Bolcho
avatar 18/11/2005 @ 11:54:46
Rendons à Lucien ce qui n’appartient pas à César : le fameux « test de la page cent », mesure quasi scientifique de la qualité d’une œuvre. Y a-t-il sur cette fameuse page, dans le livre que vous avez entre les mains, une phrase dont vous auriez aimé être l’auteur ? Ou au contraire, n’est-elle couverte que de banalités qui font avancer l’histoire ?

Reproduire cette phrase sera aussi un excellent moyen de nous mettre en contact avec le style particulier de l’auteur.

Ne nous préciser ni son nom, ni le titre de l’oeuvre, permettra à ceux qui aiment les devinettes de jouer à les retrouver eux-mêmes. Inutile de donner la réponse pour faire le cultivé de service : n’importe qui peut tout simplement utiliser Google pour la découvrir.

Je commence avec ceci qui se trouve à la page 100 de mon édition :

« Le magistrat l’avait reçu debout, dans sa robe, hermine à l’épaule et toque en tête. C’était le matin, avant l’audience. On entendait dans le corridor passer les fortes bottes des gendarmes, et comme un bruit lointain de grosses serrures qui se fermaient. Les oreilles du pharmacien lui tintèrent à croire qu’il allait tomber d’un coup de sang ; il entrevit des culs de basse-fosse, sa famille en pleurs, la pharmacie vendue, tous les bocaux disséminés ; et il fut obligé d’entrer dans un café prendre un verre de rhum avec de l’eau de Seltz, pour se remettre les esprits. »

Vous avez trouvé bien sûr : un pharmacien…

Sahkti
avatar 18/11/2005 @ 12:26:29
Cette chère Emma...

Dirlandaise

avatar 18/11/2005 @ 15:26:27
"Elle se mit à pleurer, à petits sanglots douloureux, réussit à articuler :"Auriez-vous un mouchoir ?" Mais il leur restait peu de temps pour pleurer. Ils étaient amoureux maintenant, les secondes passaient trop vite. Il fallait qu'ils les dévorent, une à une , tandis que le crépuscule jaune et vert sombrait derrière les vitres du taxi, que les enseignes rouge feu, bleu pétrole, vert fantôme, commençaient à danser sous la pluie insistante. Il était six heures environ. Les rues étaient pleines de monde. Les bistrots scintillaient. La place de la Concorde s'éloigna dans une splendeur rose, et la voiture partit en direction du nord.

;-)

Kilis 18/11/2005 @ 15:38:47
Oh Bolcho! que je suis contente de te revoir!
Me demandais...

Cuné 18/11/2005 @ 17:50:25
"Je leur dis de se mettre en route sans rien de plus qu'un bâton; ni pain, ni argent, une seule tunique. Je dis "Dans quelque maison que vous entriez, restez-y jusqu'à l'heure du départ; Et si des gens de vous reçoivent pas, retirez-vous rapidement. Secouez la poussière de vos pieds. A marcher ainsi, aisé sera le chemin."

Julius 18/11/2005 @ 19:19:52
"Chacun de nous choisit son rôle archétypal assez tôt dans la vie, dit-il au groupe. Et ne vous trompez pas sur le terme général d'"archétype" - car il s'applique aussi bien à l'employé de banque habitant Shapperton qu'aux grands personnages historiques -, "archétypal" ne signifie pas vraiment "héroïque". La vie intérieur de cet employé de banque est aussi riche que la vôtre ou la mienne, le rôle qu'il se voit lui-même assumer est tout aussi important pour lui que celui de n'importe qui. Quoique ses vêtements de banlieusard puissent vous tromper - et tromper ceux qui vivent et travaillent avec lui -, il...
- Absurde, absurde, dit Sandra Peterson en agitant ses gros bras. Il ne s'agit pas de sacrés archétypes... Il s'agit de stéréotypes...
- Rien de pareil n'existe, insista Glogauer. C'est inhumain de juger les gens de cette façon.
- Je ne sais pas comment vous l'appelez, mais je sais que ces gens sont ternes... les forces de la médiocrité, qui essaient d'abaisser les autres."
Glogauer était révolté, presque en larmes.
"Vraiment, Sandra, j'essaie d'expliquer...

Saule

avatar 18/11/2005 @ 19:38:59
Pour celui de Cuné pas besoin de Google. Celui de Julius m'évoque juste Karl Glogauer, un critiqueur du site.

