Saule

avatar 24/07/2004 @ 20:21:27
Je n’ai lu que ce livre de Nietzsche. Je le dis dans ma critique, j’ai eu l’impression qu’il avait été écrit par un détraqué.Sur ce site il y a des personnes que j’admire (Pendragon, S-G-d-P, Sahkti pour ne citer qu’eux) qui ont un avis différent, et donc humblement je me doute bien que la pensée de Nietzsche m’échappe en bonne partie. C'est dire que sur le fond je peux difficilement discuter.

Par contre ce qui m’avait frappé, c'est que quand Nietzsche parle de religion, il est - comment dire ? - et bien complètement à coté de la plaque. Comme si il parlait de choses qu’il ne comprenait pas. Et qui n’ont rien à voir avec ce que moi j’expérimente de la religion.

La critique de El Barjo, c’est exactement la même chose. Un avis intéressant sur certains points mais dès qu’on en vient à la religion c’est complètement à coté de la plaque (même insultant, provocation oblige). Si on ne parle pas de la même chose ça n’a plus beaucoup de sens de discuter, c'est évident, cependant je ne peux pas m’empêcher de réagir à deux ou trois énormités.

A propos du célibat des prêtres : vu que tu es fermé à la spiritualité il ne te vient pas à l’esprit que des gens puissent renoncer librement aux plaisirs de la chair pour la simple raison qu’ils reçoivent des grâces spirituelles d’un niveau plus élevé. Tu pourrais lire par exemple le récit des extases vécues par Sainte Thérèse d’Avila, ses ineffables expériences de ravissements d’âme : c’est à des années lumières des récits d’une Catherine M. ou des mémoires de Rocco Siffredi (enfin je ne sais pas si ça existe). Plus simplement, si tu as la chance de tomber vraiment amoureux, tu verras que le sexe ce n’est pas tout, que l’amour transcende le sexe et tu comprendras peut-être que des gens puissent préférer l’amour de Dieu qu’ils ont connu et auquel ils croient, qu’ils puissent préférer cet amour donc, aux choses de la vie.

Pour ce qui concerne l’asservissement, et cette histoire d’agneaux soumis et obéissants : cet aspect m’avait intéressé dans le pamphlet de Nietzsche. La réponse est dans la liberté Divine, une fois que tu en as fait l’expérience tout s’éclaire. A nouveau l’incompréhension entre croyant et non-croyant rend le dialogue impossible ici (A tel point qu’une lectrice du site, athée, voyait dans la partie Le grand Inquisiteur des « Frères Karamazov » un déni de Dieu).

Je te donne une citation qui, moi, m’interpelle : « Vous dites : Je suis riche, je suis comblé de biens; et je n'ai besoin de rien, et vous ne savez pas que vous êtes malheureux et misérable, et pauvre, et aveugle et nu. » (Apocalypse 3,17). En fait le moment où tu te rends compte que tu es faible et nu, tu deviens grand. Car tu te tournes vers ce quelque chose qui nous dépasse et qu’on appelle « Dieu ». Alors ta vision des choses change. Etre faible, demander pitié, renoncer à soi-même : même beaucoup de croyants ont du mal avec ces notions, il faut je crois recevoir des « grâces », faire au moins une certaine expérience du sacré, pour que cela prenne du sens. Mais clairement c’est une dimension qui a complètement échappée à Nietzsche.

Sahkti
avatar 24/07/2004 @ 21:27:09
A propos de Nietzsche et de cet aspect "à côté de la plaque" sur la religion, évidemment, je voudrais réagir, mais Nietzsche, c'est sanguin chez moi, donc il faut que je me pose un peu :)
Ce qu'il écrit n'est pas à côté de la plaque. La religion, il la côtoyée de près et en a été dégoûté au point de la démolir comme on peut le lire. (A propos de religion, je conseille à Saule mais aussi à d'autres la lecture du "Catéchisme de l'honnête homme" de Voltaire).
Nietzsche a d'abord cru dans le rôle libérateur de la religion, dans cette formidable bouée de sauvetage constituée par l'arrivée de Jésus et son honnêteté. Il a pensé que l'homme allait pouvoir se libérer de sa condition d'être humain asservi à ses besoins et à une société de plus en plus mécanisée et inhumaine et trouver une paix intérieure, mais force lui a été de reconnaître (et je partage son avis) que la religion est souvent une contrainte, un dogme qui emprisonne les hommes dans quelque chose de pas vraiment libérateur. Ce n'est que mon avis très personnel à propos de la religion et je respecte les convictions de chacun, mais pour avoir "essayé" (et pas qu'un peu) catholicisme et protestantisme, je ne compte pas changer d'avis de sitôt!

