Aria
avatar 14/09/2006 @ 21:47:53
Arundhati, il semble que les clichés sur le fait que les colons ont opprimé les peuples etc. ont plus que la vie dure.

Et ils passeront dans l'histoire sans que personne n'y mette un bémol grâce à tous ceux, comme toi, qui n'iront jamais lire un livre sur la colonisation.

Pas grave, s'il y a un Dieu, il a déjà reconnu les siens.

Saule

avatar 14/09/2006 @ 22:46:52
Merci SJB de parler de cette guerre qu'on a souvent tendance à passer sous silence. Moi qui me plaignais sur une autre discussion ...
Le reportage que j'avais vu sur le massacre s'intitulait "la guerre oubliée".
J'avais été (et je le suis encore) choquée par la systématisation du meurtre. Des appels radios qui lançaient les chasses à l'homme, des gens qui, après le p'tit café de 10 h (bon là c'est ma manière à moi de le dire) allaient user un peu (beaucoup) de la machette sous les conseils (la permission) de dirigeants. Bref, un scénario à peine pensable mais véridique. Des gens capables de tuer de sang froid, sans pitié. Insensibles aux cris, à la peur et aux suppliques de leurs victimes... Une mère, je crois, qui s'était sortie miraculeusement du massacre, devait, dans ce reportage, apprendre la libération du meutrier de sa famille...
Comment peut-on oublier cela ?

Je suis d'accord. Et c'est ça qui est important : ne pas oublier et essayer de comprendre comment des gens à priori paisibles et normaux, qui vivaient en bon voisinage, ont pu arriver si facilement et si rapidement à ce niveau de sauvagerie. Evidemment c'est plus facile de dire "c'est à cause des colons", ou encore "ces gens sont des sauvages", mais c'est un peu simpliste.

Arundhati
avatar 15/09/2006 @ 00:23:59
Pas grave, s'il y a un Dieu, il a déjà reconnu les siens.

Et bien entendu, tu en fais partie. Tant mieux pour toi.
Pour ma part, je prefère passer inaperçu auprès de ton dieu s'il est du côté des colons esclavagistes.
Tu me connais donc si bien pour affirmer que je n'irai pas lire un livre sur la colonisation ?
Allez, un petit effort, argumente plutôt que de faire des procès d'intention, c'est plus fatigant que de manier l'anathème, mais vouloir donner des leçons à ceux qui, que tu le veuilles ou non, ne les recevront pas est un peu dérisoire.
Tu as bien sûr le droit d'être une une fervente adepte de la colonisation, mais ne t'étonne pas que tout le monde ne soit pas d'accord avec des idées d'un autre siècle.

Arundhati
avatar 15/09/2006 @ 00:26:25
Arundhati, il semble que les clichés sur le fait que les colons ont opprimé les peuples etc. ont plus que la vie dure.

Un mot me vient à propos de cette phrase : c'est révisionnisme. Tu sais, cette "science" qui consiste à nier l'histoire.

Saint Jean-Baptiste 15/09/2006 @ 15:10:28
Ça y est le mot est lâché : "Révisionnisme" !
Vous avez osé réfléchir sur le colonialisme !
Vous avez osé penser que peut-être tout, dans le colonialisme, n'était pas négatif !
Vous avez insinué que peut-être tous les colons n'étaient pas des esclavagistes !
En un mot, vous avez osé penser autrement que tout le monde ! vous vous êtes écarté de la pensée unique, du bien penser, du politiquement correct !
Vous êtes un révisionniste !
Que dis-je un révisionniste ? un révisionniste ça n'existe pas ! Il n'y a que des sales révisionnistes !
Vous êtes un sale révisionniste !

