La bestialité de Thierry Galibert

La bestialité de Thierry Galibert

Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Philosophie

Critiqué par Sahkti, le 10 juin 2008 (Genève, Inscrite le 17 avril 2004, 50 ans)
La note : 9 étoiles
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Le concept de bestialité

Contrairement à ce qu'un réflexe premier pourrait laisser à penser, la bestialité n'a rien d'animal; elle est même typiquement humaine. Alors on cherche un peu ce que la bestialité a à voir avec tout ceci, avec ces 540 pages d'essai et on ne trouve pas forcément au premier coup d'œil. Pas de bestialité, pas de bêtise non plus, Thierry Galibert insiste bien là-dessus. Il s'inspire d'Antonin Artaud, lui qui le connaît si bien, et développe ses hypothèses à partir de ce mal psychologique que prétendait combattre Artaud alors qu'il le rongeait complètement.
"La bestialité est la perte du contact effectif avec la totalité".

D'Artaud, Galibert sait tout ou presque, dans les moindres détails: ses errances, sa folie, ses colères, ses douleurs tant physiques que psychiques, sa carrière aussi. Et son talent. Indiscutable.
On peut dès lors se demander si la subjectivité du rapport au sujet ne risque pas d'interférer que la pensée que compte développer l'auteur; si la démonstration ne serait pas là pour servir un précepte acquis d'avance sans en soulever pour autant les contraires.
Heureusement, quelque part, que Thierry Galibert ne se cantonne pas à Artaud et vogue vers d'autres horizons philosophiques dont Nietzsche n'est pas des moindres.
Alors petit à petit, l'image de bestialité voit le jour, se creuse petit à petit une place dans notre esprit et nous laisse entrevoir ce qu'elle signifie réellement: un ensemble d'éléments extérieurs, un contexte dirons-nous, qui empêche de vraiment exister comme on le devrait. A l'intérieur s'entend. Avec les conséquences que l'on peut deviner, à savoir entre autres la folie et l'errance mentale, illustrées en particulier par des troubles de caractère, des colères, de l'arrogance et d'autres formes quelques peu brutes qui donnent une image en premier lieu faussée du sujet habité.

Tout cela est un brin complexe, j'en conviens, et Thierry Galibert le sait mieux que quiconque. C'est une des raisons pour lesquelles il étaye son propos de démonstrations diverses, de nombreuses citations, et pour lesquelles également il fait appel à des courants tels que la Poétique, la Philosophie, l'Histoire, la Théologie ou encore la Sociologie.
La démonstration mûrit au fil des pages, la Bestialité se précise, les rouages de l'esprit se mettent en place.
Approche intéressante de l'intelligence qui, lorsqu'elle est poussée à l'extrême, peut conduire à réfléchir dans un autre sens, au point que la suffisance finit par prendre le dessus et empêche la clairvoyance. Trait de caractère qui a animé de nombreux esprits de notre temps, Sarte par exemple.

Si la démonstration de Thierry Galibert prend le temps nécessaire au démarrage (c'est qu'il faut en poser des éléments, avant de pouvoir développer la théorie!), elle s'écoule ensuite tel un long fleuve pas vraiment tranquille qui emporte énormément de choses sur son passage, notamment la conviction du lecteur qui progresse peu à peu aux côtés de l'auteur pour s'imprégner de ce concept riche et malaisé de bestialité. Un essai riche à souhait!

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