Tu as raison Saule de dire que Nietzsche ne comprend pas, mais ce n'est pas la religion qu'il ne comprend pas, c'est le rôle qu'elle joue et il faut bien reconnaître, en contemplant d'un regard dépité les siècles derrière nous ou les années actuelles que la religion a trop souvent été la cause de violences, de discriminations ou d'actes inqualifiables. Faut-il pour autant la bannir? C'est le choix que Nietzsche a fait. Il ne comprend pas qu'au nom d'un dieu qu'on travestit, on puisse asservir ou avilir, alors que ce dieu se proclame amour et bonté. Le message originel de Jésus était simple, il a été récupéré et transformé (je suis pratiquement d'accord avec toutes les critiques de Nietzsche contre Saint Paul). Cela n'empêche pas les gens d'accéder à la grâce spirituelle, seuls ou avec l'aide d'une quelconque église, mais aux yeux de Nietzsche, le naturel n'y est plus, tout ceci est savamment organisé et il refuse de croire à ce qu'il considère comme un mensonge et une mascarade. Cela le fait sans doute passer à côté de certaines choses qui t'interpellent et le nihilisme n'est pas le courant le plus gai ou le plus constructif qui existe, certes. Quoique... j'ai toujours trouvé que le nihilisme, qui passait d'abord par une acidité à toute épreuve et une noirceur assez étonnante, ne pouvait que forcer la réaction. Nihilisme ne rime pas avec Aquoibonisme, mais ceci est un autre débat plus large que celui de Nietzsche et la religion.

Il faut aussi garder à l'esprit que l'Antéchrist fut la dernière réflexion profonde de Nietzsche sur lui-même avant ses délires et ce qu'on nomme folie (mais était-ce vraiment de la folie...). Nietzsche a lancé un appel, a cherché un espèce de sauveur avant de définitivement sombrer et il ne l'a pas trouvé, sa colère et son mépris n'en furent que plus grands. Nietzsche a rédigé ce texte comme il le ressentait, le vivait, on y dénombre d'ailleurs certains contradictions ou incompréhensions mais celles-ci sont le reflet de la pensée désordonnée qui envahissait alors le philosophe. Il s'y trouve un besoin de retourner à la source, de retrouver le message purificateur et dénudé de Jésus, de se débarrasser de tous les falbalas religieux pour aller à l'essentiel (un peu ce que les protestants ont voulu faire à une époque, en se plantant remarquablement, foi de genevoise!). La faute originelle, ce n'est contre elle que se rebiffe Nietzsche, c'est contre ceux qui s'en servent pour tenir les hommes dans leurs mains ou faire porter sur leurs épaules toutes les misères du monde, les grands coupables d'un péché dont on ignore encore beaucoup.

Saule

avatar 24/07/2004 @ 22:40:26
Dans "Les frêres Karamazov", à la fin de la dithyrambe d'Ivan dans la partie "Le Grand Inquisiteur", Aliocha s’étonne. « Mais…. c’est absurde ! s’écria-t-il en rougissant. Ton poème est un éloge de Jésus, et non un blâme…comme tu le voulais. »

A te lire j'ai envie de dire "Mais c'est absurde, ce Nietzsche aime Jésus !" D'ailleurs El Barjo dit que Nietzsche reproche à Jésus d'avoir trop peu vécu, mais n'oublions pas que c'est parce que les hommes l'ont tué.

Alors un message formidable mais que l'homme ne peut pas assumer, je suis tout à fait d'accord, n'empêche que je veux espérer. Comme Sylvie Germain qui mentionne les impropères, une plainte de Dieu contre son peuple qui semble incapable d'assumer la liberté octroyée. (dans "Les échos du silence", que j'ai découvert grâce à toi).

Je crois qu'on a bien compris qu'il faut distinguer entre la religion (son dogme et sa doctrine) et l'expérience religieuse d'autre part.