Allons, allons ! Arundhati, je m'attendais à ce que le mot soit lâché, mais je n'aurais jamais cru qu'il viendrait de toi !
Rassure-moi, Arundhati, s'il te plait, dis-moi que c'était par erreur ! ;-))

Aria
avatar 15/09/2006 @ 18:42:40
SJB, ne te fatigue pas !
Je ne dirai plus un mot sur ce forum; laissons s'étrangler de rage et de bêtise ceux qui ne sont là que pour lancer des anathèmes ! ;-)

Saint Jean-Baptiste 15/09/2006 @ 20:16:58
SJB, ne te fatigue pas !
Je ne dirai plus un mot sur ce forum; laissons s'étrangler de rage et de bêtise ceux qui ne sont là que pour lancer des anathèmes ! ;-)

;-))

Mieke Maaike
avatar 15/09/2006 @ 21:19:09
Petit résumé du génocide du Rwanda…

Comme on l’a dit plus haut, le Rwanda aurait à l’origine (il y a bien des siècles) été composé de deux populations d’origine différente, l’une provenant d’Ethiopie, l’autre d’origine bantoue. Au fil des siècles, ils se sont mélangés et on créé une société plus ou moins hiérarchisée (comme toutes les sociétés). La classe sociale supérieure s’appelait Tutsi, la classe sociale inférieure s’appelait Hutu. Au début du 20ème siècle, le Rwanda a d’abord été une colonie allemande, puis suite à la défaite de la première guerre, est passé sous domination belge. Nous étions à une époque où les théories racistes faisaient rage en occident dans tous les domaines des sciences. Les colonisateurs ont remarqué que les membres de la classe supérieure (les Tutsis) étaient plus grands, plus clairs et ont conclu qu’ils faisaient partie de la race blanche et leur ont octroyé une série de prérogatives dans la gestion du pays. Ils ont classé les gens en race, sur base de mesure de crâne, parfois avec des aberrations complètes, du genre, dans une même famille 2 frères sont classés tutsis et 3 autres sont hutus (la théorie des races humaines est en soi une aberration, rappelons-le).

Peu avant l’indépendance clamée d’abord par la classe dirigeante (les tutsis donc), les Belges prennent peur et retournent leur veste : ils se mettent à soutenir les hutus, présentés comme les opprimés des tutsis, leur assène l’argument que ce sont eux, largement majoritaires, qui devraient diriger le pays et, après avoir figer les populations dans des « races », instillent la haine de l’une envers l’autre. Les premiers massacres de tutsis ne vont pas tarder.

Indépendance en 1962, suivie d’une période d’instabilité où les hutus (soutenus par les belges maintenant) reprennent le pouvoir et poussent une partie importante des tutsis à l’exil, période également marquée par des massacres.

En 1973, Habyarimana (Hutu) prend le pouvoir par un coup d’Etat, mais parvient très vite à instaurer la paix dans son pays jusque fin des années 80, ce qui lui vaudra une reconnaissance internationale, voire parfois un appui inconditionnel de la Belgique et de la France (peu regardant sur le degré de démocratie du régime qu’elles soutiennent) qui prennent en exemple le Rwanda comme « pays modèle » (objectivement dans les années 80, quand on passe la frontière entre le Congo – Zaïre à l’époque – et le Rwanda, on ne peut être que frappé par le contraste entre un pays déglingué (le Congo) et un pays bien entretenu et tout joli tout beau, avec des belles routes et des beaux palmiers (le Rwanda) ). Habyarimana impose un régime d’extrême droite : il poursuit l’utilisation du fichage racial, limite fortement les possibilités pour les tutsis d’accéder aux postes à responsabilité dans l’administration, s’appuie (exactement comme Hitler) sur son parti unique le MRND (Mouvement Révolutionnaire National pour le Développement) qui forme les cadres du pays, etc.

