Elisabeth Costello, huit leçons
de John Maxwell Coetzee

critiqué par Tistou, le 31 juillet 2005
( - 67 ans)


La note:  étoiles
Huit leçons.
Eight lessons, c'est le titre original. C'est traduit rassurez-vous ! Sur la couverture apparait simplement Elisabeth Costello. A l'intérieur, en sous-titre ; Huit leçons.
Coetzee, écrivain Sud-africain blanc, prix Nobel de littérature. Ca, c'est pour situer le contexte. Il endosse la personnalité d'Elisabeth Costello, écrivain australienne, qui a connu son heure de gloire très tôt, qui est définitivement cataloguée à l'aune de cette heure de gloire, et qui continue à intervenir publiquement ; conférences, discours. C'est par le biais de ces interventions que Coetzee fait vivre son Elisabeth, un tant soit peu excentrique, et nantie d'une bonne dose de self-confiance comme quelqu'un qui a déja connue le succès. Et puis, et puis c'est la fin de sa vie, l'heure des regards en arrière, des remises en question, jamais facile tout ça !
Coetzee nous campe un fier personnage en la matière d'Elisabeth Costello. Il doit bien y avoir une bonne dose de ses doutes à lui, de son comportement vis à vis de la chose d'écrire.
L'écriture est très accessible, mêlant déboires de la vie d'une romancière vieillissante à des considérations plus philosophiques.
Une intellectuelle face au Mal 6 étoiles

Où l'on suit Elizabeth Costello au fil de huit conférences, huit discours, huit leçons données autour du globe. Elizabeth Costello est une romancière australienne vieillissante, pessimiste, fatiguée mais à l'intelligence toujours aux aguets. Une intellectuelle qui ne se reconnaît plus dans son siècle, toujours prête à en découdre lorsqu'il s'agit d'évoquer le problème du Mal, le thème sous-jacent de ce livre, qui oscille entre roman et essai. La littérature peut-elle (doit-elle) s'intéresser au Mal?
Il faut reconnaître à Mme Costello un caractère bien trempé. Elle assène ses idées, souvent dérangeantes, sur ses amies les bêtes avec force et conviction. Elle n'hésite d'ailleurs pas à comparer le traitement des animaux dans les abattoirs avec la Shoah. Un parallélisme qui provoquera, on s'en doute, chez certains, un tollé d'indignation. Elle n'hésitera pas, au cours d'un discours à Amsterdam sur le problème du Mal à démolir le livre d'un de ses confrères, Paul West, invité à cette même conférence. Une femme pour qui les idées priment par dessus tout. Même ses relations familiales en pâtissent, que ce soit avec son fils, sa belle-fille, sa sœur religieuse. Et c'est en cela que se personnage m'a un peu dérangé. Sous la volonté d'accéder à plus d'humanité, elle se coupe elle-même de toute humanité. Sa relation aux autres est toujours conflictuelle. A la fin, à la question "Croyez-vous en la vie?", elle ne saura pas répondre. Ce qui est un peu plus intéressant au fil de ses huit discours, c'est de voir l'évolution de sa pensée. Là où au début, elle semble forte, assurée dans ses idées; elle se pose plus de questions au déclin de sa vie. Un livre toujours intelligent mais souffrant, selon moi, de quelques lourdeurs.

Nothingman - Marche-en- Famenne - 44 ans - 3 avril 2006