Le message originel de Jésus était simple, il a été récupéré et transformé (je suis pratiquement d'accord avec toutes les critiques de Nietzsche contre Saint Paul)

Il y a pas mal de critiques contre l'église. Je suis conscient des défauts de l'église et du rôle néfaste joué dans le passé. Dans mon cas personnel j'ai pris l'optique de Saint Augustin. Je suis confronté à quelque chose qui me rend heureux et qui donne un sens à ma vie et du coup je décide de prendre en bloc toute la doctrine catholique (si j'avais été arabe ça aurait été la religion musulmane), ce qui implique une forme de respect pour l'église. Alors c'est vrai que je me sens un peu concerné, et que j'essaye de défendre l'église quand je peux même si je me rend compte que tout n'est pas parfait et que beaucoup d'abus on eu lieu au nom de la religion.

Mais je crois aussi que le religieux est un besoin fondamental de l'homme et que l'évacuer totalement n'est pas vraiment une optique

J'ai du mal à comprendre les critiques contre Saint Paul, mais je n'ai plus le livre en tête. Je peux imaginer que dans certains textes Saint Paul donne une interprétation un peu dirigée de l'évangile (il essaye de convaincre d'autres cultures) mais je ne saurais pas comme ça entrer dans une discussion de fond. Il n'empêche je vais essayer d'approfondir, pour moi.


Cela n'empêche pas les gens d'accéder à la grâce spirituelle, seuls ou avec l'aide d'une quelconque église, mais aux yeux de Nietzsche, le naturel n'y est plus, tout ceci est savamment organisé et il refuse de croire à ce qu'il considère comme un mensonge et une mascarade

Si tu atteins à la grâce tu touches au domaine du surnaturel, alors oui le naturel n'y est plus. Mais si l'expérience est sincère il n'y a aucunement mensonge, ni mascarade.

Mais vraiment ton avis m'intéresse au plus haut point car c'est frustrant de lire un grand penseur et d'avoir l'impression d'être dans un autre monde que lui. Avec tes commentaires ma vision est différente même si ce qui m'avait le plus choqué, sa société élitiste et son rejet de la faiblesse et de la compassion, reste toujours une solide réserve à son égard.

Sahkti
avatar 25/07/2004 @ 09:55:20
Nietzsche aime Jésus, il ne le blâme pas, mais ce qu'il reproche, c'est ce qu'on a fait du personnage, sur le plan physique bien sûr, mais surtout ensuite, de son message qui a été récupéré, transformé en arme de maintien et de contrainte, aux antipodes du message originel d'amour et d'espoir.
Jésus était, aux yeux de Nietzsche, un homme simple et sincère qui a délivré le plus beau message en offrant sa vie dans l'espoir que les hommes en feraient quelque chose. C'était accorder beaucoup d'intelligence et de bonté à l'humanité qui n'a (évidemment ai-je envie de dire face aux leçons de l'Histoire qui se répètent) pas su en tirer les bénéfices nécessaires.
De là, Nietzsche commence à en vouloir à Jésus, à lui reprocher d'avoir cru trop fort (au point de donner sa vie, ce n'est pas rien sur un plan symbolique) en la perfectibilité de l'homme, dans son intelligence et sa capacité de compréhension et de construction.
Il y a une espèce de rage de Nietzsche derrière tout ça, il en veut à Jésus de s'être gâché de la sorte et s'en prend davantage à l'église d'avoir par la suite transformé et déformé les volontés réelles de Jésus.