Fin des années 80/début des années 90, le pays retombe dans une instabilité, le MRND se radicalise, diffuse des messages de haine à l’encontre des tutsis, la communauté internationale commence à sommer Habyarimana de démocratiser son pays. D’où les négociations autour des accords d’Arusha qui prévoient notamment le multipartisme. Le MRND (le parti d’extrême droite de Habyarimana, rappelons-le) s’oppose radicalement aux accords d’Arusha (évidemment), tout comme Habyarimana qui veut rester au pouvoir tout seul (évidemment). Quelques mois avant le génocide, Habyarimana, sous la pression internationale, finit par signer les accords d’Arusha. Il est immédiatement désavoué par son parti qui fulmine et l’accuse de traîtrise.

La veille du génocide, l’avion qui transportait Habyarimana et le président burundais est abattu. On ne sait pas exactement qui a abattu cet avion, mais on soupçonne fortement le MRND. Quoi qu’il en soit, cet attentat est le signal du début du génocide. Le premier jour, l’ancienne garde présidentiel (en gros, l’équivalent des SS d’Hitler) élimine la plupart des hauts dirigeants et des ministres (hutus) afin de totalement déstabiliser politiquement le pays. La première ministre rwandaise, protégée par 10 casques bleus belges, est également assassinée ainsi que les 10 paras (les fameux 10 paras belges assassinés dont ont a tant parlé). – parce qu’entretemps (j’ai oublié de le dire) une force des Nations Unies a été mise en place pour maintenir un semblant de stabilité.

Ce n’est que dans un 2ème temps que les massacres viseront les tutsis, notamment encouragés par des messages de haine diffusés par la radio des « milles collines ». Qui sont les génocidaires ? La garde présidentielle (les « SS » pour garder la comparaison) et leurs hommes, ainsi que des jeunes désœuvrés facilement recrutés.

Des barrages se mettent en place sur les routes, les extrémistes filtrent les habitants sommés de montrer ses papiers d’identité, les tutsis sont assassinés sur le champ. De même, les escadrons ratisseront les quartiers et les maisons pour traquer les tutsis et les hutus modérés qui les protègent et/ou n’adhèrent pas aux thèses extrémistes des génocidaires.

Pour donner une idée de la situation, imaginons un escadron de SS qui s’approchent d’un quartier de civils juifs pour les assassiner, les gens prennent peur, implorent l’aide des casques bleus qui ont les armes nécessaires pour les protéger, mais les casques bleus refusent toute protection parce qu’ils ont reçu l’ordre de ne pas intervenir (ou un ordre « ambigu », c’est selon). Bref, ils abandonnent clairement les populations aux extrémistes-génocidaires et se consacrent principalement à évacuer les occidentaux, leurs chiens et leurs chats.

Une situation de terreur indescriptible se met en place, chacun cherche à sauver sa peau. Dans cette situation, et afin de décupler la cadence des massacres, une règle de survie est mise en place : tuer ou être tué. C’est comme ça qu’on voit dans des écoles et des hôpitaux, des hutus assassiner leurs collègues tutsis (avec lesquels ils n’avaient jusque là aucun problème) pour démontrer aux extrémistes qu’ils adhèrent à leurs thèses et avoir eux-mêmes la vie épargnée (je vous laisse imaginer les séquelles psychologiques de ces survivants).

Trois mois plus tard, on estime le nombre de victimes (tutsis et hutus non extrémistes) à environ 1 million.

******

Alors les causes du génocide. Est-ce à cause des méchants colons belges qui ont institué le fichage racial au Rwanda ? Est-ce parce que les Africains sont des sauvages qui n’ont pas totalement pu être évangélisés ?

La réalité est plus complexe. Il est indéniable que les Belges ont joué un rôle déstabilisateur dans ce pays tout au long du 20ème (même si certains colons adoraient l’Afrique et les Africains et étaient intimement convaincus de faire le Bien) et ont créé ce système racial. Ils ont clairement une part de responsabilité. Mais le régime d’extrême droite d’Habyarimana porte également une responsabilité certaine. De même que chaque génocidaire individuellement qui a choisi de prendre une machette et qui se levait chaque matin avec l’intention d’aller massacrer des gens.