Julius 18/11/2005 @ 19:45:02
marrant ! les 2 premières phrases de la page 101 sont :
- Je suis sûre que vous avez complétement faussé la pensée de Jung, dit-elle fermement.
- J'ai étudié tout ce qu'il a écrit !
;-)

Cuné 18/11/2005 @ 21:05:14
Méfie-toi, Saule, c'est une version "personnelle" que je suis en train de lire ;o)

Saint Jean-Baptiste 18/11/2005 @ 21:14:27
Cette chère Emma...

... Et l'abominable Monsieur Homais, l'apothicaire le plus célèbre de France.

(J'avais d'abord pensé à Oui-Oui !) ;-))

Saule

avatar 18/11/2005 @ 21:21:05
Méfie-toi, Saule, c'est une version "personnelle" que je suis en train de lire ;o)

Oui je sais, même si j'ai d'abords été vérifier l'original (mais alors c'est page 1700 et pas 100 !, et puis à la troisième personne pas à la première)

Saint Jean-Baptiste 18/11/2005 @ 21:35:58
Et c'était le silence : le silence d'Argelouse ! Les gens qui ne connaissent pas cette lande perdue ne savent pas ce qu'est le silence : il cerne la maison, comme solidifié dans cette masse épaisse de forêt où rien ne vit, hors parfois une chouette huhulante (nous croyons entendre, dans la nuit, le sanglot que nous retenions).. ..

Tistou 19/11/2005 @ 10:19:46
1) Content de te revoir Bolcho. Tu manquais.
2)
Oui tiens, il pourrait appeler Marguerite. Elle doit être presque rentrée à présent. Auburndale n'est pas si loin. A moins qu'elle ne soit rentrée directement chez elle. Qu'elle se soit arrêtée prendre le coup de l'étrier au bar du coin, à quelques rues de chez elle, une taverne sombre et enfumée pleine de Noirs et de Noires, avec de la musique "soul" au juke-box, où elle va rencontrer, prendre un verre et parler nègre avec un gars du quartier qu'elle connait, un grand type mince à la belle gueule qui s'appelle Steve ou Otis, avec une moustache en trait de crayon et de grands cils noirs, elle va partir avec lui, l'accompagner chez lui, fumer de la marijuana et baiser sauvagement, comme des Noirs, avec lui. Quand ils auront fini, ils resteront allongés sur des draps de satin violet, elle lui caressera sa grosse bite en se demandant pourquoi diable elle a essayé de s'envoyer en l'air avec l'employé du magasin de gnôle alors qu'elle peut se taper ça quand elle en a envie. Le type haussera les épaules en disant : "Ca, ma gosse, je pige pas. Tout le monde sait que les pâlichons ont une petite queue. "

Kilis 19/11/2005 @ 10:53:11
— Irréprochable, et bonne, bien entendu vous en trouverez toujours pour dire… Et
charitable. Elle a même des gestes que les autres, avant elle, n’avaient pas. Passez derrière les cuisines de l’ambassade, vous verrez l’eau fraîche pour les mendiants, elle n’oublie pas, elle y pense, elle, chaque jour avant le tennis.
— Irréprochable, allons, allons.
— Rien ne se voit, c’est ce que j’appelle irréprochable à Calcutta.
— Mais lui ? Qu’il nous a fait du tort. Je ne l’avais jamais vu. Il est grand, brun comme
un bel homme le serait si… et jeune… hélas ! On voit mal ses yeux, son visage n’est pas expressif. Il est un peu mort, le vice-consul de Lahore… vous ne trouvez pas qu’il est un peu mort ?
Les femmes, pour la plupart, ont la peau blanche de recluses. Elles vivent volets clos à
l’abri du soleil-qui-tue, elles ne font presque rien aux Indes, elles sont reposées, elles sont regardées, heureuses ce soir, sorties de chez elles, en France aux Indes.
— C’est la dernière réception avant la mousson, vous avez vu le ciel ce matin, ça y est,
pendant six mois, cette lumière…
— Que ferait-on sans les Iles ? Sont-elles belles le soir ? Ah… C’est ce que nous
regretterons des Indes…
— Les femmes, disent les hommes, de les revoir comme en France, même la plus
insignifiante ici, celle que là-bas on ne remarquerait pas, ah ! quel effet cela fait…

Saule

avatar 19/11/2005 @ 17:14:35
Méfie-toi, Saule, c'est une version "personnelle" que je suis en train de lire ;o)

Autant pour moi, je pensais à EES (l'évangile selon Pilate) mais apparemment c'était Norman Mailer !

Julius 20/11/2005 @ 15:44:10
Sais pas si on peut rejouer mais je me lance !