Pourquoi ne pas en vouloir à l'homme
uniquement plutôt qu'à Jésus? C'est une question que l'on pourrait légitimement se poser surtout en possédant la foi, mais voilà, pour Nietzsche, l'homme n'est pas perfectible, l'histoire le prouve, l'âme humaine est faite de rien et l'homme semble aimer aller vers le néant ou l'éternel recommencement sans réel avancement.
Cette vision quelque peu noire du monde a poussé Nietzsche à développer sa théorie de l'élitisme, que tu désapprouves.
Sur ce point, force est de constater que la pensée de Nietzsche se rapproche du courant ultralibéral (un comble pour Nietzsche quand on y pense!) ou maçonnique (même si ils pensent que l'homme est perfectible, ils s'appuient essentiellement sur l'élitisme de la société).
Il existe une catégorie d'êtres qui disposent de la science, de la culture, de l'intelligence, de l'argent, bref des places dominantes dans la société. En face, il y a les autres, ceux qui ont moins ou rien. L'homme n'étant pas ou peu perfectible, cette distinction de classe ne peut que persister. Contrairement à Marx qui pousse à la révolte contre les différences de classes sociales, Nietzsche appelle à la résignation. Le sursaut doit venir mais il faut être conscient qu'on n'évoluera que dans un cercle fermé, celui auquel on appartient. Bon, je résume beaucoup en disant cela, Nietzsche est plus subtil dans le développement de ses idées.
En découle ce rejet de la compassion et de la faiblesse, auquel tu fais allusion. Pourquoi se plaindre ou plaindre si ça ne changera pas fondamentalement la société? N'est-ce pas une perte de temps? Le reflet de la non-acceptation d'une condition sociale qui nous a été imposée et dans laquelle nous sommes entretenus à grands coups de sermons par la religion, qui a perdu son sens de base, à savoir l'amour de chacun et l'égalité de tous, au profit d'une hiérarchie scellée, de dogmes et de contraintes muselant le plus petit, qui attend patiemment son heure, même dans la misère, en espérant obtenir une place au paradis.

Tu as raison quand tu dis que l'homme est profondément religieux. Nietzsche le pensait également, il a eu, comme d'autres, besoin de repères, d'un sens à sa vie, de quelque chose de profond en quoi il pourrait croire et qui le guiderait, surtout au moment de ses errances mentales (n'oublions pas que l'Antéchrist a été rédigé au début de celles-ci). Il a cherché mais n'a pas trouvé, la religion ne lui convenait pas telle qu'elle se présente aujourd'hui, elle a été défigurée et il a refusé de faire les compromis que d'autres font, à savoir tout prendre en bloc parce qu'il vaut mieux un peu de bon et aussi du mauvais que rien du tout. Impossible de faire ça avec Nietzsche, son esprit se laisse submerger par les critiques et suivent alors déception, amertume, colère et rage. Et on connaît le caractère de Nietzsche, il ne fait pas de quartiers quand il est déçu par quelque chose.

A propos de Saint Paul, je vais essayer de simplifier car c'est un long combat que mène Nietzsche contre lui et qu'on retrouve dans la plupart de ses textes.
Tout d'abord, Nietzsche refuse de croire que la conversion quasi miraculeuse de Paul/Saül soit réelle. D'abord parce que la vision que Paul a eu de Jésus (lumière aveuglante, voix d'outre-tombe, scénario à la hollywoodienne...) lui semble peu crédible (elle n'a été rapportée que par Luc, le fidèle secrétaire de Paul, et jamais par les apôtres officiels) et surtout parce que Paul était réputé pour ses exactions contre les premiers chrétiens (il a approuvé et accepté sans broncher la lapidation d'Etienne, par exemple) en tout bon pharisien fanatique qu'il était.
A la lecture des textes, apocryphes ou non, contemporains de Jésus, on ne peut que constater que Paul n'était pas un brave homme mais un monstre de violence et ses premiers voyages, ses premières missions d'évagélisation sont teintées d'intolérance et de violence, des principes auxquels n'adhérait pas Jésus. Nous y voilà... Nietzsche reproche à Paul d'être le premier à avoir trafiqué le message de Jésus (cet être exceptionnel qui a offert sa vie et a demandé un sursaut d'espoir et d'amour aux hommes, selon lui) en allant imposer la religion chrétienne aux communautés juives de par le monde. Jésus voulait rassembler, Paul a imposé un christianisme qui n'a pas grand chose à voir avec la volonté réelle de Jésus. C'est vrai que les actions de Paul sont quelque peu maladroites, violentes, intolérantes, on peut sans problème dire de lui qu'il fut le précureur des missionnaires évangélisateurs coloniaux qui ont fait les dégâts que l'on sait.
"Ce que Paul devina, c'est comment on peut allumer un incendie universel à l'aide du petit mouvement de secte chrétien en marge du judaïsme" dit Nietzsche. Il lui reproche d'être opportuniste et manipulateur, de travestir à son profit en prétextant le bien-être du plus grand nombre. Paul ne pensait pas à Jésus mais à lui-même en agissant comme il le faisait, question d'amour propre, de fierté et de satisfaction personnelle.
Paul a, prétend-il dans ses lettres, rendu vie à Jésus, il l'a ressucité dans l'âme de chacun. Grosse colère de Nietzsche! Rendu la vie? Trafiqué sa parole, oui! Le christ a donné sa vie et Paul répand la bonne parole en son nom, une parole que Jésus désapprouverait à coup sûr selon Nietzsche: "Saint Paul a rétabli en pire tout ce que le Christ avait justement annulé par sa vie, le christianisme est devenu quelque-chose de foncièrement différent de ce que fit et voulut son initiateur. L'Église appartient au triomphe de l'antéchrist, tout aussi bien que l'État moderne, que le nationalisme moderne".

