D'un seul geste: Trilogie, vol.II
de Claude Luezior

critiqué par JPGP, le 21 décembre 2022
( - 77 ans)


La note:  étoiles
Claude Luezior face au silence
L’imaginaire et le réel remarquablement travaillés par la langue du poète fribourgeois font que les notations-évènements à caractère descriptif deviennent l’objet d’une transformation plus existentielle que « littéraire ». La mutation des formes d’écriture s’opère dans la réduction et la densité et l’enrichissement de la langue au moyen d’images qui effacent les contingences pour les densifier. Par exemple Luezior transcende la lutte de la femme (une amie poétesse de l’auteur) devant la maladie : « elle est là devant toi / et ton aiguille vile / elle est là, poitrine offerte / victoire de Samothrace / à la proue des embruns / elle qui brise le tumulte / du crabe qu’elle défie » et afin de parachever sa lutte le poète ajoute : « la vestale respire / de son verbe / de ses murmures / déjà / elle nous donne la vie ».

Luezior renverse donc les données dites objectives : l’espoir est l’étincelle qu’il jette au vent de la vie pour faire resplendir une sorte d’au-delà. Mais ici-même, ici bas. Le poète ne lâche rien : certes par essence la vie use mais il s’agit de faire résistance contre le silence : le poème devient le cri des oiseaux en plein vol. Comme eux il s’agit aller au-delà des neiges et des rochers pour atteindre les mots parfois encore indéchiffrables qui font taire le mutisme.

Jean-Paul Gavard-Perret