Les habits neufs de Margaret
de Alice Thomas Ellis

critiqué par Septularisen, le 13 avril 2021
(Luxembourg - 56 ans)


La note:  étoiles
MARGARET NE VEUT PAS SE MARIER!
Margaret est une charmante jeune femme d’une vingtaine d’années. Plutôt attirée par le mysticisme elle voudrait suivre sa vocation religieuse. Car Margaret ne veut pas se marier!.. Et surtout pas avec Syl, son voisin, un homme qui a l’âge de sa mère, qu'elle trouve gros, trop petit, avare, coureur de jupons, et surtout un homme… Qu’elle n’aime pas! L'ennui, c'est que personne ne l'écoute. Que ce soit Sylvester «Syl» Monro, son fiancé, qui fait la sourde oreille. Monica, sa mère, qui la traite comme une petite fille qui fait des caprices et qui a déjà tout préparé pour la noce. Derek, son père, divorcé et remarié, qui n’est pas vraiment au courant de toute l’histoire.

N'y a-t-il donc personne pour aider Margaret? L’espoir renaît pour elle sous la forme de Lili, une rousse extravagante, fumeuse invétérée, très préoccupée par son apparence physique. En effet, cette ancienne camarade de classe et amie de sa mère, femme libérée et excentrique, vient passer quelques jours dans la maison familiale de Croydon (Sud de Londres), avec son mari Robert. Celui-ci est effet un artiste peintre reconnu et le vernissage de sa prochaine exposition doit se tenir dans une galerie de Soho.

Alors que les séances d’essayage se succèdent, que les traiteurs sont déjà commandés et que les invitations sont déjà envoyées, Lili pourra-elle aider Margaret à faire entendre raison à sa mère?

Premier volume d’une trilogie intitulée la «Trilogie du jardin d’hiver», de l’anglaise Alice THOMAS ELLIS (1932 – 2005, de son vrai nom Anna Margaret LINDHOLN), «Les Habits neufs de Margaret» (1987), est avant tout un satire acerbe et acérée, noire et lapidaire, cruelle et féroce d’une certaine petite bourgeoise anglaise d’après la Deuxième Guerre Mondiale (la date à laquelle se déroule l'histoire n'est jamais précisée, mais à certains détails on comprend que cela se passe après 1954), complètement étouffée, engoncée, dans les conventions et la bienséance.
On rit jaune, plus que l’on ne sourit aux déboires de la pauvre Margaret. Jeune femme, plutôt intelligente et réfléchie, mais qui, totalement soumise à sa mère, et n’ose pas s’opposer à elle, - qui décide de tout dans sa vie, de l’homme qu’elle va marier, à sa robe de mariage -, au point que dans quelques jours elle va se retrouver mariée à un homme que pourtant elle n’aime pas!

L'auteure manie ici une forme d'humour très «British», un peu froid, un peu distant, - n’hésitant pas à nous montrer les différents personnages, sous un jour qui ne leur est pas toujours très favorable -, mais d’une authenticité rare. Le caractère des personnages ne nous sont d’ailleurs dévoilés que peu à peu, au fur et à mesure des commentaires lucides et désespérés de Margaret . On manque un peu de recul pour juger correctement de leur profondeur psychologique, ceci est surtout dû au fait que l’histoire nous est ici uniquement racontée par Margaret, (contrairement au deuxième et troisième volet de cette histoire qui font la part belle à Mme. Murno et à Lili), et que donc, malgré la lucidité de celle-ci on ne peut juger les autres personnages, qu’à travers le prisme déformant de ses propos.

Si au début l’histoire de ce livre s'avère un peu ennuyeuse, Alice THOMAS ELLIS mène l’intrigue de main de maître, et à la fin on reste absolument «scotché» au livre pour enfin connaître le dénouement de l’histoire. Son écriture sèche, économe, fantasque, parfois méchante mais toujours très lucide, y est certainement pour beaucoup. Il faut aussi dire que les dernières pages, - où tout se met en place d’une façon très rapide et avec une facilité scénaristique déconcertante -, sont vraiment un modèle du genre! Donc, à ne rater sous aucun prétexte.

Je fini sous le charme d’Alice THOMAS ELLIS, il est dommage d’ailleurs qu’elle ne soit pas plus lue et connue dans notre pays, car vraiment elle en vaut la peine. Je vais donc moi-même partir bientôt à la découverte de son œuvre avec le second volet de cette histoire.