Ma grande famille
de Karin Bojs

critiqué par Colen8, le 14 avril 2024
( - 82 ans)


La note:  étoiles
Un brassage génétique continu vague après vague
Le scénario des trois migrations majeures de Sapiens en Europe se précise. Les chasseurs-cueilleurs de l’âge de pierre croisant quelques temps Neandertal au Proche-Orient 54 000 ans avant notre ère ont été identifiés jusqu’au nord-ouest de l’Europe. En témoignent les artéfacts définissant des périodes de mieux en mieux connues(1). Leurs descendants futurs agriculteurs établis vers le Caucase et le Moyen Orient durant 30 000 ans, se sont dispersés à leur tour selon plusieurs routes terrestres et maritimes après la dernière période glaciaire. Enfin la révolution agricole et la domestication animale ont porté des groupes restreints du Croissant fertile à migrer de proche en proche pendant encore quelques millénaires.
Variations climatiques, mutations génétiques et migrations sont allées souvent de pair sur ces très longues périodes. A partir des vestiges préhistoriques les datations scientifiques se sont faites plus fines et précises. Au-delà des analyses sur les divers ADN(2) la détermination des haplo-groupes(3) permet de reconstituer la génétique des Européens modernes et de montrer les brassages ayant eu lieu. En plus de l’héritage d’environ 2% d’ADN-Y néandertalien la dispersion géographique des chasseurs-cueilleurs se retrouve aujourd’hui dans l’haplo-groupe « U » repéré majoritairement parmi leurs descendants, tandis que ceux des premiers agriculteurs appartiennent à l’haplo-groupe « H » et ainsi de suite.
Journaliste scientifique passionnée de généalogie la Suédoise Karin Bojs a su conjuguer en une vaste enquête l’histoire de ses ancêtres avec celle allant du Paléolithique ancien aux Européens contemporains. Elle a épluché les sources disponibles et s’est appuyée sur les techniques récentes ayant abouti aux haplo-groupes. Ayant aussi rencontré pas mal de chercheurs et d’experts chez eux ou à l’occasion de séminaires, elle a pu confronter leurs éventuelles divergences, n’hésitant à balayer le terrain de la Scandinavie au pourtour méditerranéen jusqu’à la Syrie à l’est, le Canada et les Etats-Unis outre Atlantique. Son récit vivant et parfois romanesque fourmillant d’anecdotes réserve quelques surprises.
(1) Le gravettien et l’aurignacien auraient migré du Proche-Orient il y a 50 000 ans en vagues séparées, des traces de l’aurignacien sont apparues il y a 35 000 ans, tandis que celles du gravettien disparaissaient il y 20 000 ans à peu près au moment où l’on identifiait Cro-Magnon…
(2) ADN autosomique prélevé dans un quelconque noyau cellulaire, ADN-mt (mitochondrial) transmis seulement par les mères, ADN-Y de la cellule germinale masculine transmis exclusivement aux garçons
(3) Les haplo-groupes identifiant des mutations chromosomiques particulières permettent de déterminer l’appartenance à la même branche d’un arbre généalogique aussi loin que l’on remonte, autrement dit les groupes ayant une ou un même ancêtre commun. Les analyses fines les décomposent ensuite en séries de sous-groupes emboîtés les uns dans les autres.