Chalon dans la rue avec la compagnie Anonima Teatro

Madame a décidé de partir avant la fin du spectacle ! Elle en a parfaitement le droit, c’est un des droits imprescriptibles des spectateurs de spectacles de rue, je ne transigerai pas sur cela. Mais, chère madame, permettez-moi de revenir sur l’excuse que vous nous avez donné en partant : quelle nullité de sur-jouer ainsi ! Madame, désolé de vous le dire, l’acteur ne sur-jouait pas, il jouait du Rabelais !

J’adore cet auteur depuis des décennies, c’est mon père qui me l’a fait découvrir et depuis je suis resté fidèle à la démesure, à la grandiloquence, à la truculence rabelaisienne… Oui, c’est ainsi. Je comprends parfaitement que l’on aime ou pas Rabelais même si bon nombre de ceux qui le critiquent ne le connaissent pas. Les goûts ne se discutent pas, on dit même qu’ils sont tous présents dans la nature…

J’aime l’idée qu’une troupe de théâtre puisse avoir comme objectif de faire plonger le public, le grand public, dans l’univers rabelaisien. L’objectif est ambitieux et l’expérience d’aujourd’hui a montré que pour une bonne partie du public ce fut objectif atteint ! Quant aux autres, je ne leur en veux pas et ils ne savent pas ce qu’ils perdent…

Ici, l’idée est simple. Un lecteur, avec le texte de Rabelais lui-même, nous emmène sur l’Isle Farouche. Mais comme le vieux françois n’est pas toujours à comprendre, les objets vont nous aider… d’une lecture classique à la Lucchini nous voici passés au théâtre d’objets, art narratif fascinant qui est très bien utilisé par la troupe Anonima Teatro…

Dans l’œuvre de Rabelais, pour ceux qui la pratiquent un tant soit peu, il y a de longues descriptions ancêtres de celles de Prévert. Une des séquences du spectacle montre que le théâtre d’objet se prête très bien à ces longues énumérations… Admirable…

Et comme la guerre entre Pantagruel et ses amis et les andouilles fait rage, un des membres de la troupe fait cuire tranquillement des saucisses, des vraies, à la plancha, une belle façon d’unir, à la fin du spectacle, acteurs, spectateurs, charcutier, andouilles et Rabelais… L’union parfaite, quoi !

J’ai passé un très beau moment littéraire et gastronomique, merci Rabelais pour ton génie, merci à la troupe Anonima Teatro d’avoir osé ce spectacle, merci au public chalonnais qui est exigeant et capable de plonger dans de tels délires, merci au Coteau des saveurs pour ces bien bonnes saucisses faites en Bourgogne !

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