Connemara de Nicolas Mathieu

Connemara de Nicolas Mathieu

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Alma, le 11 août 2022 (Inscrite le 22 novembre 2006, - ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 3 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (25 052ème position).
Visites : 1 372 

La peinture d'une époque

(extraits de la 4e de couverture)
Hélène a bientôt quarante ans, deux filles et vit dans une maison d’architecte sur les hauteurs de Nancy. Elle a réalisé le rêve de son adolescence : se tirer, changer de milieu, réussir. Et pourtant le sentiment de gâchis est là, les années ont passé, tout a déçu.
Christophe, lui, vient de dépasser la quarantaine. Il n’a jamais quitté ce bled où ils ont grandi avec Hélène. Il n’est plus si beau, il vend de la bouffe pour chien, rêve de rejouer au hockey comme à seize ans,
Et pourtant il croit dur comme fer que tout est encore possible.

CONNEMARA est un roman dense et riche que j'ai lu avec plaisir et avidité, non pour l'intrigue amoureuse entre Hélène et Christophe, mais bien plutôt pour la variété des situations et des personnages socialement différents qu'il présente, pour la variété d'une écriture au spectre large aussi à l'aise dans les descriptions à dimension poétique que dans les passages les plus triviaux et pour la grande souplesse de sa structure narrative.

Mais …...je dois avouer qu'en cours de lecture, j'ai aussi souvent soupiré …...., notamment au cours des nombreuses séquences ponctuées d'un langage spécifique : langage managérial propres aux carrières commerciales ou langage sportif propre au hockey sur glace.
J'ai aussi soupiré face à la longueur d'autres scènes : notamment celles des soirées entre copains, celle de l'accouchement, de la noce.
J'ai enfin soupiré face à la présence de personnages stéréotypés appartenant tant aux classes sociales aisées ( parents de Charlotte en vacances à l'île de Ré, couple Hélène et Philippe avant la naissance de leurs filles) qu'aux classes modestes ( invités à la noce) .

Cela fait beaucoup de soupirs me direz-vous !
Certes, mais, en fait, le roman me semble présenter les défauts de ses qualités . Il constitue une fresque qui fourmille de détails, le tableau d'une société prise dans toutes ses composantes humaines et sociétales, ce qui entraîne parfois l'auteur au delà du nécessaire .

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Les éditions

  • Connemara [Texte imprimé], roman Nicolas Mathieu
    de Mathieu, Nicolas
    Actes Sud / Domaine français (Arles)
    ISBN : 9782330159702 ; 22,00 € ; 02/02/2022 ; 400 p. ; Broché
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Partir ou rester

6 étoiles

Critique de Marvic (Normandie, Inscrite le 23 novembre 2008, 65 ans) - 6 février 2023

Hélène Poirot et Christophe Marchal sont deux quadragénaires (ou presque) qui ont, pour seul point commun, d’avoir passé leur enfance et leur adolescence à Cornécourt, village dans l’est de la France. Mais si Christophe est resté au village, Hélène avait toujours eu, dès sa plus jeune enfance l’envie de quitter ce village « étriqué » , de s’éloigner de ce milieu populaire, de ces gens qu’elles méprisent, « la petitesse infinie de ses parents »
"L'adolescence est un assassinat prémédité de longue date et le cadavre de leur famille telle qu’elle fût gît déjà sur le bord du chemin."

Et elle a réussi ; après de brillantes études, l’école de commerce de Lyon avant de rejoindre Paris, pour y suivre une "Formation coûteuse et ultra sélective".
Elle s’élève rapidement dans sa société de consulting, trouvant malgré tout le temps de se marier et d’avoir deux enfants.
Un burn-out plus tard, toute la famille quitte Paris et s’installe à Nancy, pour y mener une vie bourgeoise très aisée.
Est-ce l’arrivée de Lison, une jeune stagiaire de vingt ans, ou celle de la quarantaine, est-ce son couple qui vacille, elle va revoir Christophe et entamer une relation adultère torride.
Christophe est commercial en alimentation animale et vit chez son père avec son fils Gabriel en garde alternée. Ancien hockeyeur ayant eu son moment de gloire locale, lui aussi traverse une période difficile entre l’annonce du départ de Charlie, la mère de son fils et la maladie d’Alzheimer de son père.
L’arrivée d’Hélène dans sa vie devient une indispensable bouffée d’oxygène.