Saule

avatar 25/07/2004 @ 20:44:03
Merci pour ton avis de spécialiste, circonstancié et qui m'éclaire beaucoup.

Je ne dirais pas qu'il me fait aimer le personnage mais il me le rend plus sympathique. D'ailleurs un homme qui aime Jésus ne peut-être fondamentalement mauvais. Il faudrait que je lise d'autres de ses livres certainement, et puis que tu te décides à critiquer "Ainsi parlait Zarathoustra" :-)

Je me souviens aussi que dans son livre "Les consolations de la philosophie" Alain de Botton présente une facette nettement plus positive de la théorie de Nietzsche : il explique que parfois il faut accepter de souffrir pour devenir meilleur, illustrant par la belle image de celui qui veut s'élever de la plaine vers le sommet et jouir de la belle vue, et qui forcément doit accepter de se donner du mal pour y parvenir.

Par contre l'élitisme je suis viscéralement contre, il y a déjà eu pas mal d'empoignades sur le sujet sur ce site (dommage que Pendragon soit en congé, il pourrait confirmer).

Pour Saint Paul, je prends note de ce que tu dis, avec intérêt. Je vais avoir du temps pour relire tout ça les mois qui viennent. Mais je ne pense pas que je vais souscrire à la vision Nietzschéenne de Saint Paul, simplement parce que j'ai en tête quelques paroles de Saint Paul sur l'amour qui sont particulièrement belles. En outre je trouve le récit de la conversion de Saul un épisode particulièrement touchant et criant de vérité (quoique teinté de symbolisme).

Benoit
avatar 26/07/2004 @ 22:32:21
Merci pour ce débat fort intéressant. Moi qui pensais mettre mon nez dans Nietzsche sans oser faire le premier pas, maintenant, j'ai très envie de le lire!

Saule

avatar 26/07/2004 @ 23:28:08
Merci pour ce débat fort intéressant. Moi qui pensais mettre mon nez dans Nietzsche sans oser faire le premier pas, maintenant, j'ai très envie de le lire!

Oui mais je pense que l'Antechrist (le seul que j'ai lu) n'est pas approprié pour commencer.

Sahkti, lequel faut-il lire alors ?

A propos, Yali on avait sorti une bonne dans un forum. Il mentionnait un auteur auquel on demande ce qu'il pense du philosophe. Cet auteur répond : Nietzsche ? C'est quelque consomnes en trop...

Sahkti
avatar 27/07/2004 @ 10:24:45
Dans les premiers Nietzsche à lire, je conseillerais l'incontournable "Ainsi parlait Zarathoustra", ainsi que "Le Gai savoir" ou "Ecce homo".
On peut ensuite s'attaquer à "La généalogie de la morale" et apprécier la "Deuxième considération intempestive" de Nietzsche, un régal.

