Sur la Route 66
de Stéphane Dugast

critiqué par Septularisen, le 29 juillet 2022
(Luxembourg - 56 ans)


La note:  étoiles
ROUTE 66 REVISITED!
Tout le monde connaît la mythique «Route 66», long ruban d'asphalte qui traverse l’Amérique de part en part et qui pour beaucoup est plus qu'une route, c'est «la route», véritable mythe des grands espaces américains. Ce «morceau» du Patrimoine Américain, l’écrivain et reporter Stéphane DUGAST (*1974) l'a parcouru en 2011, avec le photographe Christophe GÉRAL, sur une moto Harley Davidson, depuis Chicago en bordure du lac Michigan jusqu'à Los Angeles au bord de l'Océan Pacifique…

Je dois dire que je me réjouissais de lire ce livre! Pensez-vous, l’histoire de deux «Bikers», qui décident de «faire» la mythique Route 66, en Harley et à l’ancienne, sans GPS, sans assistance, avec juste leur envie de partir à l’aventure, et des cartes routières… Le tout dans une langue simple, dans un petit livre (moins de 200 pages) et qui se lit en quelques heures, qui parle d’une Amérique profonde et authentique, de personnages, de rencontres, de paysages…
Que demander de plus, d’un honnête livre de voyage ?..

Et bien qu’il soit honnête et juste! Justement! Parce que, malheureusement pour moi, c’est loin d’être le cas ici… Passe encore sur les fautes concernant l’histoire américaine, tout le monde n’est pas féru d’histoire, sinon cela se saurait… Mais tout de même quelques heures de recherche supplémentaires auraient évité de dire de grosses bêtises… P. ex. Pg. 34 : et non M. DUGAST, le premier gratte-ciel américain n’a pas été construit en 1885 à Chicago, mais à New-York en… 1873!..

Passons aussi sur les jugements à l’emporte-pièce totalement ridicules : Pg 105-106 p. ex. : «C’est à la nuit tombée que nous passons à Vila de Cubero, une localité située en plein désert où Ernest Hemingway (1899 – 1961) a rédigé (?) – étrange paradoxe – un roman maritime (??) considéré (???) comme un chef-d’œuvre, «le Vieil Homme et la Mer». (1) Beh… Disons que c’était tellement «considéré» comme un chef-d’œuvre de la littérature que cela lui a «juste» valu le Prix Pulitzer et le… Prix Nobel de Littérature!..

Passons encore sur des réflexions dignes d’un enfant de quatorze ans : Pg. 145-146 p. ex. : «Ce soir, ce n’est pourtant pas de la Country Music que nous allons écouter mais un karaoké reprenant tous les standards du rock US, dont l’entêtant «Born in the USA» de Bruce SPRINGSTEEN. (2)
De la chanson phare de celui que l’on surnomme ici le Boss, je découvre avec étonnement la teneur des paroles. (??) La chanson raconte en fait le retour au pays d’un vétéran de la guerre du Vietnam et le rejet qu’il subit de la part de ses concitoyens». (…)
La chanson «Born in the USA» datant de 1984 et la première édition de ce livre datant de 2011, il a vraiment mis 27 ans (!!), pour comprendre le sens exact et les paroles de cette chanson?
Les fans du «Boss», dont je suis, et que je sais nombreux sur ce site apprécieront…

Mais, le pire ce sont les procès d’intention qu’ils font aux autres touristes qu’ils croisent sur la 66, notamment quand ils arrivent a «Monument Valley», n’hésitant pas une seconde à les traiter de «cons», de «moutons de Panurge», de «troupeau» quand ce n’est pas carrément de «lobotomisés»! Pg. 134-135. Franchement ce n’est pas parce que tu viens de parcourir 4.500 Km en Harley pour arriver là, et que les autres touristes sont en tongs et arrivent en autobus, que cela vous autorise à parler d’eux avec un langage aussi ordurier!..
Enfin, les deux auteurs, faites preuve d'un peu d'empathie pour les autres personnes... Ne pouvez-vous pas imaginer une minute que, peut-être, tout le monde n'a pas les moyens financiers pour faire un voyage comme le votre? Et que donc certains viennent en autobus? Incroyable d'avoir encore des préjugés et d'écrire des phrases pareilles en 2011!

On l’aura compris, je finis plutôt très désappointé par ce livre, c’est loin, mais alors très loin de ce à quoi je m’attendais. Je suppose que ce livre a très mal «vécu» son passage au format de poche, et la suppression des photos de l’aventure, qui sans doute donnaient plus d’intérêt et un «sens» différent au livre… Malheureusement pour moi, c’est la version poche sans les photos que j’ai choisi de lire… Toutefois, cela ne justifie pas et surtout n’excuse pas les commentaires et autres jugements «à l’emporte-pièce» des deux auteurs, commentaires vraiment indignes de deux grands reporters comme le sont Messieurs DUGAST et GÉRAL!

P.S. : Passons aussi sur la préface écrite par M. Philippe LABRO, véritable monument d’auto-satisfaction littéraire, par le «Pape» auto-proclamé des États-Unis d'Amérique, le tout simplement pour l’avoir parcourue dans tous les sens, quelques années avant que cela ne devienne vraiment à la mode!..

(1) : Cf. ici sur CL : https://critiqueslibres.com/i.php/vcrit/451
(2) : Cf. ici sur CL : https://critiqueslibres.com/i.php/vcrit/54464