Les Africains sont-ils des sauvages ?
Dans les camps de concentrations en Allemagne, les nazis avaient plein de jeux marrants, du genre jeter des bébés en l’air et les abattre à la mitraillette au vol. Au Cambodge, les Khmers rouges arrachaient les bébés des bras de leurs parents pour les tuer en les fracassant contre un arbre. Au Rwanda, les extrémistes hutus les mettaient en pièce à la machette. Comment l’être humain est-il capable d’une telle horreur ? Les philosophes, psychologues, sociologues, chercheurs dans tous les domaines se posent encore aujourd’hui la question. Mais une seule chose est sûre : ça n’a rien à voir avec la couleur de la peau.

Dirlandaise

avatar 15/09/2006 @ 23:05:52
Merci encore une fois Mieke pour ce résumé qui m'éclaire grandement sur ce pays et ses problèmes. Il y a quelques temps, j'avais décidé de me renseigner sur les causes de ce massacre au Rwanda et j'avais lu beaucoup de reportages sur Internet mais ton résumé est supérieur à beaucoup de textes que j'ai consultés. ;-)

Arundhati
avatar 15/09/2006 @ 23:31:06
Allons, allons ! Arundhati, je m'attendais à ce que le mot soit lâché, mais je n'aurais jamais cru qu'il viendrait de toi !
Rassure-moi, Arundhati, s'il te plait, dis-moi que c'était par erreur ! ;-))

Une erreur, que nenni, un euphémisme plutôt !
Quand tu oses parler de pensée unique, c'est cocasse. A croire que pour toi la pensée unique c'est celle de l'autre.
Réfléchir sur le colonialisme ce n'est sûrement pas rapporter par habitude ce qui a été seriné pendant des dizaines d'années, notamment par les partisans de l'Algérie française.
Pour ne prendre que cet exemple, il est bon de savoir que l'agriculture de l'Algérie avant la colonisation était tout à fait comparable à celle de la France en terme de développement. Ce n'était pas un pays d'arriérés. La légende qui consiste à tenter de faire croire que nous avons apporté des routes et des hôpitaux à ces bons sauvages est tout simplement mensongère. Pour preuve, aucun des pays qui n'ont pas été (récemment) colonisés n'ont pour autant de retard manifeste sur notre cher occident.
Peux-tu dire si l'Algérie (ou la RDC) aurait été plus en retard sans la présence française (ou belge) ?
Si encore on disait que la présence française a eu des aspects positifs (ce qui est vrai par certains aspects culturels ou techniques, mais qui ne compensent pas pour autant les dégats causés simultanément), mais la colonisation, c'est à dire l'appropriation arbitraire (autrement dit le vol) des richesses d'un pays, ça non.
A moins de réver d'un Grand Reich évidemment...

Saint Jean-Baptiste 16/09/2006 @ 11:36:05
Allons, allons ! Arundhati, je m'attendais à ce que le mot soit lâché, mais je n'aurais jamais cru qu'il viendrait de toi !
Rassure-moi, Arundhati, s'il te plait, dis-moi que c'était par erreur ! ;-))

mais la colonisation, c'est à dire l'appropriation arbitraire (autrement dit le vol) des richesses d'un pays, ça non.
A moins de réver d'un Grand Reich évidemment...

Ouf !
Ben si, Arundhati, il y avait bien erreur ! Tu parlais de l'Algérie, colonie française conquise par les armes...
Ici on parlait de la Tutelle du Ruanda, confiée à la Belgique par la Société des Nations après 14/18 jusqu'en juillet 1962, et dont on peut tâcher de faire la part des choses sans se faire taxer de révisionniste.

Le rat des champs
avatar 16/09/2006 @ 11:47:19
Peux-tu dire si l'Algérie (ou la RDC) aurait été plus en retard sans la présence française (ou belge) ?


Pour l'Algérie je ne sais pas je ne connais pas assez la situation, mais pour le Congo, non, il n'aurait pas été plus en retard. Plus en avance, sûrement, si nous n'avions pas pillé leurs ressources et installé au pouvoir des dictateurs qui servaient nos intérêts.

