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Magicite
avatar 18/11/2017 @ 01:57:43
Salut, merci de vos gentils messages à mes précédentes élucubrations.
Je vois que côté exo vous chômez pas, alors bravo. Pas vraiment le temps ni le loisir d'amener mon râteau dans le bac à sable littéraire alors je recycle le seul texte qui me traîne sous la main. J'espère pas arriver comme un cheveu dans l'potage avec la dernière mouture de vos exos toute chaude de vos haleines littéraires et ce texte n'est pas vraiment un texte à visée littéraire, s'il est cryptique c'est plus une figure de style que je pense vous décrypterez aisément au bout de quelques lignes.
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Deux martiens à terre

Abattoir XX1 - les enfants sans croisade – en pensant à Kurt Vonnegut Jr. Et autres – Si vous lisez vous le regretterez peut être ou pas mais vous saurez ce qui est -

(Avertissement : toute ressemblance avec des personnes martiennes ou pas et des faits terrestres ou fictifs est possible, toute erreur dans les temps ou la conjugaison n'est peut être pas fortuite ou l'est).

Ce sont des jeunes martiens sur le sol. Je n'en ai jamais vu comme ça, ou plutôt je n'avais pas fait attention.
Ici ils sont proches des camps qu'ils ont fuit pour passer la frontière. Jeunes. Deux espérant passer inaperçus dans le train.

Je sais que peu de stations plus loin il y a des contrôles. 60 militaires, 15 gendarmes(est ce ceux qui ont lâchés les chiens il y a un mois? La violence monte à chaque fois d'un cran, dans le même temps les libertés et le respect des droits sont grignotés comme un petit biscuit par des dents avides), des policiers. Le chef de gare, la plupart du temps en retrait.
Dans ce village une histoire d'histoire. L'armée française vaincue par l'Italie.
Mis à genoux et désarmé par les armées de Mussolini puis réutilisé par Hitler le XXII bataillon de l'armée française de Pétain aux ordres de la Wechmacht est envoyée sur le front syrien. Certains désertent le désert et reviennent pour rejoindre la résistance. Ce fut le cas de Mohammed, Henry et certains autres. Eux furent fusillés parmi plus de trente personnes. 145 dans tout le département.

Il leur parle dans sa langue. Ils le regardent avec une curiosité apeurés, intrigués. Ils ont encore l'énergie de la jeunesse, du courage, un peu de bêtise. Beaucoup d'espoir, d'envie, de jeunesse.
Le plus volubile est le plus petit. Il a l'air si jeune. 15Ans? Plus peut être? L'autre est plus grand physiquement, plus terne et ne parle pas à l'étranger sur le quai sauf quand il s'adresse à lui directement.
Il leur dit après quelques présentations précipitées plus pour jauger leur compréhension que pour faire la discussion. Comment mettre des étrangers à cette terre en confiance en quelques mots? Impossible mais aujourd'hui pas de vigile déguisé à espionner les alentours, pas de dénonciateur bon citoyen fidèle à Pétain, pas d'estafette qui circule pour les rafles.
Vous devez éviter l'arrêt. C'est plein de militaires ils vont vous arrêter, vous renvoyer au quand de l'autre côté de la zone libre. Il se répète essayant de convaincre. Puis recommence en anglais en détaillant un petit peu, insistant sur l'arrestation et le nombre de militaires qui les attendent.
Il en a vu tant. Saisis par les autorités arbitrairement et sans être considérés comme des personnes, parce ce qu'ils sont martiens. Discussion étrange, par la maladresse de l'incompréhension des langages, l'insistance qu'il met à les avertir.
Tout les jours sur la ligne des petits groupes, des gros groupes, sont arrêtés, ahuris et déçus dans leur périple indigent, hors de leur planète. D'où viennent ils demande il autant par respect que curiosité. Marskistan réponds l'un, l'autre pressé aussi fait de même.

Le train arrive. Des écoliers en vacances, le centre aéré, attendent sur le quai. Il va vers les portes du train stationné en traversant les voies. Il pense qu'il a assez insisté. Espère que pour une fois ses conseils porteront. Mais ce n'est pas la voie de la facilité. C'est le seul chemin qui leur évitera d'être attrapé.
Un résistant saigne, allongé au sol. Il est rejoint par un villageois de la ferme où le franc tireur s'est rendu. Il demande en répétant deux fois sa question vivement :
Ils y a les allemands. Le local lui réponds que non il n'en a pas vu. Il sais qu'il parle des patrouilles de l'occupant.
Les cordes des fusillés plein de sang rendus raides et difficiles à défaire. Les soldats allemands menacent de leur arme, obligeant le jeune homme à les défaire sans les couper car les cordes doivent resservir. Pour d'autres pelotons d'exécution.
Le train roule. L'arrêt fatidique, surveillé, uber kontroles est proche. Il n'a pas vu les marskistanais descendre. Sans rage, avec la résignation de cette guerre absurde, de ces déportations et enfermements, éloignements quotidiens, violences journalières.
Le train est arrêté. Comme tout les autres qui se croyait martiens malin, comme tout ceux qui croyaient ils sont cachés dans les toilettes. C'est le premier endroit qu'ils vérifient, quand la prote est fermée le train à l'arrêt. Je ne décrirais pas le rituel indigne, institution de la défiance et de l'incarcération arbitraire, du délit de faciès. Tout les gens à la peau verte(martiens ou pas) sont conduits aux portes et interpellés. Avec les jeunes assis sur le côté, entourés de fusils automatiques tenus par des soldats en combinaison de camouflage du désert ou est ce l'inverse des fusils qui tiennent des hommes liés à obéir? Leur tenue de camouflage treillis paraît déplacée dans ce village campagnard où les habitants sont bonhommes, préférant ignorés ce qui se passe.
Leurs visages aux deux jeunes martiens du Markistan. Assis, entourés, résignés, apeurés, défaits et dans leur regard acerbe qu'ils lui retourne le temps que le train soit arrêté au quai est un mélange triste de honte de pas :'avoir écouté et indignation de s'être fait avoir, reproche pour lui et pour eux partagé.
Un homme alpagué par une policière en civil, ayant mis son brassard orange au dernier moment, est aussi sur le quai. Il est entouré de policiers et après une longue attente ou hésitation finit par sortir d'un minuscule porte-monnaie ses papiers d'identité. L'arrêt du train au quai est encore plus long que d'habitude. L'homme au teint vert basané remonte dans le train, enfin. Le train repart sous l'injonction d'un signe du bras.

