Du polar classique à la bande dessinée…

Parfois, il est bon de s’appuyer sur un fait. Par exemple, Gaston-Alfred-Louis Leroux est né il y a 150 ans, à Paris, dans le dixième arrondissement… Tout un programme, du moins si vous connaissez ce fameux et illustrissime Gaston Leroux !

Cet homme a commencé par être chroniqueur judiciaire au journal Le matin avant de prendre du grade et devenir grand reporter. Il suit de nombreux procès dont ceux d’anarchistes dont il s’est peut-être inspiré pour créer ses personnages de fiction.

En 1907, sort son premier succès en librairie, enfin surtout succès à partir de 1908, « Le mystère de la chambre jaune ». Dans ce merveilleux roman policier, l’enquêteur est un journaliste – comme Gaston Leroux – Joseph Rouletabille. Son regard et son sens de l’observation, sa puissance de déduction et sa capacité à défricher les énigmes impossibles, font de lui le héros d’une série de romans à succès : Le parfum de la Dame en noir (1908), Rouletabille chez le Tsar (1913), Le château noir (1916), Les étranges noces de Rouletabille (1916)…

Le personnage de Rouletabille a-t-il inspiré celui d’Arsène Lupin ? On peut s’interroger car L’aiguille creuse, roman de Maurice Leblanc, premier du cycle des aventures de Lupin, est sorti en 1908, juste après Le mystère de la chambre jaune… Il a aussi peut-être inspiré un autre personnage, cette fois-ci dans la bande dessinée, je veux parler du fameux Tintin de Hergé. Mais qu’importe car pour ce qui est De Rouletabille et Lupin, l’inspiration commune est probablement à chercher chez Edgar Alan Poe et son chevalier Auguste Dupin !

Le mystère de la chambre jaune a été adapté de nombreuses fois, à partir de 1913 et la version muette de Maurice Tourneur. Pour la bédé, c’est 1990 que parut la première adaptation, celle de Duchâteau et Swysen et c’est 2018 que sort celle de Jean-Charles Gaudin, Sibin Slavkovic et Joël Odone…

Le mystère de la chambre jaune est une histoire à énigme. Mathilde, la fille du professeur Stangerson a été agressée dans sa chambre, au château du Glandier. Bien sûr, la chambre est fermée de l’intérieur et le mystère est quasiment impossible à solutionner… Le journaliste Rouletabille est en concurrence avec le policier Frédéric Larsan et ce face à face est un des points forts de cette histoire, très bien rendu dans cette bédé…

La dernière adaptation en date en bédé, a vu le dessinateur Sibin Slavkovic s’y coller, du moins pour le premier tome, Le mystère de la chambre jaune. Cette adaptation graphique sur papier est de très bonne qualité, le dessin assez classique et sans révolutionner l’histoire, le scénariste Jean-Charles Gaudin s’approprie les faits pour en faire une narration efficace, plaisante à lire et respectueuse de celle de Gaston Leroux. Il s’agit donc d’un beau cadeau d’anniversaire pour ce romancier dont le cœur de l’histoire n’a pas pris une ride… Je sais bien qu’aujourd’hui, on nous mettrait une bonne dose d’ADN et de différentes mesures physico-chimiques pour gagner du temps, des certitudes et tuer le mystère !

Pour le second tome, même scénariste, mais autre dessinateur, Christophe Picaud. Cet artiste très éclectique, il a travaillé dans la céramique et le costume, dans le décor de spectacle et dans la caricature, s’est fait remarquer dans la bédé avec sa série Les larmes du démon. Depuis, il travaille régulièrement avec Jean-Claude Gaudin qu’il retrouve ici… Ambiance sombre et complexe, mystère et énigme, tout est là pour faire du classicisme… Seul reproche de mon point de vue, faire tenir un tel roman, Le parfum de la dame en noire, oblige à de telles ellipses que le lecteur doit rester concentré sous peine de devoir reprendre la lecture…

J’ai bien apprécié cette narration graphique, parfois un peu bavarde, et je suis pressé de rencontrer le dessinateur, Christophe Picaud, lors du prochain festival Quai des bulles 2018 à Saint-Malo !

Les commentaires sont fermés.