Mae West 16/09/2006 @ 12:38:20
Ceci est une parenthèse, encore que ...

Pour moi, la France a autant de responsabilités que la Belgique à propos du silence fait autour du génocide du Ruanda : le massacre se perpétrait dans l'ignorance, puis l'indifférence générale, l'attention de l'opinion publique qui va de TF1 au nouvel Obs en passant par Libé étant focalisée sur la situation de la Bosnie et les misères des habitants de Sarajevo* : cause bien plus intéressante, sans doute parce qu'ils étaient blancs, et qu' ils habitaient (presque) l'immeuble d' à côté. Mais ce n'était pas "que" la faute des journalistes et des dirigeants, cette fois : la soi-disant élite intellectuelle française, dont les nouveaux philosophes droitisants, était très occupée à se positionner et à faire mousser son image pleine de bon sentiments en faisant ses choux gras publicitaires sur le siège de Sarajevo : Bhl en tête suivi de peu par Finkelkraut et consorts ont fait à cette époque autant de mal que cent journalistes inféodés à la presse de Bush.
Le Ruanda est passé à la trappe de l'info, et on a laissé l'enfer se faire. Parce que sûr que le diable était là bas ! Et auparavant il était chez Pol pot, Et avant en URSS et en Allemagne, entre autres, pourtant là bas, c'était des gens civilisés. Et on le retrouve remontant le fleuve du temps sur les bateaux des négriers, allumant les bûchers des hérétiques et des sorcières, ferraillant sur la route des croisades. Le diable est partout où on laisse l'enfer se faire, il profite du terrain pour peu qu'on lui ait donné les moyens de s'y installer. Le diable est une invention née de la haine des hommes, envers un ennemi qui n'est autre qu'eux-mêmes, mais ils ont aussi été capables d'inventer des dieux d'amour, et un idéal de sagesse :
Alors peut-être on peut penser c'est qu'ils n'avaient pas que de la haine et de la folie en eux, ces hommes ?
Alors peut peut-être on doit continuer à croire pas forcément à Dieu et à diable, mais à une humanité perfectible, qui existe en nous mêmes. Parole d'agnostique !


*malheurs que je ne mets pas en doute et qui m'ont émue, natuirellemnt.

Saint Jean-Baptiste 16/09/2006 @ 13:24:27
Très intéressant, Mieke Maaike, cet aperçu historique qui vient fort heureusement compléter et confirmer nos quelques informations.
J'ai surtout apprécié le résumé des événements postérieurs à l'indépendance dont j'ignorais beaucoup de choses, notamment que le régime de Habyarimana était extrême droitiste et comparable par certains aspects au nazisme..

Sinon, j'ai constaté avec plaisir que mon petit aperçu n'était pas trop fantaisiste et que tu le confirmes pratiquement en tous points, avec ce même souci d'objectivité, dont personne au reste n'a jamais douté. ;-)

Je m'en voudrais d'éplucher quelques mots tels que : "le pays tombe sous la domination" belge, alors que la Belgique en reçoit la tutelle. Beaucoup disaient à l'époque : suite à la bonne gestion de la colonie belge du Congo... (Objectivité ?) ;-)
Plus loin, je n'aurais pas dit que les Belges avaient "octroyé" des prérogatives aux Tutsi. Ils les ont plutôt confirmés dans leurs prérogatives, probablement par souci de ne pas troubler l'ordre établi et de ne pas s'initier dans les affaires du pays. (suis-je objectif ?).
Mais dés le moment où les Belges organisaient un enseignement (missionnaire), ils favorisaient l'émancipation des Hutu et se mettaient les Tutsi à dos.
Ont-ils eu tort ? on peut en discuter à l'infini. L'Organisation des Nations Unies, l'a toujours reproché aux Belges ; ils avaient pris le parti des Tutsi et j'ai encore un souvenir précis du jour où Dag Hammarksjöld, Secrétaire de l'ONU, avait dit en parlant de Kayibanda, élu démocratiquement par la majorité hutue : "Je ne reçois pas les laquais"...