Le soir même j'entends l'information à la radio.
Au Markistan une bombe a encore explosée, faisant de nombreux morts, m'informant & m'assurant que ces jeunes, à peine plus que des enfants, ont la mort au trousses et ici leur exil, leur éloignement de la zone libre, les camps et l'errance sans fin auxquelles les autorités répondent par la répression et la suspicion est bien leur seule espoir leur vie de martien, étranger par ignorance et négation de leur humanité.
Et les résistants et les totalitaires, les délateurs et les maquisards et les déportations redeviennent l'histoire de l'histoire.

Et les larmes devront être ravalées pour les fins de nuit sans lune, et la colère le gagne.

https://tempsreel.nouvelobs.com/monde/…

Magicite
avatar 16/01/2019 @ 20:51:04
J'avais écris ce texte il y a plus de 2 ans. Sur le coup j'avais besoin de le faire. Car après avoir vu certaines choses, avoir constaté l'illégalité de l'exécutif et sa violence(certes mus par une volonté politique) le soir en arrivant chez moi et ouvrant l'information sur l'attentat cité au dessus ayant eu lieu au Pakistan je pensait une vision du monde dont son venus les jeunes arrêtés devant moi. Et bien sûr au mépris de certaines lois sur les droits des mineurs et des personnes 'redirigés' vers l'autre côté et l'Italie où on a vu comment cette (non)décision politique à mené...
Sous la pression politico-médiatique un an plus tard les arrestations bien que toujours aussi nombreuses et arbitraires se sont plus pliés à cette chose qui nous permet de mieux vivre ensemble et l'aboutissement d'une évolution de la société: le respect de la loi. Dans les apparences en tout cas.
Ainsi je remarquait un pallier dans le contrôle, la surveillance et la répression. Sans disparaître il se revêtait de l'oripeau (qu'il ne doit jamais quitter) de la légalité ou avant femmes avec nourrisson dans les bras et mineurs l'étaient(contrôlés, surveillés, réprimés, arrêtés) sans qu'il fusse tenu compte des droits que la loi (dite aussi justice) est censé donner. Certes ce n'est tuojours pas le cas dans les faits, les politiciens savent biaiser, draguer l'électoralisme au mépris des droits et acquis comme de la constitution tout aussi nationale que la pensée des nationalistes les plus abjects.

Sospel est un village vieillissant où je passe souvent en train dans mes déplacements. Difficile d'accès par la route c'est un de ces villages qui peine pour que sa population ne diminue pas et où le bien-être d'y vivre est contrebalancé par le fait que la ruralité y est gagné par un déclin asymptotique de son économie.
Ce village entre montagnes et vallées fertiles qui font encore le bonheur de quelques éleveurs et maraîchers à pourtant une longue histoire. Plus récemment pendant les guerres du XXème siècle il fut envahit par les armées fascistes et soumis à la domination du régime nazie.
Ce sont les témoignages et actes des résistants dont je parle aussi dans ce texte. Si mon parallèle avec les armées de l'Axe et leurs exactions peut paraître douteux (même pour moi) il n'en est pas moins vrai que certaines politiques tout comme les totalitarismes de la moitié du XXème siècle nient l'individu. Et ça c'est que je veut combattre. C'est cela qui m'a choqué, peiné et ému. Mon émotion on s'en fout mais j'avais à sortir de moi quelque chose qui me fait souffrir, le constat de violence et de l'inhumanité menées par les dirigeants du monde. Quand ce soir là après avoir encore vu cela et ouvert les infos sur l'attentat au Pakistan ce texte (aussi mal écrit et rugueux ou douteux puisse il-être - il existe des versions corrigées dont une par une russe qui écrit mieux français sans fautes que moi est parue dans un fanzine local- ) j'ai eu une vision fugitive, un instantané, de leur quotidien. Et j'avais à exorciser mon ressentit, ce qui donna la première version de ce texte et aussi quelques remarques que j’adressai à mot couvert à des militaires en armes gardant 4 ou 5 jeunes avec plusieurs armes braqués sur eux sur un quai de gare en plein soleil. à mes citations de Montesquieu sur l'esprit des lois ou de Einstein sur les militaires ("n'ayant besoin que d'un système nerveux et d'une colonne vertébrale pour marcher au pas") qui me répliquèrent de me taire et furent remplacés par des policiers plus à même de gérer des citations littéraires...enfin plutôt de se salir les mains en menaces et intimidations.

L'année suivante l'année où naquit ce texte les choses évoluèrent encore dans les formes des contrôles et présences policières...en pure inutilité comme un cache-misère, en tout symbolique pour assurer les gens effrayés par les actes des extrêmes(qui faut-il le rappeler, c'est aussi le but de mon texte, ne sont pas l’œuvre de migrants à qui sont refusés les statuts de réfugié, voire d'humain).

Et aujourd'hui à l'aube d'un débat et de ses clivages et visions divers je pensait intéressant de rappeler mes réflexions de ces moments là.

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