Yali 27/07/2004 @ 13:24:46
Mieux vaut les citations exactes Saule :
« Nietzsche. Ce que j'en pense ? C'est qu'il y a bien des lettres inutiles dans son nom. » disait Jules Renard
Et aussi
Lorsqu’un élève demanda un jour à Cioran où il en était par apport à Nietzsches, il répondit qu’il avait cessé de pratiquer depuis longtemps, parce qu’il le trouvait trop naïf. Il ajouta :
« Je lui reproche ses emballements et jusqu'à ses ferveurs. Il n'a démoli des idoles que pour les remplacer par d'autres. Un faux iconoclaste, avec des côtés d'adolescent, et je ne sais quelle virginité, quelle innocence, inhérentes à sa carrière de solitaire. Il n'a observé les hommes que de loin. Les aurait-il regardés de près, jamais il n'eût pu concevoir ni prôner le surhomme, vision farfelue, risible, sinon grotesque, chimère ou lubie qui ne pouvait surgir que dans l'esprit de quelqu'un qui n'avait pas eu le temps de vieillir, de connaître le détachement, le long dégoût serein. »

Sahkti
avatar 27/07/2004 @ 14:38:14
Cioran a toujours préféré la passion et Nietzsche le recul. Dans leur cas, c'était incompatible.

Saule

avatar 27/07/2004 @ 14:45:40
Cioran a toujours préféré la passion et Nietzsche le recul. Dans leur cas, c'était incompatible.

Je n'ai pas lu Cioran, mais à lire la citation j'aurai cru le contraire :."Je lui reproche ses emballements et jusqu'à ses ferveurs"

Yali 27/07/2004 @ 14:51:03
Cioran a toujours préféré la passion et Nietzsche le recul. Dans leur cas, c'était incompatible.


Je trouve ça trés juste Sahkti, mais j'aurais plutôt dit Cioran était au monde, Nietzsche : en dehors. Non?

Sahkti
avatar 27/07/2004 @ 15:04:20
Oui c'est vrai Yali. On pourrait préciser que les deux ont voulu comprendre le monde mais comme Nietzsche n'y a pas trouvé ce qu'il y cherchait, il s'en est éloigné et à créé une vision plus universelle de l'humanité. Cioran, de son côté, a investigué la profondeur de l'âme et pour ce faire, on ne peut utiliser l'arme du recul ou de la généralité.
Cela ne m'empêche pas des les apprécier autant l'un que l'autre, avec un certain attachement que je reconnais volontiers envers Nietzsche, à cause de ses blessures à l'âme et de sa fragilité qu'il cache si mal dans ses textes. C'est un homme qui a été profondément meurtri par les attaques dont il a été victime, il a essayé de se justifier mais ne pouvait que théoriser et généraliser car il refusait de tout ramener à lui. Sa pensée y aurait peut-être cependant gagné en compréhension pour certains, qui auraient, enfin, découvert un Nietzsche bien plus humain qu'on ne le pense.

