Donatien
avatar 06/04/2020 @ 09:27:49
J'ai appris que Marcel Moreau, 86 ans, était mort samedi des suites du covid19!
Très grands souvenirs de lecture dans les années 80 et 90!
Sentiment étrange ce dimanche! Je venais d'entamer la relecture de 'L'ivre livre" . Et cela suite à notre discussion sur les bienfaits de la relecture de certaines oeuvres après de longue année "d'absence"!Je me demandais justement s'il était toujours vivant, si son corps avait tenu le coup, après ces longues années de lutte avec ses "instincts".
J'ai trouvé la coïncidence étrange. C'est ce livre là que j'ai choisi dans ma bib parce qu'il est un de ceux qui m'on fait aborder les "furieux" de la littérature, les surréalistes , ceux qui magnifiaient l'usage de la langue française.
Merci Marcel Moreaux.

Fanou03
avatar 07/05/2020 @ 10:27:54
Voilà un auteur que je ne connaissais pas mais je voulais signaler que dans le dernier numéro de mai 2020 du journal "CQFD" il y a un hommage à cet auteur sous la forme d'extrait/citation que quelques-uns de ses ouvrages.

L'article est intitulé "ne craignons pas d'être excessif". Et effectivement au vu de ces quelques extraits, Marcel Moreau donne l'impression d'avoir été un "furieux", un écorché vif farouchement attaché à son esprit critique et à la méfiance de nos modes de vie:

"Pour moi, vivre, c'est prendre de vitesse la décomposition, la juguler d'éclairs. Ceux de la révolte, ceux de la haine, s'il le faut, ceux de l'art, si c'est possible (...). C'est le début de l'ivresse mentale de toute façon, c'est-à-dire d'une vie plus insolente, rendue joyeuse, et rythmique par cette connaissance si nouvelle qu'est l'ignorance de l'inutile" (L'ivre Livre, 1973)

Donatien
avatar 07/05/2020 @ 17:56:06
Effectivement, c'est un choc lorsque l'on découvre la richesse et le tumulte de cette langue! Le contraste avec les romans de cette époque était saisissant. Une véritable fureur d'écrire.
Il suffit de citer quelques titres : "Bannière de bave", "Mille voix rauques" "La pensée mongole" Les arts viscéraux"Le sacre de la femme"."La terre infestée d'hommes", etc...
Il a été apprécié par Topor, Michjel Onfray, Claro, Anaïs Nin.....
Pour moi c'était un choc ...Une langue très riches, plein de néologismes, de mots enboîtés, aussi haletante que celle de Céline, aussi libre que celle d'Henry Millerr!
Difficile ensuite de lire des textes "normaux", à moins de rencontrer Claude Simon, aussi riche mais plus "maîtrisé"
mais impossible de lire encore "La marquise sortit à cinq heure...".
J'y replonge parfois et en ressort toujours aussi décoiffé!!!

Fanou03
avatar 08/05/2020 @ 15:30:50
Dis-moi Donatien, je m’interrogeai en te relisant et en relisant l’article que je citai de la nature des œuvres de Marcel Moreau: si je comprends bien ce n'est pas la fiction. Est-ce que se sont des essais où il développe des idées sur un thème particulier ? Le journaliste de CQFD parle lui de "pamphlets" pour qualifier les œuvres de Marcel Moreau. Merci de me renseigner !

Donatien
avatar 09/05/2020 @ 09:07:19
Voici ce qu'il disait :"L'écriture est une aventure.Il ne peut qu'en être ainsi.La mienne ne cesse de m'entraîner dans des contrées, des profondeurs, d'où je croyais ne jamais revenir.Elle s'y connaît à multiplier les pièges.Elle excelle à infester les pistes, à ouvrir les blessures.
Dans ce voyage au centre des entrailles, les rythmes qui soulèvent sont souvent ^promesses de vertigent qui terrassent. Mes mots sont une fête noire. Elle n'est si noire, sans doute, que pour m'obliger à la déchirer d'éclairs et autres foudroyantes beautés";

Je conseille de l'aborder par son "égobiographie" L'ivre livre ou un recueil de pensées, de réflexion dans "Le Charme et l'Epouvante".
Il est vrai que certains textes paraissent délirants, parfois même tenir de " l'art brut", mais quelle fête de la
langue française!!!!
Parfois pamphlétaire lorsqu'ils parlent des "rapetisseurs" ,éducateurs, religieux,petits chefs et autres "suppressibles"!