-'scusez mon ignorance, Sir Williams, mais qu'est-ce que ces vieux dieux ont à voir avec celles qu'ont fait du tort à Sa Majesté ?
- Glup. Excusez-moi... Ne méprisez pas les Dieux : en dépit de leur inexistence en termes matériels, ils n'en sont pas moins puissants, pas moins terribles...
L'unique endroit où les Dieux existent sans aucun doute est dans nos esprits où ils sont incontestablement vrais dans toute leur grandeur et leur monstruosité.
Qui est Mars sinon les attributs personnifiés de la violence de l'humanité ? Et Aphrodite, sinon les désirs de l'homme ? Les sages huméristes reconnaissent dans tous les dieux des aspects de "l'Unique" et pourtant ne virent pas la réalité supérieure.
"L'Unique" c'est NOUS, chacun avec un panthéon de dieux dans son cerveau droit d'où jaillissent l'inspiration et l'instinct.
Athéna nous donnent les automobiles, Mars le soulèvement de Mahdi. N'est-ce pas assez de pestilences et de miracles pour ressasier le dieu de l'Exode ?
Terminez votre tourte, nous ne pouvons pas nous attarder ici.

J'aimerais bien que Shelton ou Le Rat des champs me disent qu'ils l'ont lu !

Saule

avatar 28/11/2005 @ 22:14:36
Mrs. Leath tenait à la main le lettre qui lui avait ouvert les yeux à tout cela et un sourire lui vint aux lèvres à la seule sensation du papier entre ses doigts. Le frisson qui la parcourut alors aiguisa tous ses sens. Elle palpait, voyait, respirait le monde resplendissant comme si un voile fin et impénétrable venait soudain d'en être retiré. C'était un voile de la sorte, comprenait-elle à présent, qui l'avait toujours séparée de la vie. Il avait été semblable au tulle scénique qui donne un air de réalité illusoire au décor peint qu'il recouvre mais qui prouve, après tout, que ce n'est rien qu'un décor peint.

Adolescente, elle n'avait guère eu conscience de différer des autres à cet égard. Dans l'univers bien réglé, bien nourri des Summers, on estimait que l'insolite était soit immoral, soit impoli, et les gens qui éprouvaient des émotions ne recevaient pas de visites.

Jlc 29/11/2005 @ 10:12:45
"Lorsque j'étais gosse, il était bien le seul à m'avoir inspiré, comme à tant de gamins, le désir d'être un autre. Mais se vouloir dans la gloire d'un autre, qu'on soit enfant ou adulte, est intenable pour des raisons psychologiques si l'on n'est pas écrivain et pour des raisons esthétiques si on l'est. En revanche, embrasser son héros dans sa descente aux enfers, se laisser envahir par sa vie au moment où tout conspire à le diminuer, s'imaginer en proie à la même infortune, s'impliquer non pas dans son triomphe en cette heure irréfléchie où il polarise notre adulation, mais dans le désarroi de sa chute tragique, voilà qui mérite réflexion.
Me voici sur la piste de danse avec Joy, et je pense au Suédois, à ce qui est arrivé à son pays en l'espace d' à peine 25 ans, entre les années triomphales de la guerre au lycée de Weequahic et le moment où sa fille a fait exploser une bombe, en 1968..."

Décidément ce test de la page 100 est très révélateur et dans le cas présent me conforte encore dans l'idée que j'ai lu le livre magnifique d'un superbe écrivain.

Suggestion: pourquoi ne pas donner le nom des auteurs et des livres au bout d'une semaine par exemple, puis fermer le fuseau et ouvrir un autre si ça nous amuse encore?

Saule

avatar 29/11/2005 @ 11:31:49
Donner le nom de l'auteur, pourquoi pas en effet, mais je suggère de continuer le petit jeux dans le même fuseau, ceci afin de ne pas les multiplier. Et si on ne donne pas le nom de l'auteur, on peut toujours attendre ta critique sur le livre en question pour savoir de quel auteur il s'agit...enfin normalement, j'attends toujours celle de SJB (Mauriac ?)

Dirlandaise

avatar 29/11/2005 @ 13:06:21
"Elle se mit à pleurer, à petits sanglots douloureux, réussit à articuler :"Auriez-vous un mouchoir ?" Mais il leur restait peu de temps pour pleurer. Ils étaient amoureux maintenant, les secondes passaient trop vite. Il fallait qu'ils les dévorent, une à une , tandis que le crépuscule jaune et vert sombrait derrière les vitres du taxi, que les enseignes rouge feu, bleu pétrole, vert fantôme, commençaient à danser sous la pluie insistante. Il était six heures environ. Les rues étaient pleines de monde. Les bistrots scintillaient. La place de la Concorde s'éloigna dans une splendeur rose, et la voiture partit en direction du nord.

;-)


"Tendre est la nuit" de F. Scott Fitzgerald.

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