Je crois finalement que la faute gigantesque des Belges est d'avoir imposé une carte d'identité avec mention : Tutsi ou Hutu. C'est une faute incompréhensible.
Les Belges n'ont pas "créé" un système raciste, comme tu le dis, mais ils l'ont officialisé.
Je ne crois pas que tu me contrediras : le racisme est un fléau qui a cours dans toute l'Afrique, encore actuellement. (Mais je crois que le mot "race" est interdit, aujourd'hui on doit dire "ethnie", non ?)
Je voudrais savoir qui avait pris cette décision et quel en était le véritable but. (Si toi tu sais ?).
Il y avait en 1930 un redoutable système raciste qui se mettait en place en Europe, (les recherches biologiques ultérieures en ont démontré les absurdités), mais il serait simpliste de dire que l'Europe, et la Belgique, étaient racistes.
Du reste je crois savoir que cette décision a été prise bien après 40/45 (?).
Quoiqu'il en soit, les conséquences de cette décision ont encore aggravé les circonstances du génocide, comme tu l'as très bien souligné.

Voilà ! merci Mieke M, maintenant on ne pourra plus dire que plus personne ne pense au Ruanda ! ;-)

Mieke Maaike
avatar 16/09/2006 @ 18:40:57
"le pays tombe sous la domination" belge, alors que la Belgique en reçoit la tutelle.

Quelle est la différence pour toi entre tutelle et domination ?

Beaucoup disaient à l'époque : suite à la bonne gestion de la colonie belge du Congo... (Objectivité ?) ;-)

C'est ce qu'on disait à l'époque, en effet...
La gestion était même excellente puisque le congo a considérablement enrichi la Belgique. Et puis, ils savaient s'y prendre les colons pour mater les sauvages: chatiments corporels, peine de mort...
Et puis les colons ont instauré des écoles (forcément, les sauvages ne transmettaient pas de savoir à leurs enfants) mais ont favorisé l'enseignement utile pour les Belges: enseignement technique et interdiction pour les noirs d'accéder à l'université (faut éviter que les sauvages deviennent trop intelligents et d'ailleurs, qu'est-ce qu'on ferait, nous les Belges, avec des sauvages intellectuels, hein ? c'est pas eux qui iraient extraire le minerais du sol ni cultiver le caoutchouc).
Oui, on peut dire que la gestion était exemplaire, dans l'intérêt de la Belgique.

Plus loin, je n'aurais pas dit que les Belges avaient "octroyé" des prérogatives aux Tutsi. Ils les ont plutôt confirmés dans leurs prérogatives, probablement par souci de ne pas troubler l'ordre établi et de ne pas s'initier dans les affaires du pays. (suis-je objectif ?).

Non, ce sont les Belges qui ont pris les prérogatives tutsis (c'est les belges qui dominaient le pays), mais leur ont toutefois octroyé certains prérogatives (parce que ça arrangeait bien les belges sur des gens qui avaient l'habitude de gérer les choses) et en plus, les belges ont trouvé l'entourloupe de les considérer comme des blancs.

Mais dés le moment où les Belges organisaient un enseignement (missionnaire), ils favorisaient l'émancipation des Hutu et se mettaient les Tutsi à dos.

Alors le coté "enseignement" pour apporter le savoir aux sauvages, c'est d'abord et avant tout dans l'intéret des Blancs:
- dans l'intéret de former des travailleurs qui pouvaient exploiter au mieux les richesses du pays pour les envoyer en Belgique
- dans l'intéret des institutions religieuses qui trouvaient un moyen d'augmenter le nombre de leurs adhérents en évangélisant à tour de bras.
En ajoutant en plus le coté paternaliste ("nous les blancs sommes civilisés et dans notre grande mansuétude acceptons de donner une petite partie de nos connaissances à des sauvages incultes").
Ce n'est que tout à la fin de la période coloniale, quand les tutsis ont commencé à revendiquer leur indépendance, que les belges se sont rendu compte de l'intéret d'"émanciper" les hutus pour qu'ils déstabilisent les tutsis.

