Eric Eliès
avatar 04/12/2021 @ 16:36:23
Au hasard d'une recherche sur les sites de critiques littéraires, je suis tombé sur un article publié dans Marianne, assez ancien (datant de 2012), expliquant le mode de fonctionnement des sites permettant aux lecteurs de poster et partager des critiques de livres ou des impressions de lecture. Je ne sais pas si Babelio a continué la pratique exposée dans l'article mais c'est assez atterrant... et je suis bien heureux que CL n'ait jamais versé dans cette combine !

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Babelio.com : quand le Web devient un business modèle

Fondé en 2007 par Guillaume Teisseire et Pierre Fremaux, deux jeunes loups de cabinets de conseil médias passés par le cursus Sciences-Po et école de commerce, mais aussi par l’informaticien Vassil Stefanov, le site Babelio compte aujourd’hui 45 000 membres qui alimentent 300 nouvelles critiques par jour, qu’il s’agisse de grands classiques ou des dernières nouveautés parues en littérature générale, documents, BD ou jeunesse.
Pas étonnant que le site, qui totalise aujourd’hui 500 000 visiteurs uniques par mois, soit courtisé par de nombreuses maisons d’édition, de Gallimard à Harlequin en passant par Le Seuil, Flammarion ou La Musardine, qui participent régulièrement à l’opération « Masse critique ».
« Tous les trois mois, nous publions une liste de 100 à 150 titres que nous soumettent les éditeurs. Les blogueurs y choisissent les ouvrages qu’ils souhaitent chroniquer et les maisons d’édition leur envoient directement les livres. A chaque fois, ils ont 90 % de retour critique, ce qui est impossible dans la presse », précise Guillaume Teisseire.
Mais Babelio ne se limite pas à cette activité participative. Car le site, dont les locaux sont installés dans la pépinière pour jeunes entreprises créée il y a vingt ans par la chambre de commerce et d’industrie de Paris dans le XXe arrondissement, est une SARL, employant quatre personnes à plein temps. « Notre modèle est clairement commercial », admet Guillaume Teisseire.
Et d’expliquer que près de la moitié des revenus du site, dont le chiffre d’affaires s’élève à quelques centaines de milliers d’euros, provient de la publicité et des forfaits donnés par les éditeurs. L’autre moitié est réalisée par la location, par exemple aux sites de bibliothèques municipales, de la base de données littéraires constituée, pour l’essentiel, par les contributions des internautes. Ces derniers ne perçoivent pas la moindre rétribution.

Guillaume Teisseire avoue sans complexes monter des « opérations » avec la plupart des grands éditeurs parisiens. « Pour 1 000 euros, nous devons faire en sorte de faire rédiger 20 critiques d’un même ouvrage, détaille-t-il avant de préciser en toute innocence : mais ces critiques peuvent êtres positives comme négatives. » Même si l’argent ne va pas dans la poche des contributeurs mais dans les caisses du site, la pratique a de quoi laisser sans voix. Et le même de poursuivre : « Un seul éditeur a cessé cette opération après avoir recueilli une majorité de mauvaises critiques. Les autres continuent car, 20 critiques, même si c’est peu à l’échelle du Web, cela suffit pour commencer à créer le buzz. »
Voilà comment le Web littéraire peut aussi tomber dans des pratiques qui rappellent les pires monnayages du marigot germanopratin traditionnel où l’indépendance d’un journaliste peut notamment s’acheter au prix d’une préface grassement rémunérée par un éditeur. Ce qui fait dire à Sébastien Lapaque, lucide : « Il ne faut pas trop se leurrer sur le mythe des petits indépendants du Net contre les gros industriels de la presse écrite et audiovisuelle. Pour ce qui concerne la critique littéraire, ce qu’on observe sur le Web reproduit toute l’histoire des contre-cultures : cela commence dans l’euphorie libertaire, mais très vite intervient la mise au pas libérale. Il y a toujours des amateurs passionnés qui s’expriment sur la Toile, mais le quadrillage marchand est quand même de plus en plus serré. »
A l’heure où les enjeux économiques de l’édition sont de plus en plus importants, dans un marché chaque année plus difficile, l’avenir de la critique littéraire ne se joue pas dans le conflit entre médias traditionnels et Internet, mais bien dans l’éthique et l’exigence de ceux qui la pratiquent.

