La Méditerranée, mer de nos langues
de Louis-Jean Calvet

critiqué par Colen8, le 8 août 2020
( - 82 ans)


La note:  étoiles
Une approche sociolinguistique
Bordée de trois continents, la Méditerranée porte son nom à juste titre, qui signifie « au milieu des terres ». L’histoire commence à Ougarit, ancienne cité de la Syrie, après la découverte des premières tablettes attestant de signes pour noter le langage, d’abord le sumérien, à sa suite l’akkadien. L’alphabet d’origine phénicienne est apparu beaucoup plus tard avant d’être repris par les grecs, les romains, les peuples sémitiques, plus tard encore les arabes.
Depuis 5000 ans des dizaines de langues et d’alphabets ont coexisté et se sont transformés le long des rivages de cette mer intérieure œuvrant comme un creuset unique au monde d’échanges de produits et de savoirs, de brassage des peuples en même temps qu’un champ de guerres sans fin pour les conquêtes territoriales.
Schématiquement, la Méditerranée a été découpée successivement selon plusieurs axes et zones, seul l’empire romain ayant réussi pendant un temps à asseoir son hégémonie sur l’intégralité de son pourtour :
- un axe est-ouest, les grecs sur les rives nord, les phéniciens sur les rives sud, plus tard l’empire byzantin au nord, l’empire arabe au sud
- une zone orientale turco-musulmane débordant sur le sud, une zone occidentale chrétienne
- un axe contemporain nord-sud reflétant un temps les conquêtes coloniales venant du nord, plus récemment les migrations venant du sud.
Les langues naturellement ont suivi ces mouvements, se sont enrichies d’innombrables emprunts mutuels de mots. Il en reste dix reconnues comme langues nationales officielles de nos jours, avec des exceptions pour l’arabe, le turc et le maltais (1) : français, arabe, anglais, italien, espagnol, hébreu, grec, catalan, turc, maltais. Dans cette approche sociolinguistique la vie des langues sur la durée reprend l’analogie darwinienne des mutations et sélections permanentes.
(1) L’arabe standard des textes officiels n’est en fait parlé nulle part tel quel dans la sphère arabo-musulmane où les arabes parlés de la Syrie au Maghreb en passant par l’Egypte et la Libye ne sont ni reconnus ni enseignés. Le turc est officiel à Chypre, l’anglais à Malte.