Il dit :"Je parle de l'écriture à la troisième personne.Cela signifie peut-être que j'en suis moins le maître que le jouet".
Sa mort m'a fait retrouver la sidération de la découverte de son écriture il y a plus de quarante ans.
En plus c'était un autodidacte!!!!
Attention, pas pour les âmes sensibles!
A consommer avec modération!
A+

Fanou03
avatar 11/05/2020 @ 10:39:46

Je conseille de l'aborder par son "égobiographie" L'ivre livre ou un recueil de pensées, de réflexion dans "Le Charme et l'Epouvante".
Il est vrai que certains textes paraissent délirants, parfois même tenir de " l'art brut", mais quelle fête de la
langue française!!!!


Merci pour tous ces conseils Donatien !
Je connaissais l'"Art Brut" pour les arts comme la peinture ou le dessin , mais je n'avais jamais entendu l'expression pour l'écriture, c'est intéressant comme perspective je trouve.

Patman
avatar 12/05/2020 @ 16:04:29
Marcel est parti.... pas d'abus d'alcool ni d'avoir fumé comme un pompier, non...il est parti victime de ce minuscule machin sorti de nulle part (ou d'un labo de Wuhan) un beau jour de printemps dans un hôpital de banlieue. Triste fin pour un personnage tel que lui. Marcel, je l'ai rencontré pour la première fois il y a près de 20 ans... Je l'avais invité pour une conférence à Bruxelles un peu sans trop y croire, n'imaginant pas qu'un auteur comme lui se déplacerait de Paris pour répondre à l'invitation d'un obscur défenseur des lettres belges comme moi...et pourtant il est venu. Il avait 65 ans environ à l'époque, mais il en faisait 20 de plus, un physique d'homme tané par la vie et ses excès, mais un esprit vif et aiguisé comme j'en ai rarement vu.
La conférence s'est bien passée et nous sommes allé boire un verre (enfin quand je dis un...), quelque peu enhardi et euphorique je me suis risqué à lui demander pourquoi il avait accepté mon invitation et gratuitement encore... "Mais enfin, me dit-il, tu es Borain comme moi ! Je ne pouvais pas te refuser ça !"....La suite de la soirée, nous l'avons passée à parler de Boussu, son village natal, voisin du mien...
Nous nous sommes revu par la suite à Paris, chez lui, rue Cambronne ("Tu imagines bien pourquoi j'ai choisi cette rue là !" m'a-t-il dit un jour) à quelques reprises. Notre dernière rencontre fut au Salon du Livre de Paris il y a 3 ou 4 ans environ...
Si vous allez fouiner dans Vos Ecrits, vous trouverez un texte que j'ai posté il y a longtemps, ça s'appelle "Ce soir on réveillonne..." et je l'ai écrit en revenant de chez lui ! .... à croire que son talent était contagieux !

Donatien
avatar 14/05/2020 @ 08:30:20
Chouette évocation Patman! Je crois l'avoir croisé à Bruxelles dans la brasserie "Chez Florio" lors d'une de mes équipées nocturnes, mais je ne sais plus quand! Et plus tard lors d'une séance de signatures dans je ne sais plus quelle librairie. Je voulais voir de près ce "phénomène viscéral"!, mais sans oser entamer une conversation.
J'ai été étonné d'apprendre qu'il s'était fait naturaliser Français!
Nostalgie.......

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