vous plaire ?

Et ne trichez pas, hein ! pas de recherche avant d'avoir répondu et ne vendez pas la mèche ...

Echemane
avatar 12/10/2004 @ 18:14:07
A et B: trop démonstratifs! j'ai l'impression de lire le début de deux exposés dont je devine que la suite ne m'intéressera pas. Surtout le B qui me fait penser (allez savoir pourquoi) à une réclame publicitaire ou à un clip vidéo: court, percutant, jouant sur l'instantané. pas vraiment adapté à la littérature telle que je l'aime!
C: trop court pour se faire une idée, cela me parait relativement insipide.
D: sans conteste le plus littéraire! voire même un peu trop "construit" mais la maitrise de la langue est là. je reste perplexe quant au fond, ce genre de thème peut donner le meilleur comme le pire. C'est quand même celui qui m'attire le plus.

Echemane
avatar 12/10/2004 @ 18:16:10
Une intuition: le B, c'est du FB?

Beautoucan 12/10/2004 @ 18:23:20
Perso, je dirais que oui pour le B
Pour le A, je pense que c'est GP
Pour le C, ce serait VD,
mais pour le D ??...

Lucien
avatar 13/10/2004 @ 14:03:51
Le A : j'adhère à 100 %, bien sûr. Tu sais pourquoi, Tophiv!
Le B : très banal sous son aspect philoophique. "Organizer" me fait tiquer.
Le C: trop court. Les "warnings" m'indisposent autant que l'"organizer".
Le D : m'accroche beaucoup plus. "J'étais mon pire ennemi." L'ironie, le paradoxe, les branchies...

Mais les extraits sont un peu courts et ne sont pas des incipits. Nous changeons un peu de jeu, Tophiv.

Lucien
avatar 13/10/2004 @ 14:05:27
Selon moi,

A = GP
B : BW (?)
C et D ???
Perso, je dirais que oui pour le B
Pour le A, je pense que c'est GP
Pour le C, ce serait VD,
mais pour le D ??...

Tophiv
13/10/2004 @ 14:21:22
Le A : j'adhère à 100 %, bien sûr. Tu sais pourquoi, Tophiv!
Le B : très banal sous son aspect philoophique. "Organizer" me fait tiquer.
Le C: trop court. Les "warnings" m'indisposent autant que l'"organizer".
Le D : m'accroche beaucoup plus. "J'étais mon pire ennemi." L'ironie, le paradoxe, les branchies...

Mais les extraits sont un peu courts et ne sont pas des incipits. Nous changeons un peu de jeu, Tophiv.


C'est vrai, j'ai un peu triché ! Mais juste un peu car seul le A n'est pas un incipit.

Dans ces 4 incipits/extraits, il y a 2 écrivains reconnus et 2 écrivains "à la mode", des spécialistes du "désenchantement facile" , grands vendeurs de livres.

Sans leur nom, sans pub, en gardant juste le texte, on se rend vraiment compte de la platitude de leurs textes ...

Pour ce qui est des "devinettes", je confirme que A = GP (Je n'en attendais pas moins de ta part, Lucien :-)

B= FB et non pas BW (je suppose que tu pensais à Bernard Werber ?)

C=VD

Beautoucan 13/10/2004 @ 14:57:58
je signale (gentiment !) que j'avais déjà dit :
A = GP
B = FB
C = VD
Reste le D ??

Echemane
avatar 13/10/2004 @ 14:59:47
je signale (gentiment !) que j'avais déjà dit :
A = GP
B = FB
C = VD
Reste le D ??


JV?

Tophiv
14/10/2004 @ 15:29:18
Voici les réponses et un petit supplément pour Pérec et Miller.