Tistou 04/12/2021 @ 17:43:01
Heureux tout comme toi.

Nance
avatar 05/12/2021 @ 01:27:35
Je ne suis pas très surprise...

Aaro-Benjamin G.
avatar 05/12/2021 @ 14:45:31
Bof, je ne vois pas trop de mal dans le fonctionnement.
La plupart des gens qui écrivent une critique sur babelio vont indiquer que le bouquin fait partie de ‘Masse critique’

Je ne crois pas que d’obtenir un livre gratuitement influence nécessairement l’opinion. Si les lecteurs étaient payés directement, ce serait une autre histoire.

Je suis beaucoup plus inquiet de l’éthique au sein des grands prix littéraires.

Saint Jean-Baptiste 05/12/2021 @ 15:25:28
Merci, Eric, c’est une très intéressante mise au point. Au moins on sait à quoi s’en tenir.
De notre côté, il faut se réjouir que notre site préféré, rassemble toujours une grosse majorité « d’amateurs passionnés », libres de s’exprimer sans contrainte.
Et il faut encourager nos modérateurs bénévoles à pourchasser les critiqueurs serviles et intéressés qui, inévitablement, essayeront toujours de s’infiltrer dans CL.

Septularisen

avatar 05/12/2021 @ 22:28:29

Merci pour cet article, qui certes date un peu, - Babelio c'est plus d'un million de membres actuellement (si, si vous avez bien lu) -, et ils n'ont d'ailleurs jamais fait un secret de leurs visées commerciales, notamment avec leurs opérations "Masse critiques", mais qui est toujours intéressant à lire.
Nous en avions d'ailleurs déjà parlé dans le forum sur les Prix Littéraires, si je me rappelle bien...

Par contre, je dois dire que 300 critiques par jour, ça laisse rêveur, d'ailleurs j'en avais aussi déjà parlé avec SJB au cours d'une de nos réunions CL annuelles à Bruxelles...

Débézed

avatar 07/12/2021 @ 10:49:08
Merci Eric mais tout cela est bien banal dès qu'il y a une opportunité à saisir les nouvelles technologie se l'approprient chacun croyant créer sa nouvelle start up à fort potentiel de développement. Le livre n'échappe pas à la règle de ces nouveaux marchés.

En ce qui me concerne, avec mes faibles moyens, je continuerai à faire parler des auteurs trop peu médiatisés mais pourtant souvent fort talentueux. Et quand je vois ma pile de livres en attente de lecture, je crois que mes petits efforts rencontrent un certain écho chez les auteurs méconnus et les éditeurs indépendants. Comme dit Jean-Baptiste la passion m'anime encore et ma récompense est l'amitié que j'ai souvent rencontrée derrière les livres.

Très heureux de retrouver ici des amis québécois que je n'ai pas salués depuis des lustres !

Nance
avatar 08/12/2021 @ 05:14:21
Très heureux de retrouver ici des amis québécois que je n'ai pas salués depuis des lustres !

Je rougis!

Si les gens sont transparents quand ils écrivent leur critique pour moi c'est le principal. En général, je pense qu'on a chacun nos goûts pour la lecture, alors j'essaie de ne pas trop me laisser influencer de toute facon, mais c'est pratique de lire les commentaires des autres pour situer le style de l'oeuvre. Ca m'arrive d'aller sur Booknode pour connaître des commentaires sur des livres non critiqués ici ou même de regarder des videos YouTube de livres souvent recu en PR, mais CL restera toujours mon petit coin chaud bien à moi. Ca me fait penser qu'il faudrait que je critique les livres que j'ai lu dernièrement mais j'ai la flemme.

En ce qui me concerne, avec mes faibles moyens, je continuerai à faire parler des auteurs trop peu médiatisés mais pourtant souvent fort talentueux. Et quand je vois ma pile de livres en attente de lecture, je crois que mes petits efforts rencontrent un certain écho chez les auteurs méconnus et les éditeurs indépendants.

Mais moi contrairement à DBZ c'est plus des romans chick-lit, érotiques ou fantasy minables (hehe) ou d'artistes hyper connus comme Shakespeare ou Agatha Christie... A chacun sa bataille.

Débézed

avatar 13/12/2021 @ 14:41:23
Bisou Nance !

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