Oracle médiéval et merveilleux
de Julien Miavril, Gulliver l'aventurière (Dessin)

critiqué par El Gabal, le 21 janvier 2022
(Strasbourg - 35 ans)


La note:  étoiles
Un voyage au pays des merveilles
ORACLE MÉDIÉVAL ET MERVEILLEUX
Gulliver l’Aventurière / Julien Miavril
Je reçois aujourd’hui le superbe Oracle médiéval et merveilleux de l’illustratrice Gulliver l’Aventurière (de son vrai nom Julie Lapierre) et du poète Julien Miavril. L’instrument divinatoire de quarante lames à tranche dorée est présenté dans un charmant coffret et s’accompagne d’un livret explicatif d’un genre très particulier : chaque lame a inspiré au poète un ou deux quatrains rimés et un bref message divinatoire. Cette forme favorise une interprétation intuitive des lames et, par son style vaguement suranné, nous plonge dans l’univers des trouvères et des troubadours du Moyen-Âge qui transcendèrent et sublimèrent poétiquement leur époque.
L’introduction nous renseigne sur l’objectif de cet oracle : « Ne nous laissons pas tromper par l’action d’un oracle divinatoire. S’il permet d’offrir une compréhension enrichie de l’avenir, ce n’est pas en le prédisant stricto sensu, mais bien plutôt en révélant ce qui du présent et au présent engage un profond travail de transformation de soi. » La table est mise : il s’agit d’un travail sur soi, d’une exploration de la psyché humaine.
Découvrons les lames proposées, toutes illustrées avec soins, toutes porteuses d’une grammaire graphique originale et chargée de symboles.
Une bonne moitié des lames nous représentent des états d’âme ou de caractère associés au quotidien. La Bravoure, montée sur une licorne, affronte un serpent sous un ciel tourmenté : Point de bravoure sans le cœur ! avertit le poète. Le Message est délivré par une colombe et porte le sceau mystérieux du secret. La Connaissance, le trésor des esprits solitaires, s’applique au travail, ses joues roses trahissant sa timidité. La Gestation annonce un nouveau cycle et plonge ses racines profondément dans la terre nourricière. Le Jeu, où il ne faut jamais risquer de tout perdre ou gagner, s’entoure d’un sérieux qui en exclu la frivolité. Le Labeur, La Forêt, Le Foyer évoquent des scènes de la vie quotidienne au Moyen âge. L’Abondance voit trois fillettes danser sur la carcasse d’un serpent que La Colère a découpé en tranches, tandis que La Déchéance voit ce même serpent triomphant sur le cadavre d’une licorne. Les Rêves prémonitoires sont des gerbes de fleurs qui nous invitent Parmi le foisonnement de signes (à) découvr(ir) les présages. Où L’Héritage, fécondé par l’esprit des ancêtres semble lourd à porter. Où Le Repos survient quand la Terre nourricière nous a comblés de ses fruits et faveurs. D’autres lames, comme L’Adoubement, recommande d’être un(e) champion(ne) du bien contre l’injustice et le mal Et du seul feu de l’esprit dev(enir) le fidèle vassal. Des scènes collectives comme Le Carnaval, qui nous invite, avec Légèreté, outrance et humour (…) à tomber le masque des autres jours. Dans Le Banquet ou Le Foyer (où La mère tisse les fils de leur destin commun) se rassemblent des gens de toutes conditions et de toutes générations.
À ces scènes symboliques d’inspiration médiévale s’ajoutent des lames qui font plus clairement appel aux mythes et légendes, donc au merveilleux que l’on retrouve d’ailleurs dans le titre.
Le Dragon alimente trois volcans de sa flamme, Gardien de ce trésor qu’est l’amour absolu et fou.
Le Graal est brandi par celle qui s’en est emparé / Portant haut le calice des transfigurations alchimiques / Mystérieuse coupe pleine d’un breuvage d’immortalité.
Le Phénix couve un volcan et proclame : Qu’est-ce que mourir à soi-même sinon renaître à soi-même / Au sein d’un cycle perpétuel dont l’infini est le diadème ?
Mélusine, Femme, serpente, oiseau et fée / (…) Bâtisseuse, vouivre vagabonde / Condamnée à errer entre les mondes.
Le Griffon, Dont l’immortelle sève est miel dont l’univers s’est nourri.
Maisnie Hellequin qui proclame : L’orage gronde comme retentit notre fanfare infernale / Âmes innocentes, préparez-vous à une folle bacchanale !
Outre quelques lames qui font clairement référence à la religion (comme Le Baptême ou Les Limbes), on en trouvera qui évoquent incontestablement certaines arcanes majeures du Tarot. Ainsi de L’Étoile (Que l’espérance soit la lumière qui jaillit dans le monde !) et ainsi de La Roue de l’année qui rappelle La Roue de Fortune, ou de Réclusion, dans laquelle on reconnaîtra aisément La Tour Dieu, enfin, du Fol que l’on peut identifier au Mât du Tarot.
Le livret est complété par quelques recommandations de tirages : ceux, par exemple, du Pont-Levis (à six cartes), du Phénix (à trois cartes) ou de La Roue de l’année (à neuf cartes).
Pour conclure, gageons que l’Oracle médiéval et merveilleux, grâce à une conception soignée, les illustrations inspirantes de Gulliver l’Aventurière et la poésie de Julien Miavril, saura ravir ses utilisateurs, qu’ils soient néophytes ou férus de pratiques divinatoires ! Je leur promets de belles heures de méditation, d’introspection, d’inspiration et de belles perles de sagesse !

Serge Lamothe