La révolution des sciences : 1789 ou le sacre des savants
de Jean-Luc Chappey

critiqué par Colen8, le 22 août 2020
( - 82 ans)


La note:  étoiles
Grand héritage d’une parenthèse trop peu connue
Précédant la Révolution la notion de progrès impulsée par les Lumières a lancé les savants de l’époque sur les chemins de la connaissance du monde, avant que l’Empire ne vienne brider leur trop grande autonomie à l’égard du pouvoir politique. La finalité voulue de ce progrès, avant tout celui de la raison, est dans l’espoir d’améliorer le sort des populations, de rendre le bonheur accessible à tous, belle utopie ! Dès 1789 les savants rejoignent les législateurs, à défaut sont mobilisés auprès d’eux pour les éclairer, eux les mathématiciens, chimistes, physiciens, médecins, juristes, philosophes, enseignants, tous conscients des enjeux de profondes réformes devant clore l’Ancien régime, animés de l’immense ambition visant à régénérer le corps social par l’éducation pour faire croître le nombre de citoyens responsables(1).
En une courte décennie chaotique sur le plan des institutions (1789-99), en dépit de la Terreur qui a vu disparaître des sommités telles Condorcet ou Lavoisier, le bilan n’en reste pas moins impressionnant. On connait le découpage en départements rendu possible grâce à la multiplication des cartes géographiques pour harmoniser les disparités administratives régionales, la création du cadastre pour améliorer l’assiette de l’impôt foncier, l’uniformisation des poids et mesures aboutissant à l’adoption du système métrique. On en sait moins sur les quantités d’inventaires, de comptages et de statistiques destinés à recenser les populations(2), à identifier les ressources végétales, animales et minérales. Il en est de même des collections confisquées aux nobles, aux congrégations, aux pays conquis pour venir enrichir les musées nationaux.
Le télégraphe optique de Chappe (1791) contribue à renforcer l’unité du territoire. Outre ses applications civiles permettant la diffusion plus rapide et plus large d’un français simplifié mais accessible à tous au détriment des patois régionaux, il sert énormément aux militaires pour faire face à la double menace : sur ses frontières par les coalitions européennes, à l’intérieur par les séditions incessantes et la guerre de Vendée. Toute les guerres font faire un bon à l’industrie manufacturière, à la chimie, à l’agronomie, mais hélas aussi à la médecine quand il s’agit d’évacuer et de soigner les blessés
(1) Le progrès est alors perçu comme marqueur d’un haut degré de civilisation scientifique, technique, artistique, morale et philosophique. Il justifiera par la suite les expéditions lointaines tout comme les guerres de conquête et de colonisation destinées à diffuser « la mission civilisatrice » de la République.
(2) Ebauche de l’anthropologie.