Juste avant la frontière
de Julien Bouissoux

critiqué par Clarabel, le 20 janvier 2005
( - 48 ans)


La note:  étoiles
Sous le charme
"Juste avant la frontière" c'est l'histoire de Samuel Elliot qui, sorti de sa promotion, est parti en mission dans un pays qui n'est jamais nommé (mais l'éditeur se base sur "une des capitales, là-bas, à l'Est, à Prague ou Budapest"). Initialement parti pour deux ans, il a renouvelé son contrat pour deux années supplémentaires. Et le roman parle de sa dernière journée dans ce pays, de ses quelques heures avant son départ pour Paris, bref de ses errances "juste avant la frontière". En une journée, le jeune homme va beaucoup marcher : prendre un dernier bain brûlant, rendre les clefs de son appartement, prendre un dernier verre dans un bar et marcher le long du fleuve, près du château et laisser ainsi ses pensées vagabonder. Car Sam a beaucoup de mal à partir, à quitter ce pays où il s'est laissé envahir par le charme, la beauté, la tristesse et le désespoir. Dans ce pays, il a eu aussi des rencontres marquantes : celles avec Katia, Judit, Niko et Riki. Toutes ont pour lui le souvenir de soirées arrosées, émoustillées et sensuelles, de sorties dans des restaurants ou à l'opéra, de flâneries au bord de l'eau... Passé et présent se mélangent dans la tête du narrateur, "mixed feelings in my head"... Et tout ça est raconté platoniquement, d'un ton assez las et blasé, parce que le jeune homme est déchiré entre ce qu'il voudrait bien et ce qu'il cherche à tout prix à comprendre. Et ce n'est pas facile : j'ai suivi ses inquiétudes et ses états d'âme en me sentant charmée par l'écriture de l'auteur. Je n'avais jamais ressenti ce magnétisme innommable pour un récit où il est question de peu de choses. Car ce n'est pas un récit truffé de détails, le narrateur a des trous de mémoire, il le reconnaît mais ce n'est pas grave, après tout. C'est finalement son travail de deuil, son acceptation au départ vers un nouveau lendemain. Pour reprendre ses dires, "C'est bien de sentir que l'on a vécu, qu'il y a eu de la vie, et de tout oublier. C'est bon de sentir qu'il y a eu de la joie, et si ça ne reste pas, je ne suis pas triste, je me dis que ce n'est pas grave. Je ne sais pas si c'est essentiel de se souvenir de tout.". Et moi d'être séduite par ce jeune auteur dont je vais lire très prochainement les premiers romans...