Henri Vernes par Sorcius, le 21 avril 2002

Charles Dewismes (Henri Vernes) est né à Ath (Belgique) le 16 octobre 1918 à 10h du matin. Il n'y restera que quelques semaines et passera toute sa jeunesse à Tournai.

Tout d'abord, imaginiez-vous, en écrivant votre premier Bob Morane, que ce nom serait un jour connu de tant de gens?

Non! Quand j'ai commencé à écrire Bob Morane, je ne pensais pas que j'en écrirais autant. J'en ai fais un, puis j'en ai fait deux, puis j'en ai fait trois, puis j'en ai fait 185… Le succès, on l'espère, mais on ne peut pas le prévoir.

Pourquoi pensez-vous qu'il a eu (et a encore) tant de succès?

Je n'en sais rien, mais je pense qu'à l'époque où j'ai écrit Bob Morane, en 53, il manquait quelque chose pour les jeunes. Tous les vieux personnages étaient morts de leur belle mort, comme Buffalo Bill par exemple. Il y avait un créneau à prendre et il n'y avait pas encore la télévision, les jeux vidéo… Les jeunes étaient beaucoup plus dépendants de quelque chose de nouveau qu'on leur apportait. Et on leur a apporté Bob Morane.

Vous avez commencé à publier chez Marabout Junior. Vous visiez donc spécialement pour les jeunes? Et après, pourquoi être passé à Pocket Marabout? Le public avait-il changé?

Oui, il y a eu moins de jeunes et plus d'adultes…

Quelle est la raison?

Je n'en sais rien! Sauf peut-être qu'au fur et à mesure que j'écrivais Bob Morane, mon écriture changeait aussi. Je suis devenu plus pointu, plus adulte moi-même… le style est devenu plus dur, moins boy scout. Car il ne faut pas oublier que si Bob Morane a muri, moi j'ai vieilli. Sauf que lui a toujours 33 ans!!!

Avant Bob Morane, aviez-vous écrit autre chose et dans quel genre?

J'avais écrit plusieurs romans "littéraires", dont un est paru en 44, "la Porte ouverte", qui n'a jamais été réédité. Et aussi "la Belle Nuit pour un homme mort" en 48-49, "le Goût du malheur" qui lui, n'a jamais été édité à l'époque où je l'avais écrit mais qui a paru il y a deux ans! Et puis j'ai commencé Bob Morane et je n'ai plus rien fait d'autre. A part Don bien sûr, mais qui reste dans le même genre.

Un jour, vous avez créé le personnage de Don, sous un autre pseudonyme; en aviez-vous assez de Bob Morane ?

J'ai voulu me défouler un petit peu. Tout ce que je ne pouvais pas mettre dans Bob Morane, je l'ai mis dans Don!

C'est-à-dire?

Le SEXE!

Ha!

Les femmes en général préfèrent Don, à cause du sexe!

L'idée de créer un personnage d'aventurier vous est-elle venue de votre goût à vous pour l'aventure, les voyages?

Oui, il est certain que dans ma jeunesse, j'avais lu beaucoup de romans d'aventure, donc j'avais tout un background qui m'a servi pour faire Bob Morane. L'idée était là, les ambiances étaient là, mes goûts aussi et puis, pour la jeunesse, il fallait de l'aventure!

Qu'est-ce qui vous passionne dans les voyages?

Revenir chez moi!

Et à part ça?

Oh, j'aime tout dans les voyages, le dépaysement, les rêves qu'on réalise… Quelques fois on est déçu, parce qu'un pays n'est pas comme vous l'aviez imaginé.

La Chine vous a particulièrement marqué, pourquoi?

Elle m'a marqué à une époque où j'étais encore trop jeune. Quand on est jeune, on a des préoccupations qui ne sont pas nécessairement intellectuelles ou philosophiques, on voit les choses très en surface et ça, ça m'a peut-être manqué.

Mais les voyages marquent et laissent des souvenirs impérissables, très utiles quelques fois. Simenon disait: "Quand vous visitez un pays, n'en parlez que 10 ans plus tard, quand vous l'aurez reconstruit dans votre esprit". J'aime beaucoup cela!

Et puis, "les plus beaux voyages sont ceux que l'on n'a jamais fait"…

Y a-t-il beaucoup de vous dans Bob Morane?

Disons qu'il a mes goûts. Il aime le jazz comme moi, ce qui est peut-être démodé…Plus aucun jeune ne connaît Duke Ellington! Comment peut-on ne pas connaître ce maître du jazz???

Les autres personnages ont-ils été inspirés par des gens que vous connaissiez?

Non, pas tellement. Ca m'arrive, bien sûr, mais pas très souvent. Quand j'en veux à quelqu'un, je le mets dans un Bob Morane, en changeant un peu son nom mais de manière à ce que tout le monde le reconnaisse J .

Comment avez-vous choisi votre pseudonyme?

En réalité, c'est Vernès et pas Vernes, mais comme on ne met pas d'accent sur les majuscules, les gens on lu Vernes et comme c'était un nom connu, on l'a gardé…

Que pensez-vous de Vincent Cassel dans le rôle de Bob Morane? Et les autres acteurs, sont-ils un bon choix?

Tout ça me dépasse un peu. Quand un personnage devient célèbre, il vous échappe un peu, il devient public. Je n'ai pas grand chose à dire, mais c'est très bien comme ça. Je suis content que ce film se fasse.

Cela fait près de 50 ans que vous vivez en quelque sorte avec Bob Morane. Avez-vous toujours autant de plaisir à écrire ses aventures, n'en avez-vous jamais eu assez?

Oui, évidemment, mais vous savez, on meurt avec ce qu'on est… Un proverbe dit: "la vache meurt là où l'herbe pousse". Je lui dois beaucoup à Bob Morane, je ne peux donc pas lui en vouloir longtemps!

C'est un bon compagnon de vie quoi?

Oui oui! J


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