[ b ]EXTRAIT A - Un Homme qui dort de Georges PEREC[ /b ]
Ceci est ta vie. Ceci est à toi. Tu peux faire l'exact inventaire de ta maigre fortune, le bilan précis de ton premier quart de siècle. Tu as vingt-cinq ans et vingt-neuf dents, trois chemises et huit chaussettes, quelques livres que tu ne lis plus, quelques disques que tu n'écoutes plus. Tu n'as pas envie de te souvenir d'autre chose, ni de ta famille, ni de tes études, ni de tes amours, ni de tes amis, ni de tes vacances, ni de tes projets. Tu as voyagé et tu n'as rien rapporté de tes voyages. Tu es assis et tu ne veux qu'attendre, attendre seulement jusqu'à ce qu'il n'y ait plus rien à attendre : que vienne la nuit, que sonnent les heures, que les jours s'en aillent, que les souvenirs s'estompent. Tu ne revois pas tes amis. Tu n'ouvres pas ta porte. Tu ne descends pas chercher ton courrier. Tu ne rends pas les livres que tu as empruntés à la Bibliothèque de l'Institut pédagogique. Tu n'écris pas à tes parents.

Tu ne sors qu'à la nuit tombée, comme les rats, les chats et les monstres. (...)

Tu es un oisif, un somnambule, une huître. Les définitions varient selon les heures, selon les jours, mais le sens reste à peu près clair : tu te sens peu fait pour vivre, pour agir, pour façonner; tu ne veux que durer, tu ne veux que l'attente et l'oubli.

La vie moderne apprécie généralement peu de telles dispositions : autour de toi tu as vu, de tout temps, privilégier l'action, les grands projets, l'enthousiasme : homme tendu en avant, homme les yeux fixés sur l'horizon, homme regardant droit devant lui. Regard limpide, menton volontaire, démarche assurée, ventre rentré. La ténacité, l'initiative, le coup d'éclat, le triomphe tracent le chemin trop limpide d'une vie trop modèle, dessinent les sacro-saintes images de la lutte pour la vie. Les pieux mensonges qui bercent les rêves de tous ceux qui piétinent et s'embourbent, les illusions perdues des milliers de laissés-pour-compte, ceux qui sont arrivés trop tard, ceux qui ont posé leur valise sur le trottoir et se sont assis dessus pour s'éponger le front. Mais tu n'as plus besoin d'excuses, de regrets, de nostalgies. Tu ne rejettes rien, tu ne refuses rien. Tu as cessé d'avancer, mais c'est que tu n'avançais pas, tu ne repars pas, tu es arrivé, tu ne vois pas ce que tu irais faire plus loin.

[ b ]INCIPIT B - 99 francs - F.Beigbeder[ /b ]

[ b ]INCIPIT C - Bye bye Blondie - Virginie Despentes[ /b ]

[ b ]INCIPIT D - Henry Miller -tropique du capricorne[ /b ]
Il n'est que de vomir l'âme et de la rendre une fois pour toutes ; le reste suit, sans l'ombre d'un doute, serait-ce au coeur du chaos. Dès le commencement, je n'ai jamais connu que le chaos : un fluide dont j'étais enveloppé, que j'inhalais par les branchies. Dans le tréfonds, où la lune brillait, impassible et opaque, tout n'était que douceur lisse et fécondation ; plus haut, c'était la pagaille, la discorde. En toute chose, j'avais tôt fait de voir l'extrême opposé, la contradiction, et entre le réel et l'irréel, l'ironie, le paradoxe. J'étais mon pire ennemi. Il n'était rien que je voulusse faire, que je n'aurais pu tout aussi bien refuser de faire. Enfant déjà, et ne manquant de rien, j'avais envie de la mort : j'avais envie de capituler n'ayant aucun sens de la lutte. J'avais la conviction que de poursuivre une existence que je n'avais pas sollicitée, n'apporterait ni preuve ni substance, n'ajouterait ni n'ôterait rien à rien. Tous ceux que je voyais autour de moi n'étaient que des ratés, sinon des grotesques. Notamment ceux qui avaient réussi. Ceux-là, je les trouvais ennuyeux à pleurer. Les faillis de la vie m'attiraient, mais ce n'était pas la sympathie qui me guidait. C'était une qualité purement négative, une faiblesse qui n'attendait que le spectacle de la misère humaine pour s'épanouir.

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