Des inconnues
de Patrick Modiano

critiqué par Palorel, le 1 août 2005
( - 43 ans)


La note:  étoiles
Triptyque en clair-obscur
Deux ans après Dora Bruder, Patrick Modiano revient avec Des inconnues, un livre composé de trois courts récits. Trois destins de femmes. Elles ont la parole et reviennent sur un moment clé de leur existence. Trois jeunes femmes anonymes, banales, aussi « indéfinies » que l’article contenu dans le titre. Notons que pour la première fois chez Modiano, le « je » (presque tous ses livres sont écrits à la première personne) est féminin. Il en sera de même, deux ans plus tard, avec La Petite Bijou. Trois femmes de l’ombre qui recherchent la lumière, une lumière sous laquelle elles se trouveront un instant, mais trop éphémère et pas assez nette (p. 36, la première de ces inconnues confie qu’elle « aurai[t] aimé une lumière encore plus crue et plus forte pour chasser les ombres. »). Un clair-obscur en somme, comme les affectionne tout particulièrement l’auteur de La Ronde de nuit. Un clair-obscur ou plutôt un triptyque en clair-obscur, pourrait-on dire pour poursuivre la métaphore picturale, tant les liens entre les trois récits semblent évidents (même s’il est parfaitement possible de les lire séparément). Un bien triste triptyque en tous cas, magnifiquement triste !
Trois destins croisés 7 étoiles

Ces trois femmes se ressemblent dans leurs échecs, leurs combats, leurs espoirs, leurs doutes et angoisses concernant leur passé. Ces trois destins semblent se croiser, l'histoire donne l'impression de se répéter de manière inéluctable, avec une même importance des lieux, de l'enfance, des douleurs passées à gérer.
Les ingrédients des romans de Modiano sont retrouvés ici, presque fidèlement, ce qui peut donner l'impression, généralement trompeuse, de facilité, en effet.
Ici, en l'espèce, l'idée est originale, pour décliner une nouvelle fois ses thèmes favoris ; mais cet opus manque de souffle, d'audace, d'originalité. Il aurait pu aller plus loin dans la comparaison, peut-être par un croisement. Je me suis senti un peu sur ma fin, bien que rasséréné par cette petite musique bien faite.
Donc, globalement, cela se laisse lire, avec un certain intérêt, mais ce livre manque un peu de flamme, de la profondeur habituelle retrouvée habituellement chez cet auteur, que j'affectionne.

Veneziano - Paris - 46 ans - 29 décembre 2014


La parole à la défense ! 7 étoiles

Pas d'accord avec l'amie Sahkti, ni avec Léonce Laplanche !

j'aime beaucoup Modiano et si mon souvenir de ce livre reste incertain (comme souvent avec les livres de cet auteur), il me reste en mémoire une lecture agréable, quelques images.

Evidemment, pas beaucoup d'action, les personnages restent flous, rien de vraiment défini, qui, quand, pourquoi, et après, rien n'est fixé, affirmé, le doute, l'errance, une sorte de lenteur contemplative ... Ce qui semble déplaire à Léonce chez Modiano est ce qui me séduit dans ces livres, ce vide brumeux et hésitant qui laisse la place à l'imaginaire du lecteur ....

Tophiv - Reignier (Fr) - 48 ans - 12 septembre 2005


homéopathique ! 3 étoiles

Ailleurs et en d’autres temps, j’avais émis une critique peu favorable sur cet ouvrage…. Et je m’étais fait incendier !
Bon c’est vrai je n’ai pas beaucoup d’atomes crochus avec Modiano qui reste pour moi un "crivain mondain et étriqué.
On m’avait en particulier reproché de n’avoir rien compris, je cite : “ aux histoires qui parlent au cœur des insignifiances de la vie ”. Je ne comprends pas très bien ce que j’ai manqué…. Mais c’est possible.
L’appréciation de Sahkti sur ce livre me rassure un peu ! Nous avons lu le même !

L’ouvrage comporte trois parties, l'auteur nous présente trois jeunes femmes.
A la fin de chaque histoire on n'a pas appris grand chose, pas même le prénom de chacune !
Le premier récit, juste pour donner une idée :
Une jeune femme dont on ne sait rien rencontre un homme dont on ne saura pas grand chose ! Entre eux on ignore les véritables relations. L'homme craint que sa compagne ne s'ennuie, et il lui donne des liasses de billets de banque pour qu'elle fasse les magasins
Elle s'achète un imperméable et des chaussures !

Les deux autres récits sont encore plus haletants !

Le roman est bien écrit, et l'on arrive à le lire... mais il ne se passe rien.
Nous sommes effectivement dans l’insignifiant, mais trois fois rien c’est pas grand-chose !
Beaucoup d'errance dans Paris, des soirées au cinéma ou au restaurant, des noms de rues tout le temps. Au moins on sait où l’on est, ça rassure les inquiets.

Léonce_laplanche - Périgueux - 87 ans - 11 septembre 2005


Que Modiano peut être fainéant! 1 étoiles

Trois nouvelles, trois portraits, trois femmes à découvrir et explorer. Pourquoi pas... Vu et déjà vu mais en même temps, tellement plein de promesses. Sauf qu'ici, Modiano n'arrive pas à se dépêtrer des clichés. L'impression plus d'une fois de lire un Harlequin un peu plus intello et mieux écrit, sans plus.
Premier récit, le cliché de la jeune fille désabusée qui monte à Paris et y rencontre l'amour, le temps d'une liaison d'un mois. Que c'est banal, que c'est mauvais comme scénario. Rien d'imprévisible ne se passe, le temps s'écoule et puis voilà, l'homme disparaît et la pauvrette se retrouve bien malheureuse. Sans compter que comme dans les mauvais films, tout s'arrange pour elle, elle a des amis sur place, Paris n'est pas un enfer, loin de là, c'est si facile.
La seconde nouvelle avait une allure intéressante, une jeune pensionnaire dans un endroit sévère qui rêve d'une autre vie, s'amuse à Annecy et finit par s'en sortir. Autre scénario bien téléphoné mais Modiano va cependant un peu plus loin que dans le premier texte, il détaille les efforts et la soufffance. Enfin son héroïne semble réelle! La fin gâche tout. Facile, simpliste même, une pirouette de fainéant qui n'a pas envie d'aller au fond des choses.
Le dernier récit ne va nulle part! Pas terriblement bien écrit, il raconte l'approche, par un groupe de joyeux illuminés mi-sectaires mi-mystiques, d'une jeune fille débarquée de Londres à Paris pour surveiller le studio d'un ami. Naïve et esseulée, la jeune fille se laisse avoir par ces gens. Point barre. Sont-ils pervers, peu scrupuleux, gentils, naïfs eux-aussi, dominés ou dominants... le lecteur n'en saura rien et Modiano ne lui laisse même pas quelques pistes utiles pour imaginer soi-même la suite. Cela s'achève à nouveau avec une fin facile. Voilà qui ne me réconcilie guère avec cet auteur auquel j'ai plus d'une fois reproché d'écrire le même livre. Un ami m'a dit un jour "Peut-être ne peut-il pas faire autrement, il ne sait pas écrire autre chose". Doute de ma part... vérification faite! Dès qu'il parle de quelqu'un d'autre que lui et ses petits soucis habituels, on tombe dans le plat du plat. Pas pour moi!

Sahkti - Genève - 49 ans - 10 septembre 2005