Folie dans la famille
de William Saroyan

critiqué par MOPP, le 8 août 2005
( - 87 ans)


La note:  étoiles
Une envie de claquer des doigts...
Une envie de claquer des doigts, une envie de danser, de participer à la vie qui grouille autour de moi.

Cette envie provoquée par l'écriture de SAROYAN, le roi des textes courts, le roi de la prose souple, limpide, musicale, sans grands mots.

SAROYAN, le roi de la digression, écrit sans plan, sans projet, il se contente d'une anecdote pour entrer dans un monde parfois merveilleux : c'est le cas dans la courte nouvelle intitulée "Pique-nique". Au bord de la mer. Des enfants. Des parents. Un soleil dans les yeux. Un enfant s'attarde. S'éloigne du groupe. Marche. Laisse filer le sable fin entre ses doigts. La maman s'interroge. Le pourquoi de cette "fuite" ? Le papa ne trouve pas les mots. Pour expliquer le comportement du fils. Y a-t-il quelque chose à expliquer ?

Le sujets sont partout, il suffit d'être vivant.

L'auteur dira : "Je n'élabore pas une intrigue passionnelle. Je ne crée pas de personnages mémorables. Je n'ai pas un joli style." Cet Arménien écrit pour les gens ordinaires et c'est très bien, original (On ne peut pas demander à un Arménien d'être un Anglais)
Le roman des Saroyan 8 étoiles

Eric Neuhoff dans sa préface nous apprend que Saroyan fut longtemps un auteur-culte dont les livres n’étaient plus disponibles en français jusqu’à ce que Buchet Chastel les réédite.
Dix-huit récits courts souvent truculents qui pour la plupart nous dépeignent la famille Bashmanian, une famille d’Arméniens installés aux USA avec leur rites, leurs bizarreries, une attention constante portée aux enfants - qui m’ont fait penser à l'univers d'Isaac Bashevis Singer.

Ma nouvelle préférée fut « Sacré monde, dit le cycliste ». Un natif du village du narrateur aux Etats-Unis qui fait le tour du monde à vélo vient rendre une visite de courtoisie au narrateur qui vit à Paris le jour où sa femme le quitte à l’occasion de leur douzième anniversaire de mariage. Enervé, le narrateur ne peut recevoir comme il le devrait son hôte et s’attire les récriminations de ses filles qui assistent à ce mauvais accueil. Le narrateur ne veut pas annoncer la nouvelle à ses enfants et finit par les sortir en ville où au drugstore ils rencontrent l’homme pour lequel sa femme est censée l’avoir quitté...
Dans « Comment choisir une épouse », un vieil homme prodigue ses conseils à un homme sur le point de se marier, parmi lesquels celui-ci : « Choisis une fille parmi l’une ou l’autre des multiples familles du monde, ainsi, si elle se révèle être une étrangère, comme elle risque fort de l’être, au moins sera-t-il normal qu’elle soit une étrangère, et tu n’en seras jamais très étonné, ni ne te montreras incrédule, ou trop avide de faire d’elle autre chose qu’une étrangère. Va voir du côté des Norvégiennes »
Ou encore : « Si tu découvres que ce dont tu veux parler en présence de ton épouse n’est pas du tout ce dont tu parles, alors tu sais que la maladie t’a frappé. »
« Gaston » raconte sur le mode du dialogue entre un père et sa fillette venue en visite chez lui l’histoire d’un insecte qui vit dans le noyau d’une pêche. Le père, quand sa fille est partie, se retrouve comme la bête dans son assiette, exilé de son habitation, affreux, idiot, répugnant et ne servant à rien. C’est la nouvelle la plus directe et aussi la plus touchante du recueil.
Merci à Mopp pour cette suggestion de lecture.

Kinbote - Jumet - 65 ans - 2 novembre 2005