El Barjo 28/07/2004 @ 11:32:12
Réponse à Saule.
Bon, j'admet que j'ai "un peu" critiqué les dogmes de la religion catholique, notamment le célibat des prètres et toute l'hypocrisie qui s'y rattache. Je m'explique : qu'ils disent non à la chair c'est pas vraiment ça qui posent ici problème. Chacun fait ce qu'il veut. Et je conçois qu'il y peut y avoir une certaine forme de spiritualité dans l'abstinence. Le problème c'est toutes les déviances que ça engendrent. C'est un problème qui s'est posé très tôt dès le onzième siècle avec la séparation de l'eglise en deux partie, l'une romane et une autre orthodoxe, puis avec Luther et Calvin je crois et la naissance du lutherisme et calvinisme puis du protestantisme et qui a amené aux guerres de religion.
Et je vais te dire ma petite Saule, tout ça annonce l'essor de la philosophie qui va enfin se défaire des sangles d'une religion austère et infondée qui les museler jusque là. Je peux citer Rousseau converti au catholicisme dans sa jeunesse mais qui va se rétracter pour croire à Dieu, eh oui, parce qu'un chrétien ne croit pas en Dieu et pas non plus à Jésus mais à ses successeurs, et pas aux successeurs directs, puisqu'au départ les premiers chrétiens avaient tous le droit de se marier vu que ils étaient plein d'amour et qu'il n'y avait pas encore de viellards obtus et pessimistes pour énoncer des dogmes farfelus et méprisant (le célibat des prêtres, mais pas seulement, il faut obligatoirement que ce soit un homme, l'Inquisition, la chasse aux impis et aux sorcières, le prosélithysme qui va amener à la conversions forcées de pauvres indigènes qui préféreraient des écoles à des églises et j'en passe).
Et pour reparler de Nietszche, on s'est pas compris, j'ai écrit qu'il avait dit que si Jésus avait vécu plus longtemps, il aurait été mille fois plus joyeux, parce que c'est vrai quoi, Jésus était très triste dans sa vie et il n'est fait mention nulle part qu'il ait jamais rigoler, à croire qu'il aurait fait la gueule toute sa vie. Moi je veux croire à un Jésus qui rit et qui danse (sans sexe et sans femme si il veut), un homme heureux quoi. C'est pour ça que je pense que son message a été perverti par les hommes tellement qu'aujourd'hui il est obscure (il prône l'amour et promet que les méchants seront sévèrement punit sans aucune pitié, à n'y rien comprendre).
Ne crois peronne, parce que personne ne sait au fond, et tout ce qu'on sait on le sait parce qu'on l'invente. Je ne dis pas qu'il n'y a pas de vérités essentielles à atteindre en ce bast-monde, je dis seulement que ce qui a été mal batti doit être détruit puis reconstruit de manière à ce qu'elle ne s'effondre jamais. A ton avis pourquoi les gens désertent les églises ? Parce qu'ils ont compris que ça ne rimait à rien de forcer un prètre à l'abstention sexuel, on peut être un être sexué et honorer Dieu des meilleurs façons possible. On prouve son amour à son Dieu en étant bon avec soi et avec les autres et en respectant sa femme et ses enfants et en s'attelant à la tâche sans répit pour faire honneur à sa vie et en faire un exemple. Dis moi où est la grandeur à être un éternel abstinant sexuel ? Il n'y en a pas, alors pourquoi ce dogme intransigeant ? Sous prétexte qu'il faut bien s'occuper de nos cathédrales vous en faisez de ermites loin du peuple qu'ils sont censés représenter. Et plus les jours avancent moins ils ont le choix, ils voudraient tout plaquer qu'ils ne pourraient plus, parce qu'ils ne savent rien faire d'autres. Alors ils vont mentir, par paresse ou par peur, la peur que vous aurez mis dans leur coeur. Voilà ce qu'on récolte à trop obéir aux traditions (Jésus lui est le symbole de la lutte par excellence avec Gandhi) .
"Respecter la tradition et chercher la nouveauté" nous apprend Tagore. Loué soit le fermier qui travaille sa terre par amour de Dieu. Saule, ce n'est pas les prètres que je méprisent, c'est vous tous qui croyaient en Dieu sans esprit critique, ou alors c'est que vous ne croyiez pas en Dieu, vous croyez en des bouquins, et Dieu n'est pas un livre. Loué soit l'âme solitaire qui va s'isoler et chercher Dieu, comme Jésus s'est isolé et comme il a trouvé Dieu. Tu ne reconnais toujours pas que forcer le célibat aux prêtres est injuste, tant pis pour toi. Laisse un vieillard en robe blanche diriger ta vie si le coeur t'en dit, et boit ses paroles, mais ne dit pas que c'est Dieu qui a dit ça. Voilà ce que Dieu a dit : "Aime-moi et aimez-vous les uns les autres". C'est vous qui toujours compliquez tout.

Sahkti
avatar 28/07/2004 @ 11:52:30
"ma petite Saule"...
Hé hé, désolée, je n'ai pu m'empêcher de rigoler :))

Barjo, les propos que tu tiens sont personnels et c'est ton bon droit, certes, mais je ne pense pas que l'on puisse coller de telles affirmations à propos d'une vie plus longue de Jésus dans la bouche de Nietzsche. Ce dernier ne fait absolument pas allusion à une quelconque gaieté de Jésus (qui a écrit que Jésus était un homme tout le temps triste?! Et où?).
Simplement, si Jésus avait vécu plus longtemps, il aurait (peut-être) pu empêcher cette dérive de son message de base contre laquelle ne décolère pas Nietzsche.

Saule

avatar 28/07/2004 @ 11:55:00
Saule, ce n'est pas les prètres que je méprisent, c'est vous tous qui croyaient en Dieu sans esprit critique, ou alors c'est que vous ne croyiez pas en Dieu, vous croyez en des bouquins, et Dieu n'est pas un livre.

El Barjot tu ne peux jamais préjuger de la foi des autres. Tu es visiblement en recherche, c'est très bien, mais essaye de comprendre que d'autres sont à d'autres stades que toi dans leur cheminement.

