France-Algérie, les passions douloureuses
de Benjamin Stora

critiqué par Falgo, le 24 juin 2021
(Lentilly - 84 ans)


La note:  étoiles
France-Algérie: redoutable complexité.
Il s'agit du rapport commandé en juillet 2020 par la Présidence de la République à l'historien Benjamin Stora et remis en février 2021. Il reprend pour une large part les travaux et publications de l'auteur sur les rapports entre la France et l'Algérie et oriente la réflexion sur les suites à donner à une situation actuelle pleine d'énormes difficultés, dès que l'on veut tenter d'en sortir.
Ce rapport cherche à les identifier avec un remarquable souci d'exhaustivité et un vrai sens des nuances, non pas tant dans leur survenance que dans les traces qu'elles laissent dans la mémoire des derniers acteurs et de ceux qui leur sont liés d'une manière ou d'une autre. C'est donc bien la grande diversité des mémoires que ce rapport tente d'identifier. Il comprend en gros 4 parties:
-Partie I: Identification des mémoires
-Partie II : Les rapports de deux pays et leurs évolutions au cours du temps
-Partie III : Les défis à relever
-Partie IV : Conclusion et préconisations
-Annexes
La tonalité du rapport est donnée par ce que Germaine Tillion nomme l'intimité: "...une intimité quotidienne a préexisté à la guerre et a ensuite coexisté avec elle...", position également incarnée par Albert Camus dès 1956. Elle s'explique par la très (132 ans) longue présence coloniale de la France en Algérie et cet amoncellement de haines et d'amours qui s'y est développé. Les évolutions de l'Algérie depuis 1962 et l'impact de la forte immigration algérienne en France sont bien prises en compte. Il en résulte une perspective qui reconnaît et accepte les immenses difficultés d'une politique de réconciliation. Pour y contribuer, l'auteur fait une trentaine de préconisations parmi lesquelles prend place la panthéonisation de Gisèle Halimi.
Le sujet est d'une telle ampleur et d'une telle actualité que la lecture de ce livre ne suffit pas à en faire le tour. Il indique précisément ce qu'il faudrait étudier en sus. Mais tout citoyen français digne de ce nom devrait le lire.