Djebel Amour
de Roger Frison-Roche

critiqué par Tistou, le 2 mars 2023
( - 67 ans)


La note:  étoiles
Un vrai Djebel, une vraie princesse …
Djebel (massif montagneux en arabe) Amour existe réellement, en Algérie, 400 à 500 km au sud d’Alger, légèrement à l’ouest de Laghouat. Un nom pas forcément dédié au sentiment mais plutôt une référence à la tribu bédouine des « Amours », encore que Roger Frison-Roche évoque lui plutôt une déformation d’un terme arabe (ou berbère ?) signifiant grand.
Quant à Aurélie Picard, alias Lalla Yamina Tidjani, modiste de Haute-Marne qui a fini princesse aux confins du Sahara, elle a effectivement existé, seconde moitié du XIXème siècle. Et c’est son histoire, romancée, que nous raconte Roger Frison-Roche dans ce roman.
Dans un avant-propos, il raconte comment cette histoire singulière lui est parvenue :

»J’ai découvert Kourdane, où se passe une partie de l’action de ce roman, en 1949. Pour être précis, le 10 juin. J’accomplissais pour le compte de « l’Echo d’Alger » une grande enquête dans les coins les plus reculés de l’Algérie, ceux qui étaient restés à cette époque en marge de notre colonisation. Traversant le Djebel Amour en jeep, accompagné de mon ami le dessinateur Charles Brouty, j’arrivai un matin en vue du palais de Kourdane, construction insolite au pied de l’Atlas saharien, face à l’immensité du Sahara. Le palais et ses annexes gisaient dans le silence et la touffeur de l’été saharien. Les jardins abandonnés étaient envahis par les ronces, les jujubiers, l’alfa et l’odeur pénétrante du chikh flottait sur les ronciers, anciens parterres de roses revenus à l’état sauvage. »

Aurélie Picard, issue d’une famille modeste de Montigny Le Roi, en Haute-Marne, est promise à une existence terne et peu glorieuse quand elle est remarquée par la propriétaire du château d’Arc en Barrois. Promue dame de compagnie de la femme du ministre des Postes, elle la suit dans son exil à Bordeaux pendant la guerre de 1870 et rencontre là Si Ammar Tidjani, petit-fils du fondateur de la confrérie des Tidjani, qui jouit d’un pouvoir spirituel considérable sur le Maghreb et qui a été « exilé » à Bordeaux dans le cadre des manœuvres du colonisateur français qui souhaitait se faciliter la tâche. Ils tombent amoureux mutuellement et s’emploient à vaincre les préjugés et convenances qui empêchent tout mariage à cette époque entre une Française et un « indigène ».
De modiste et dame de compagnie, le destin d’Aurélie Picard, dorénavant Lalla Yamina Tidjani, va devenir celui d’une princesse saharienne puisqu’elle va faire bien plus que seconder son mari …
Roger Frison-Roche a fait les choses en grand et reprend toute l’épopée en la resituant dans le contexte d’une colonisation qui s’arrêtait au bord du Sahara pour nous raconter ce destin incroyable.
Ce pourrait n’être qu’une histoire mièvre au lourd pathos, ça s’avère un roman semi historique dans lequel transparait l’intérêt de l’auteur pour les contrées sahariennes.