Un album de jeunesse
de Guillaume Apollinaire

critiqué par JPGP, le 17 décembre 2022
( - 77 ans)


La note:  étoiles
Guillaume Apollinaire : Wikhem passe la main
A l’époque de ce premier album (inédit sorti de la bibiothèque de Pierre Berger) Guillaume Apollinaire n’est encore que Wilhem de Kostrowitzky. Il est élève au collège Saint Charles de Monaco où sa mère Angelika aurait fait scandale par ses amours avec le frère de l’archevêque de la Principauté. Le futur auteur ne cultive aucune ambition poétique ou littéraire. Néanmoins ce carnet témoigne d’une belle créativité parfaitement restituée par ce fac-similé d’une grande qualité (au verso des pages sont restituées jusqu’au traces d’encre du recto suivant).
Apollinaire s’y amuse, casse l’ennui scolaire à l’aide de dessins (vieille femme en train de tricoter, des vues familières de la Côte d’Azur et de l’arrière-pays) et de poèmes parfois induits par la modernité de l’époque (« Noël») parfois en reprises décalées des formes désuètes tel que le rondeau. L’album est un carnet de bord au fil des jours : une sensibilité aigue est bien présente. L’auteur cultivant une rêverie selon des angles inattendus est déjà en germe. Les dessins sont parfois perfides (un prêtre solitaire, tel un amoureux transi, grave le nom de Jésus sur l’écorce d’un arbre…). Un tel ovni est aussi touchant qu’intéressant : la jeunesse s’y infiltre loin des regrets et de la raison. Il faut se laisser bercer et prendre par une telle dérive figurale et poétique.

Jean-Paul Gavard-Perret