Autobiographie de personne
de Esther Orner

critiqué par Sahkti, le 24 août 2005
(Genève - 50 ans)


La note:  étoiles
Un passé trop lourd à porter
Esther Orner est née en Allemagne de parents juifs polonais. Après quelques années passées en Belgique, elle part en Israël avant de venir s'établir en France puis de retourner à Tel-Aviv, où elle vit désormais.
Ce parcours, celui de l'errance et de la recherche de sa terre promise, on le retrouve dans cette "Autobiographie de personne".
Le recueil se présente comme un long journal, une longue lettre qu'une femme écrirait, pour elle, pour rassembler ses souvenirs, pour raconter ce qu'est sa vie et la difficulté des relations avec les siens, en particulier sa fille.

Ecrit à la première personne, ce texte est rempli de symboles et de silences à décrypter entre les lignes. L'auteur y fait référence au "Pays de la mort", celui d'où elle vient qui a chassé et tué les Juifs. Elle évoque aussi "Le Pays de l'Aube", celui vers lequel tout le monde va ou retourne, cette terre qui apparait comme la providence et qui se révèle bien plus délicate et dure qu'on veut bien le dire.
A ces difficultés de trouver sa juste place sur cette planète, Esther Orner évoque aussi, avec beaucoup de sensibilité et d'intimité, les relations qui l'unissent à sa fille. Une fille qu'elle a aimée du mieux qu'elle pouvait mais maladroitement. Une fille partagée entre diverses langues, différentes cultures et autant d'exils. Une rancoeur en est née, une révolte aussi. Focalisée sur sa mère. Car il est sans doute plus facile de s'en prendre à quelqu'un, même si on l'aime plus que tout, qu'à la terre entière, muette et impersonnelle.
Entre la mère et la fille, beaucoup de révolte et de silence. Décalage de générations également. Et d'histoire. Car il est question, de manière invisible, de Shoah, d'exil, de souffrance et de mort. La narratrice possède et traîne un vécu lourd à porter, qui fait peur à sa fille et que celle-ci voudrait oublier pour regarder devant elle et non plus vivre avec les ombres du passé.

Beaucoup d'âme dans ce récit d'Esther Orner qui emploie un style vivant et animé, passant sans cesse du présent au passé, ajoutant un petit côté désordonné et brouillon aux souvenirs de la narratrice qui se perd dans ses pensées ou se laisse submerger par ses émotions.

Un lien pour la faire la connaissance de l'auteur:
http://francais.agonia.net/index.php/article/84737