Le Crocodile d'Aristote: Une histoire de la philosophie par la peinture
de Michel Onfray

critiqué par Colen8, le 27 juillet 2020
( - 82 ans)


La note:  étoiles
La beauté de la philosophie traduite en peinture
« L’enfance de Montaigne »(1) est l’occasion pour l’ancien enseignant et homme des medias de décerner un éloge sans retenue à ce grand précurseur de la philosophie française dont les « Essais » n’ont cessé d’inspirer par leur modernité les générations successives. Entre les plus illustres des penseurs retenus ici il sait à merveille faire ressortir des parallèles, des oppositions, des complémentarités. C’est le cas avec Voltaire devenu riche et célèbre par l’effet de son talent face à Rousseau le solitaire paranoïaque et malade, ce l’est encore avec Marx, bourgeois vivant avec sa famille en Angleterre aux crochets de son ami Engels, lui qui fut le théoricien de la violence au nom de la dictature du prolétariat à l’opposé d’un Proudhon aux origines modestes, le socialiste libertaire prônant la mutualisation et ce qui deviendra plus tard l’autogestion… Il faut le suivre mot à mot dans ses interprétations du portrait par Combas d’un Sartre à la personnalité peu engageante mais qui résume si spectaculairement sa vie et son œuvre, dans celles de Derrida semblant mettre la main à la dernière ligne de son parcours de vie, peint par Adami.
Le décryptage visuel de quelques dizaines d’œuvres picturales auquel se livre Michel Onfray, pour en dégager les arguments de doctrine correspondant à autant de portraits philosophiques constitue un formidable raccourci de l’histoire des idées. Il souligne à maintes reprises l’imprégnation du christianisme par les philosophes grecs de l’antiquité, dont découle ensuite la pensée occidentale jusqu’au temps présent, depuis les présocratiques jusqu’à Jacques Derrida. Parmi les questions non résolues se trouve la croyance au déterminisme pour les uns, autrement dit le salut par la grâce affirmé lors de la Réforme protestante, avec en contrepoint celle du libre arbitre cher à Saint-Augustin. Ce pourrait être un livre de chevet appréciable en ces temps difficiles de stress et d’inquiétude. Pour se nourrir de l’esthétique de la mise en page, du talent littéraire des textes, des solides rudiments des idées et des œuvres philosophiques, pour s’endormir ensuite l’esprit plus détaché des contingences actuelles.
(1) De Pierre-Nolasque Bergeret, musée des Beaux-Arts, Libourne
Morceaux choisis 7 étoiles

Michel Onfray se propose de retracer l’histoire de la philosophie en illustrant la pensée de chaque philosophe par une peinture. Mieux, par un détail de cette peinture. D’y déceler l’analogon duquel il déroulera le fil de la pelote.

Cet exercice est intéressant mais parfois tiré par les cheveux. D’ailleurs la chronologie est lacunaire car l’auteur n’a pas toujours trouvé d’angle d’étude picturale pour certains grands noms de la philosophie. On retrouve néanmoins la langue maîtrisée du philosophe et ses opinions tranchées, délivrant bons et mauvais points à ses confrères qu’il réhabilite, encense ou rudoie. La période contemporaine, plus confuse, m'a beaucoup moins convaincu que le reste de l'ouvrage.

À noter que le livre est très agréable à parcourir.

Elko - Niort - 47 ans - 22 avril 2021