Les Belges n'ont pas "créé" un système raciste, comme tu le dis, mais ils l'ont officialisé.

Non, ils l'ont créé. Au départ, les hutus et les tutsis étaient des classes sociales. Comme si tu disais des bourgeois et des ouvriers. Le fait de considérer que la qualité de bourgois ou d'ouvrier est génétique, s'identifie sur base de caractéristiques physiques, est figée de génération en génération et doit être mentionnée sur la carte d'identité, c'est une démarche de création raciale.

Je voudrais savoir qui avait pris cette décision et quel en était le véritable but. (Si toi tu sais ?).

Je ne sais pas. Il faudrait faire une recherche.

Il y avait en 1930 un redoutable système raciste qui se mettait en place en Europe, (les recherches biologiques ultérieures en ont démontré les absurdités), mais il serait simpliste de dire que l'Europe, et la Belgique, étaient racistes.

Si. La Belgique était totalement raciste. Je suis un jour tombée sur des manuels scolaires belges des années 50 qui apprenaient aux enfants de Belgique ce qu'était le Congo, je peux te garantir que ça puait le racisme de la première à la dernière page (et pourtant je suis très prudente quand il s'agit d'identifier le racisme). Les descendants de colon que j'ai cotoyé en Afrique étaient pour l'écrasante majorité totalement racistes. Il y a des blancs qui ont passé toute leur vie en Afrique mais n'ont jamais partagé un repas avec un noir. Je dirais même l'écrasante majorité des Belges qui vivaient au Congo n'ont jamais partagé un repas avec un Congolais. Quand on connait l'importance que les Belges donnent à la table, il y a de quoi être interpelé.

Le rat des champs
avatar 16/09/2006 @ 18:48:11
Si. La Belgique était totalement raciste. Je suis un jour tombée sur des manuels scolaires belges des années 50 qui apprenaient aux enfants de Belgique ce qu'était le Congo, je peux te garantir que ça puait le racisme de la première à la dernière page

Je confirme. J'ai fait mes études primaires dans les années 50 et notre livre de géographie parlait des "races" humaines, en disant que la blanche était la meilleure, suivie par la jaune, et loin derrière par la noire. Mon meilleur ami de l'époque était congolais, et j'étais furieux de toutes ces âneries, je m'en souviens parfaitement.

Mieke Maaike
avatar 16/09/2006 @ 18:49:49
la France a autant de responsabilités que la Belgique à propos du silence fait autour du génocide du Ruanda

On évoque aussi une rôle très ambigu joué par Mittérand au moment du génocide. Mais j'avoue ne pas en connaître les détails.

Saule

avatar 16/09/2006 @ 21:32:49

Une situation de terreur indescriptible se met en place, chacun cherche à sauver sa peau. Dans cette situation, et afin de décupler la cadence des massacres, une règle de survie est mise en place : tuer ou être tué. C’est comme ça qu’on voit dans des écoles et des hôpitaux, des hutus assassiner leurs collègues tutsis (avec lesquels ils n’avaient jusque là aucun problème) pour démontrer aux extrémistes qu’ils adhèrent à leurs thèses et avoir eux-mêmes la vie épargnée (je vous laisse imaginer les séquelles psychologiques de ces survivants).

J'imagine que c'est quelque chose de similaire qui s'est passé dans la tête de la religieuse dont je parlais plus haut (elle avait ouvert son monastère aux tutsis ce qui avait entrainé le massacre des hutus qui y avaient cherché refuge) : elle a dit au procès qu'elle avait ouvert son monastère pour préserver sa vie et celle de ses soeurs.