Un scénario assez simple, qui permet une représentation de la vie en province remarquablement pertinente : les copains d’école, de collège, de lycée que l’on côtoie toute sa vie. La hiérarchisation des habitants, le maire, le commerçant, le simple employé . Ces vies qui passent presque à l’identique, les enfants qui grandissent, qui partent, parfois qui reviennent, qui restent…

Jusqu’aux détails de l’époque qui parfois évoquent des souvenirs : la vaisselle Arcopal, les coups de soleil, les fêtes de famille, de villages et l’inévitable et intemporelle chanson de Michel Sardou qui rassemble tous les convives.
"On a si peu de raisons de se réjouir dans ces endroits qui n’ont ni la mer ni la tour Eiffel, où Dieu est mort comme partout, où les soirées s’achèvent à vingt heures en semaine et dans les talus le week-end."
Malgré cela, j’ai souvent trouvé la lecture ennuyeuse voire pénible.
Tout d’abord, c’est l’abondance de portraits détaillés de tous les personnages qui gravitent autour de Christophe et Hélène, leurs parents, leurs amis, les parents de leurs amis, qui perdent un peu le lecteur.
Quant au deuxième point "noir" comme l’a noté Alma, ce sont les trop longs paragraphes sur la société où travaille Hélène, fonctionnement, vocabulaire, jeux de pouvoir, misogynie..

Il me reste donc une impression mitigée, la tendresse envers des personnages attachants dans leurs désarrois, mais aussi dans leur courage, leurs désirs, leur lucidité douloureuse, l’intérêt pour ce tableau d’une vie provinciale, la qualité de l'écriture mais tout ceci perdu dans de longs et pénibles paragraphes.

L’art de raconter l’ordinaire

9 étoiles

Critique de Pacmann (Tamise, Inscrit le 2 février 2012, 59 ans) - 11 décembre 2022

Auteur de « Leurs enfants après eux » prix Goncourt que j’avais trouvé au rabais, Nicolas Mathieu revient avec un roman à nouveau aux accents réalistes dépeignant des gens ordinaires, dans notre époque, dans une France de personnes vivant dans la classe moyenne, voire supérieure.

Deux personnages qui ont le blues, avec l’impression d’avoir raté quelque chose dans leur vie. Condisciples dans le même bahut, ils se connaissaient mais n’étaient pas proches l’un de l’autre durant leur adolescence, parce que à l’époque Hélène, tête de classe, était une fille assez passe-partout, et pas très populaire et que Christophe était un champion de hockey sur glace qui faisait tomber toutes les filles.

Pratiquement vingt ans après, mariée et mère de deux filles, Hélène est cadre dans une boîte de consultance, dont les principes de fonctionnement sont complètement dézingués. Son mari dont on ne raconte pas d’où il sort, est aussi super absorbé par son travail, au point que les protagonistes semblent vivre leur vie de manière autonome, sauf de 22 heures à 6 heures dans un lit de moins en moins conjugal.

Christophe est aussi marié, avec la plus belle fille de la classe, et père du petit Gabriel, il est devenu commercial dans une firme de vente de nourriture pour chien. Il est en pleine rupture, nostalgique d’un glorieux passé, et en pleine crise de confiance. Les copains, dont la plupart ont encore plus raté leur vie que lui, restent encore un ancrage important.
Ces deux personnages vont se rencontrer, et devenir amants d’abord par besoin de tendresse mutuelle, et sans non plus chercher à construire un nouvel avenir. Ils se retrouvent comme des êtres perdus. Hélène peut-être parce qu’elle est enfin avec l’ancienne gloire qui ne la regardait pas lorsqu’elle était adolescente, et Christophe sans doute parce qu’il est un peu de nouveau vu comme un héros.

Nicolas Mathieu use enfin ici d’une écriture de qualité, preuve qu’on peut être réaliste et adopter un style correct. Sa description sociétale est prenante et les nombreux flashbacks donnent un bon rythme au récit. On perçoit à travers les phrases qui défilent le gris brumeux de cette région de France sans charme particulier et les campagnes humides et boueuse de la Lorraine.

Le titre évoque le tube de Michel Sardou et la nostalgie des soirées dansantes pour adolescents attardés et restitue parfaitement et en un mot l’ambiance de cet ouvrage.

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