Graal
de Philippe Sollers

critiqué par JPGP, le 15 février 2023
( - 77 ans)


La note:  étoiles
Solitude et multiplicité : Philippe Sollers
Sollers n'est plus à la mode, il est même boudé comme pour le punir d'avoir si longtemps tenu le haut du pavé littéraire. Néanmoins, en dépit de son âge avancé il sait toujours faire vibrer la langue, soulever la verve en osant ce qui par certains semblera une hérésie : à savoir faire cohabiter l'Evangile de Jean et Sade en son "principe de délicatesse"

Ce roman (puisqu'il est dénommé ainsi par l'auteur) tient plus d'un essai, d'une biographie et de fable L'auteur s'y veut toujours léger (c'est une de ses politesses) pour cacher se profondeur métaphysique. Son "Graal" n'est pas seulement la coupe de Jésus lors de la Cène, le fameux objet de la quête arthurienne ou l'objet sexuel de tous les désirs, mais l’esprit de solitude, la sexualité transgressive, la liberté d’esprit donc Sollers "himself".

Mais il n'est pas tout seul. Il y a là sa tante incestueuse qui l'initie par la bande (c'est le cas de le dire) à une philosophie dans le boudoir et qui lui fit oublier une scène traumatique de sa prime enfance où, par le même "outil" que sa parente allait employer pour titiller sa libido, il fut asservi à la cruauté d'une amie de ses soeurs dont l'une après cet épisode, n'aura cesse de le protéger .

Les femmes se succèdent donc très vite et les contraires se rassemblent avant qu'elles soient d'une certaine réunies sous la bannière d'un dieu catholique et romain. Existe donc là une fable génésique où jaillit l'image du migrant actuel dont le nombre menace mais qui demeure un frère. Si bien que le "Graal" se démultiplie, lie l'église à d'autres croyances extrême orientale comme à l'orgue de J-Sébastien Bach.

Jean-Paul Gavard-Perret