N'oubile pas la baueté du désodrde
de Timotéo Sergoï

critiqué par Débézed, le 9 novembre 2025
(Besançon - 78 ans)


La note:  étoiles
Jeux de lettres et de chiffres
Dans ce nouveau P’tit cactus, Timotéo Sergoï jongle avec les lettres et les mots dans des jeux certainement absurdes mais aussi pleins de créativité et de finesse. Dans ses aphorismes, sourd une pointe de finesse et des réflexions très pertinentes cachées derrière les jeux qu’il s’amuse à créer dans ses textes. Dès le titre, le ton est donné, les lettres sont les bonnes mais elles se baladent dans les mots de façon plutôt aléatoire, tout comme les nombres qui servent à numéroter les chapitres et les aphorismes qui sont tout à fait fantaisistes. Comme le dit l’auteur pour commencer son recueil : « Tu te trouves exactement au bon endroit pour lire quelque chose de beau ». Comment ne pas lui faire confiance ?

Si l’utilisation des lettres, des mots et des nombres est totalement fantaisistes le sens de certains textes ne l’est pas moins. « J’ouvre mon pinson. Aussitôt, toutes les fenêtres s’envolent ! ». L’auteur dit le monde tel qu’i le voit : « L’humain est habillé de moi, comme je suis vêtu de foules » et, parfois, tel qu’il est : « L’univers, catastrophe tranquille et lumineuse, couvre l’Humanité, chatoyant bordel cannibale ». il dit aussi les hommes, comment ils sont, comment ils se comportent. « Se lever pour ne rien dire ? il y a pire. Dire pour ne rien lever ». Sentences, maximes, Jeux sur le fonds et sur la forme, Timotéo fait feu de toutes formes pour montrer son univers littéraire. Il crée même de véritables petits bijoux de poésie totalement absurde et tellement drôle : « L’ai-je dit ? L’ai-je su ? L’ai-je neigé ? Ou l’ai-je plu ? Nuage dit, nuage vu, nuage du mots lus ».

Il montre le monde tel qu’il est noyé sous des nages de publicités absconses, infecté par les messages des chaînes de télévision souvent nourries par les discours d’animateurs et d’experts plutôt ignares. Un monde de communication pour inciter des consommateurs gogos à consommer toujours plus comme des robots programmés par des « IA » déshumanisées. Timotéo dénonce tout ça en déployant des paradoxes percutants, des homonymies téméraires, des contresens assassins, des mots utilisés à contremploi dans des assonances qui jouent aussi bien sur le sens que sur le son. Toul un jeu de lettres et de mots pour dire le monde autrement sans négliger la dénonciation de tous les abus qui le gangrènent.

Et n’oublions pas les jolies lettrines qui précèdent chaque chapitres même si elles ne se conforment pas l’ordre arithmétique habituel. Le compte est bon même si les chiffres sont dans le désordre comme le calendrier de Sergoï : « Février marque avril, mais joint juillet ou septembre ».