On connaît effectivement peu les talents de nouvelliste de Zola qui a pourtant écrit nombre de textes courts (contes et nouvelles) victimes de l'ombre projetée de cette œuvre gigantesque que sont les Rougon-Macquart. Et c'est apparemment dommage...
Ce petit recueil de la collection Librio à 2 euros nous en offre ici un échantillon qui révèle à la fois une inspiration aux multiples facettes et une étonnante maîtrise du texte court. Il s'agit d'œuvres de la maturité écrites après 1875 et publiées dans les années 80 alors qu'il était déjà engagé dans la création de son immense fresque.
On y retrouve son écriture très accessible, souvent animée d'un souffle puissant (notamment dans les deux nouvelles centrales "Nantas" et "L'inondation") à laquelle vient s'ajouter ici une construction du récit d'autant plus dynamique qu'elle doit obéir aux contraintes de la forme, chaque histoire captant notre intérêt d'un bout à l'autre.
Outre la curiosité engendrée par la méconnaissance de ce volet de l'œuvre, j'avais été interpelée par le thème de la première nouvelle "La mort d'Olivier Bécaille" en ce qu'il rejoignait une angoisse profonde et personnelle: être enterrée (ou brûlée ) encore vivante. Néanmoins, le choix de raconter l'expérience vécue à la première personne, s'il la rend plus réaliste atténue l'effet d'angoisse en accréditant d'emblée l'hypothèse d'un après.
La seconde "Nantas», plus proche de la veine de certains romans des Rougon-Macquart nous raconte l'ascension prodigieuse d'un fils de maçon dévoré d'ambition. Là encore, j'oserai émettre quelques réserves quant à la crédibilité à la fois des circonstances qui en permettront le déclenchement et du dénouement.
A noter que les deux mettent en avant au final un aspect sympathique et attachant qu'est celui de la valorisation de l'amour au détriment de son égoïsme personnel ou du pouvoir et de l'argent.
"L'inondation" inspirée d'un fait réel - à savoir la plus terrible crue que la Garonne ait connue de mémoire d'homme en 1875 - à mon goût la plus réussie, la plus poignante, la plus dramatique, illustre avec brio le combat impuissant de l'homme contre la nature. Zola a su avec un remarquable talent, de rebondissement en rebondissement, entretenir et relancer la tension, maintenir l'espérance...
Quant à la dernière, dans un registre cette fois très léger, "Les coquillages de Monsieur Chabre", elle nous transporte sur la côte bretonne, près de Guérande. C'est une histoire de vieux barbon (pour l'époque) naïf cocufié qui ne manque pas de sel! Zola s'y révèle tout autant à l'aise et ses descriptions de la nature et des villages ou encore de la pêche à la crevette nous donnent envie à nous aussi, c'est vrai, d'aller y faire un tour pour respirer l'air de la mer et s'y gaver de coquillages !
Myrco - village de l'Orne - 75 ans - 11 août 2013 |