Les prêtres : tu avais été injurieux dans ta critique éclair. Tu penses et tu dis ce que tu veux mais reste poli.

Saule

avatar 28/07/2004 @ 12:04:07

Ce dernier ne fait absolument pas allusion à une quelconque gaieté de Jésus (qui a écrit que Jésus était un homme tout le temps triste?! Et où?).
Simplement, si Jésus avait vécu plus longtemps, il aurait (peut-être) pu empêcher cette dérive de son message de base contre laquelle ne décolère pas Nietzsche.

Et je le répète si Jésus n'a pas vécu plus longtemps c'est parce que les hommes l'ont tué. Comme on a tous tendance à le faire dans notre vie.
Jésus triste ? C'est parce que tu confonds la gaité et la joie profonde. Alors pour toi quelqu'un qui ne rigole pas en buvant des bières et en ayant du sexe est triste.

El Barjo 28/07/2004 @ 16:06:30
Sahkti, douterais-tu de moi et de ma bonne foi ? Sache que j'ai lu ça dans "Ainsi Parlait Zarathoustra", un livre d'ailleurs dont tu conseilles la lecture mais que tu n'as vraisemblablement pas lu ou alors uniquement survolé. Et là à mon tour je ris. Et si tu doute encore, voici le passage en question extrait du chapitre "De la mort volontaire" :
"Pourquoi n'est-il pas resté au désert, loin des bons et des justes! Peut-être aurait-il appris à vivre et à aimer la terre et aussi le rire ! Croyez m'en mes frères ! Il est mort trop tôt, il aurait lui même rétracté sa doctrine, s'il avait vécu jusqu'à mon âge ! Il était assez noble pour se rétracter".
Maintenant revenons à toi ma grande Saule. Tu dis que je me cherche mais que d'autres se sont trouvés. Et bien si toi tu t'es trouvé, j'espère ne jamais me trouver. Et riez mes amis, il n'y a que ça de vrai dans la vie. Rire et danser. Ecoute, y'en a ras le bol des chansons en latin, je veux du jazz et je veux de la soul, je veux de la joie et je veux pouvoir taper du pied et pouvoir claquer des doigts. Je dis que Jésus était triste, j'aurais pu dire méprisant si tu préfères. Il attendait trop des hommes, il a été déçu et il a été tué. Et je sais bien sûr qu'il a été crucifié, mais n'empêche quand même qu'il est mort trop jeune. Continuez à croire aux papes&co si ça vous dit, ils peuvent croupir avec leur or, si Jésus était là il aurait honte, lui qui pronait la pauvreté. Et va dire à Socrate et va dire à Rousseau et à Sartres qu'ils ne se sont pas trouver comme moi j'ai l'air de ne pas m'être trouvé, et on verra bien ce qu'ils trouveront à te répondre.
Cherche toujours, c'est le meilleur moyen de ne pas te tromper.

Monique 28/07/2004 @ 16:26:23
=> forum des livres, "honte"...

Sahkti
avatar 28/07/2004 @ 16:48:43
Autant parler de Nietzsche avec Saule m'a intéressée, autant avec toi, je sens d'avance le débat clos et stérile. Je ne perdrai donc pas mon temps à disserter sur cet ouvrage que tu m'accuses (à tort!) de ne pas avoir lu.

Par ailleurs, ton discours sur l'église, les prêtres, l'amour et gnagnagna ressemble de plus en plus à des balivernes de beau parleur du vide devant l'Eternel. C'est pas souvent que je m'énerve dans un forum, mais là, quand je lis tes propos disséminés ci et là sur ce site, j'ai l'impression de causer à un môme de quinze ans qui prétend révolutionner le monde et avoir la science infuse. Tu te poses en juge, tu n'hésites pas à critiquer les convictions personnelles des autres et à attaquer des domaines subjectifs par excellence, à savoir la foi ou la quête personnelle.

La prochaine fois, avant d'extirper une seule phrase d'un bouquin qui en comporte des milliers, réfléchis un peu et essaie d'en tirer autre chose qu'une conclusion hâtive. A moins que tu ne me sortes un texte fulgurant et indéit de Nietzsche sur la question?!

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