Braves gens du Purgatoire
de Pierre Pelot

critiqué par Jfp, le 1 octobre 2021
(La Selle en Hermoy (Loiret) - 75 ans)


La note:  étoiles
noir pelot
Pierre Pelot fait partie de ces écrivains qui se doivent d’avoir un style, bien à eux et parfaitement identifiable. Le pari est réussi, mais ce qui faisait le charme d’un Jean Giono, lui aussi chantre d’un pays où hommes et bêtes, en proie aux forces vives de la nature, finissent par se ressembler, semble ici étrangement lourd et encombré. L’auteur multiplie les tournures désuètes, agrémentant sa prose de nombre de "vosgianismes" et termes de métier qui auraient mérité au mieux un lexique en fin d’ouvrage, au pire quelques notes en bas de page. Il ose également des envolées lyriques à la Marcel Proust, enfilant comme des perles les propositions subordonnées relatives et autres finesses grammaticales de la langue française, rendant la lecture particulièrement scabreuse. Pourtant, l’histoire qu’il nous raconte est passionnante. Situé dans les Vosges du Sud, dans une vallée reculée du pays des Ballons, aux confins de la Haute-Saône et du Territoire de Belfort, le récit part d’un double assassinat, celui de Maxime et sa compagne Anne-Lisa, maquillé en un crime (Anne-Lisa tirée à bout portant d’un coup de Luger Parabellum) suivi du suicide par pendaison de Maxime. Les gendarmes ont vite fait de classer l’affaire, le soi-disant coupable et sa victime rejoignant au plus vite le cimetière. Mais les gens du pays n’en pensent pas moins, chacun sachant ce qu’il sait sans en dire plus, et encore moins à la maréchaussée. La vérité, chère lectrice, cher lecteur, il va vous falloir attendre quelques 500 pages pour la voir apparaître, à condition de ne pas rater les indices donnés avec parcimonie par l’auteur, habile à multiplier les fausses pistes. Un lourd passé, partagé par tout un chacun, a su faire taire les langues dans ce village isolé où s’est retiré dans sa "Vôge" natale un célèbre auteur de romans policiers, vieil homme acariâtre fuyant les mondanités parisiennes. Pierre Pelot se met en scène lui-même, ce qui est assez réjouissant, même si l’humour n’est pas au programme dans ce roman noir, très noir. Son roman, on aimerait le voir réécrit pour un lecteur d’aujourd’hui. Hélas, seul l’auteur en aurait la capacité, s’il voulait bien se laisser inspirer par l’auteur de "Madame Bovary", qui savait condenser quatre pages en dix lignes. Et j’entends d’ici les fans de Pierre Pelot crier au sacrilège…