Détruire dit-elle
de Marguerite Duras

critiqué par Fee carabine, le 30 septembre 2005
( - 50 ans)


La note:  étoiles
Les jeux du désir et de la mort
Un hôtel, isolé dans un parc, au milieu d'une forêt. Quatre personnages.
Ou pour mieux dire, un trio - Stein, Max Thor et son épouse Alissa, trois figures du destin tels les trois Parques -, et une femme seule, Elisabeth Alione, qui retient l'attention des trois premiers cités. Et c'est tout ce qui a lieu.

Il ne se passe rien, très littéralement rien. Rien que l'écoulement lent des jours, rythmé par les repas, la sieste et les promenades dans le parc. Des regards. Et des bribes de conversations. Parfois anodines - les nouvelles de la famille, la forêt, les insomnies... Parfois énigmatiques et quelque peu inquiétantes: "Détruire dit-elle".

Il ne se passe rien. Rien qui vienne détourner l'attention du lecteur de l'essentiel: les jeux troublants du désir, l'amour qui décidément n'est pas simple et l'ombre incertaine et vacillante de la mort.

Un rien étonnamment captivant.
Un livre très étrange et très beau.
Avec indications de théâtre. 7 étoiles

« Détruire dit-elle » est un roman. Quasi en huis clos. Et l’ouvrage se referme sur une note de Marguerite Duras : « Note pour les représentations ». Elle y explique le décor et donne des indications de mise en scène. C’est dire que ce roman est particulièrement statique.
Un hôtel, isolé près d’une forêt. Genre hôtel bon genre dans ville de cure. Trois individus qui se connaissent mais dont les rapports ne sont pas forcément des plus simples et une femme, isolée, qui va devenir le centre d’attention du trio. Avec supputations, remarques incompréhensibles, tentatives d’approche et de séduction. Ce sera le coeur du roman. Etonnant, troublant. On le termine sans avoir eu toutes les clés en main. Vanité, pourrait-on penser par moments. Vain est un adjectif qui pourrait venir à l'esprit. Mais ce n'est pas vain puisqu'il en reste quelque chose à l’issue de la lecture. C’est plutôt du vide. Du vide écrit, qui démontre par là que même dans le vide …
« - Madame, dit Stein. Madame, il y a dix jours que je vous regarde. Il y a en vous quelque chose qui me fascine et qui me bouleverse dont je n’arrive pas, dont je n’arrive pas, à connaître la nature.
Stein s’arrête et reprend.
- Madame, je voudrais vous connaître sans rien en attendre pour moi. »
Epique, non ?

Tistou - - 67 ans - 17 avril 2007