Chers disparus
de Claude Pujade-Renaud

critiqué par Clarabel, le 1 septembre 2004
( - 48 ans)


La note:  étoiles
Les belles veuves
Prodigieux travail que vient de fournir Claude Pujarde-Renaud ! Avec "Chers disparus" elle ose redonner vie à cinq portraits de femmes hauts en couleurs ! Et pas n'importe quelles femmes : toutes veuves d'écrivains célèbres. Car leurs chers disparus sont Jules Michelet, Robert Louis Stevenson, Marcel Schwob, Jules Renard et Jack London. Et toutes de se poser cette cruelle question : la difficulté d'être celle qui reste, celle qui survit et qui a la charge de "cahiers-tombeaux", c'est-à-dire la prolifique production de mémoires, journaux, manuscrits et autres cahiers des grands hommes. Mais ces dames ne s'arrêtent pas à, généralement, redorer le blason des époux perdus. Ni de revenir sur les oeuvres, majeures et mineures, des écrivains, avec ce sentiment de dépoussiérer. Non, elles décident de parler de ces hommes qu'elles ont connu au quotidien, souvent aidé dans leurs travaux, parfois secondé, soigné dans les maladies, veillé dans leurs délires et aimé jusqu'au dernier souffle. Pourtant la lecture des cahiers révèle à certaines des faces cachées, enterre le mythe d'un homme qu'elle pensait connaître, les couve parfois de honte ou d'émotion. Bref, c'est tour à tour de très beaux portraits de femmes. Car en plus d'assumer cette féminité, dans leur sexualité ou la maternité, elles ont appris à vivre dans l'ombre. Pas seulement l'épouse, et désormais veuve, chacune parvient à témoigner de leur "féminitude".
"Chers disparus" ne s'attarde pas aux hommes, au contraire le livre nous rend attachantes ces épouses exceptionnelles, attachantes, intelligentes et douées. Mais méprisées, jalousées ou conspuées. Seulement le livre de Claude Pujade-Renaud les met sur le devant de la scène, et qui sait... Sans elles, que serait la littérature des hommes ?
Chers retrouvés 9 étoiles

Je ne peux que rejoindre l'excellente critique de Clarabel qui a su mettre en évidence tout l'attrait et la fascination que peuvent nous inspirer ces cinq récits, ces cinq voix féminines et pourtant pas féministes, qui ouvrent la voie vers les vies intimes de ces grands noms littéraires, vers leur combat incessant avec la vie qui ne pouvait qu’être création, vers ces femmes toujours là, vestales fidèles et aimantes, qui ont toujours eu un rôle dans la relation à l’écriture de leur mari. Trésorières de leurs manuscrits, de leurs journaux, de leur correspondance, elles reviennent sur leur vie d’amour et de difficultés, sur l’image de l’homme, sur l’histoire de l’écrivain.
Beaucoup de sensualité, aucune lourdeur, l'écriture de Claude Pujade-Renaud est belle et simple, parfois crue, parfois poétique, parfois chaleureuse. On découvre la femme, on redécouvre l'homme, et jamais elle ne verse dans la biographie brute ou l'énumération des faits. Jamais non plus de tendance à "romantiser" leurs histoires, au contraire.
Excellent, vraiment.

Bluewitch - Charleroi - 44 ans - 16 janvier 2005