Je me garderais bien de la juger, il faut se rendre compte que la proportion de héros est assez faible dans ces cas là. Et puis une fois qu'on a cédé à la terreur c'est fini : elle a terminé par apporter de l'essence aux assaillants pour qu'il brulent un garage ou des tutsis s'étaient cachés.

La description que tu fait du mécanisme du génocide correspond assez bien à ce que j'avais trouvé chez Courtemanche (un dimanche à la piscine à Kigali) : un petit groupe de gens qui veulent garder le pouvoir et qui parviennent à exciter la population et à jouer sur l'instinct de tuer qui sommeille qui en chacun. Finalement je te conseille le livre si le sujet t'intéresse.

Bolcho
avatar 16/09/2006 @ 23:15:38

Une situation de terreur indescriptible se met en place, chacun cherche à sauver sa peau. Dans cette situation, et afin de décupler la cadence des massacres, une règle de survie est mise en place : tuer ou être tué. C’est comme ça qu’on voit dans des écoles et des hôpitaux, des hutus assassiner leurs collègues tutsis (avec lesquels ils n’avaient jusque là aucun problème) pour démontrer aux extrémistes qu’ils adhèrent à leurs thèses et avoir eux-mêmes la vie épargnée (je vous laisse imaginer les séquelles psychologiques de ces survivants).

J'imagine que c'est quelque chose de similaire qui s'est passé dans la tête de la religieuse dont je parlais plus haut (elle avait ouvert son monastère aux tutsis ce qui avait entrainé le massacre des hutus qui y avaient cherché refuge) : elle a dit au procès qu'elle avait ouvert son monastère pour préserver sa vie et celle de ses soeurs.

Je me garderais bien de la juger, il faut se rendre compte que la proportion de héros est assez faible dans ces cas là. Et puis une fois qu'on a cédé à la terreur c'est fini : elle a terminé par apporter de l'essence aux assaillants pour qu'il brulent un garage ou des tutsis s'étaient cachés.

La description que tu fait du mécanisme du génocide correspond assez bien à ce que j'avais trouvé chez Courtemanche (un dimanche à la piscine à Kigali) : un petit groupe de gens qui veulent garder le pouvoir et qui parviennent à exciter la population et à jouer sur l'instinct de tuer qui sommeille qui en chacun. Finalement je te conseille le livre si le sujet t'intéresse.


Pour Saule et d'autres qui auraient le courage d'en faire la lecture complète, l'intégralité du compte-rendu du procès se trouve ici :
http://www.assisesrwanda2001.be/index.html

Le moins qu'on puisse en dire est que c'est complexe et que la vérité a du mal à se frayer un chemin dans tout ça. De manière générale d'ailleurs - et pour avoir assisté à quelques procès d'assises - j'ai l'impression que la vérité des uns n'est pas celle des autres et que souvent les accusés eux-mêmes ne la connaissent pas, ou plus vraiment, tant ils ont parfois reconstruit les faits...comme nous tous finalement.
J'ajoute que j'ai eu l'occasion de cotoyer longuement une des condamnées dans le cadre de mon travail et qu'elle s'est montrée sous un jour particulièrement positif. Mais ça ne veut rien dire sur le fond de l'affaire, sinon peut-être ce que suggère Saule : le boulot d'être humain n'est pas toujours facile...

Saint Jean-Baptiste 16/09/2006 @ 23:41:25
la France a autant de responsabilités que la Belgique à propos du silence fait autour du génocide du Ruanda

On évoque aussi une rôle très ambigu joué par Mittérand au moment du génocide. Mais j'avoue ne pas en connaître les détails.

Très ambigu pour le moins ! C'est comme l'opération Turquoise menée par la France sous l'égide de Balladur ! Très mystérieux, c'est le moins qu'on puisse dire !
Certaines mauvaises langues ont été jusqu'à dire que la France venait se faire payer ses factures !

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