Matta: On the Edge of a Dream
de Thomas Monahan

critiqué par JPGP, le 24 septembre 2023
( - 77 ans)


La note:  étoiles
Robero Matta dernier des surréalistes ?
Ce livre retrace la vie et l'eoeuvre de Roberto Matta (1911-2003). L'artiste fit d'abord des études d'architecte, puis monta une affaire de décoration à Santiago . Il l'abandonna pour voyager en Italie, en Espagne, en Yougoslavie et en Russie.  En 1934, le Chilien travaille dans l'atelier de Le Corbusier puis rencontre en France l'Anglais Gordon Onslow Ford. Ils décident de devenir peintres. Matta fait la connaissance de Picasso, Dali et Breton qui l'encouragent vivement.

En 1938 il peint ses premières grandes toiles et réalise la série des Morphologies psychologiques qui resteront sa marque de fabrique. En 1959, Matta et Ford rejoignent aux Etats-Unis. Le premier établit le contact entre les peintres amé­ricains et les surréalistes exilés. Il participe alors aux principales ex­positions surréalistes et, dans ses peintures, les personnages apparaissent de plus en plus émaciés. On reconnaît là un style voisin de Wilfredo Lam dans des œuvres aux titres emblématiques « Le Vertige d'Eros », « Pour échapper à l'Absolu », « L'Espace et le Je », « Les Célibataires quarante ans après ».

Peu à peu la peinture de Matta devient engagée. Le Chilien y caricature les hommes en les transformant en monstres filiformes afin d’accuser la société et stigmatiser ses vices (« Le Sexspectacle » 1953). Ses peintures se transforment soudain un fouillis de signes graphiques mêlés, entrelacés dans une forme de lyrisme plastique ( « La Pomme du Savoir », «  Elminonde », « Science, Conscience et Patience du Vitreur.).  Revenant en 1949 en Europe, Matta séjourne en Italie et en France, puis est exclu du groupe surréaliste. Mais il reste un des artistes essentiels de la seconde moitié du XXème siècle.

Secret, résistant, intuitif, charismatique, passionné, loyal dans ses engagements Matta restera un travailleur persévérant, indomptable, ambitieux sans doute. Il est le type même du créateur doté autant de grandes possibilités intellectuelles et imaginatives que d'une curiosité profonde. Les énigmes et les mystères ne cessent de la passionner. Secret, plutôt introverti, il trouve dans l’art le moyen de sortir de lui-même et tout au long d’un travail obstiné il invente une œuvre pleine de vie, de force mais aussi d'ironie et de causticité. S’y cache toujours le sens de la provocation. Elle n’a rien cependant de factice et du superficiel et tente de faire surgir des plis de l’âme comme ceux du réel.

Jean-Paul Gavard-Perret