La voleuse de mappemonde
de Jacqueline Porret-Forel

critiqué par Sahkti, le 29 septembre 2004
(Genève - 50 ans)


La note:  étoiles
Le fantôme d'Aloïse
Aloïse Corbaz était une extraordinaire femme peintre, illustrant sa réalité par des tons vifs, rouge, orange, qui laissent exploser la force et la violence de sa pensée. Une femme qui vivait dans sa sphère intime, coupée de la réalité, évoluant en parallèle avec une schizophrénie parfois redoutable.
Elle ne se contentait pas de peindre, elle écrivait également. Un tas de notes et de courriers, des textes dits d'humeur, des histoires.
Jacqueline Porret-Forel l'a bien connue, étudiée, analysée sous toutes les coutures, notamment dans sa thèse "Aloyse ou la peinture magique d'une schizophrène" et dans divers ouvrages.

Dans ce recueil, elle se penche sur les écrits d'Aloïse Corbaz, elle en détache le symbolisme, elle tente de faire la part des choses entre l'imaginaire d'Aloïse et sa perception de notre réalité. Travail délicat car il s'agit de pénétrer les pensées les plus intimes d'un esprit qu'on enfermera pour démence, un esprit qui prendra le large à l'asile de la Rosière.
Un état qu'Aloïse supportait difficilement dans ses moments de lucidité, très nombreux au début de sa maladie.
"On nous éteint le plus possible" résume ces lettres qu'elle enverra à sa famille, se plaignant de ses souffrances et de ses conditions de vie.
Cette partie du texte est touchante, chargée d'émotions.
Jacqueline Poerret-Forel s'engage ensuite dans une dissertation complexe sur le symbolisme dans les dessins d'Aloïse, sur les rapports entre les thèmes chers à l'artiste et les mythes fondateurs. Démonstration intéressante et enrichissante mais parfois un peu ardue!
En refermant le livre, cette impression étrange de sentir la présence d'Aloïse, d'entendre son souffle, de la deviner perdue dans son monde, profitant d'une liberté qu''elle seule pouvait connaître.